Après avoir parcouru les épisodes tourmentés de la commune aux côtés d’Hervé Le Corre, je me retrouve transporté une vingtaine d’années plus tard, toujours à Paris aux côtés de Didier Le Pêcheur et de son dernier roman, Un bref désir d’éternité, publié aux éditions JC Lattès.
Didier Le Pêcheur est réalisateur et scénariste, il est déjà auteur de deux romans remarqués publiés chez JC Lattès, Le bord du monde et Les hommes invisibles.
L’histoire se déroule à Paris en 1892. Alors que Paris est touché par une série d’attentats et que la police recherche activement un anarchiste dénommé Ravachol, Jules Lhérot, un garçon de café, le reconnaît parmi ses clients et concourt à son arrestation. Se retrouvant érigé en véritable héros par une presse qui est en train de découvrir que la peur fait vendre, il devient rapidement une cible à abattre pour les anarchistes voulant se venger.
Pour s’en sortir, Jules décide de s’engager dans la police. Il va croiser la route de Zélie, une jeune femme qui s’est enfuie de la maison de correction où elle était enfermée. Zélie est une jeune fille d’ouvrier, prompte à frayer avec les marlous et bien décidée à monnayer son corps pour se faire une place dans le monde. Lui est policier, elle est prostituée. Lui tombe éperdument amoureux d’elle.
Didier Le Pêcheur a fait le choix de s’inspirer de personnages qui ont réellement existé. Jules Lhérot fut bien le tombeur de Ravachol, un célèbre anarchiste du 19ème. On ne sait pas grand-chose de ce que devint Jules Lhérot après sa soudaine notoriété, si ce n’est qu’il devint policier. Son histoire restait donc à imaginer. Le personnage de Zélie, lui, est inspiré de la vie d’Amélie Elie, dite Casque d’or, personnage campé par Simone Signoret. Zélie et Jules Lhérot ne se sont jamais rencontrés et Didier le Pêcheur a donc décidé de corriger cette impardonnable erreur de l’Histoire.
Autour de cette histoire entre ces deux êtres, l’auteur nous embarque au cœur d’un Paris âpre et sulfureux, croisant les beaux quartiers mais aussi les bas-fonds. On y croise des insoumis et des bourgeois, des hommes qui rêvent de sentiments et des femmes qui rêvent de se soustraire au joug des hommes, le tout au milieu d’une jeunesse laissée pour compte de brûler sa vie par les deux bouts. L’auteur nous dépeint un monde où chacun a quelque chose à cacher, où la survie des uns se paie de la souffrance des autres.
La corruption, les rafles de basses besognes, les attentats anarchistes, les bandes rivales qui s’affrontent et le développement du proxénétisme sont la toile de fond de ce bref désir d’éternité, qui, au final, s’avèrera plus long qu’il n’y paraît, Jules ne renonçant jamais, malgré les péripéties et les obstacles, à aimer Zélie.
Au-delà de l’histoire entre les deux personnages, la qualité de ce roman tient dans surtout de la fresque historique construite par Didier Le Pêcheur autour de la période anarchiste qui toucha la France à la fin du 19ème siècle. Un peu comme dans l’ouvrage d’Hervé Le Corre, l’auteur réussit à nous décrire une atmosphère parisienne si particulière en mêlant la petite histoire à la grande Histoire.
On prend plaisir à lire ce livre, particulièrement quand on aime l’Histoire et la littérature. |