Louisa May Alcott a vécu à la fin du 19ème siècle, auteure de littérature jeunesse (Les quatre filles du Dr March), elle utilisait un pseudonyme masculin pour publier d’autres romans plus sombres, comme La femme de marbre que voici.
Blindé de clichés dont les feuilletons télé sont friands, le roman est d’un contemporain étonnant. Louisa May Alcott raconte l’histoire de Cecil, une orpheline à peine adolescente, recueillie par Bazil York, un ancien ami de la famille grincheux. Sculpteur, l’homme se charge de faire de la jeune femme une parfaite œuvre, douce et gracieuse, docile et souriante. Une jolie potiche accro au laudanum en forme de sois-belle-et-tais-toi.
Alors que la jeune Galatée droguée commence à succomber aux charmes d’un autre homme que son tuteur, ce dernier ne voit pas l’idylle du même œil. Parce qu’il n’est lui-même pas insensible aux charmes de Cecil. Triangle amoureux aux vapeurs d’inceste, l’auteure mène son lecteur de rebondissements en surprises avec une facilité déconcertante.
Sombre, le roman a les accents d’un orage sans eau, de lourds nuages planent à l’horizon, s’approchent en une cavalcade silencieuse, menaçant à chaque instant de lâcher leurs trombes sur la douce musique d’un bal enchanté. Au-delà de la distraction littéraire, La femme de marbre décortique les relents de manipulations exercés par Yorke, artiste Pygmalion hanté par sa création.
Pour la première fois traduit en français, le roman a le style des belles lettres, les phrasés enrobés dans un vocabulaire apprêté pour le bal. Cecil est la femme triomphante entre les lignes, princesse féministe au royaume de la domination masculine. |