Comédie dramatique de Jean-Luc Lagarce, mise en scène de Clément Hervieu-Léger, avec Aymeline Alix, Louis Berthélemy, Audrey Bonnet, Clémence Boué, Loïc Corbery, Vincent Dissez, François Nambot, Guillaume Ravoire, Daniel San Pedro, Nada Strancar et Stanley Weber. Avec "Le Pays lointain"; son ultime opus dramatique considérée comme testamentaire, tel le patriarche des temps anciens sentant sa mort venir convoque tous les siens pour un dernier adieu, Jean-Luc Lagarce devient le chroniqueur de sa propre vie pour indique-t-il, "à l’heure de sa mort, pouvoir, juste, régler quelques comptes, revoir quelques erreurs, terminer ce qu’on abandonna, s’excuser de ses mensonges, pardonner ses offenses...".
De format long frisant les quatre heures, et non remanié compte tenu des circonstances de son écriture, il comporte autant de longueurs que de fulgurances et hybride "Juste la fin du monde", tentative ratée d'un transfuge de classe égocentré non pas tant de retrouvailles avec sa famille biologique quittée depuis longtemps que de l'annonce de sa mort prochaine, et "Derniers remords avant l'oubli" sur les laborieuses retrouvailles amicales.
D'un côté, le fantôme du père mort (Stanley Weber), la mère (Nada Strancar), le frère (Guillaume Ravoire), son épouse (Aymeline Alix) et la sœur (Audrey Bonnet). Au centre, l'auteur Loïc Corbery). De l'autre, son ami de longue date (Vincent Dissez) et sa fiancée (Clémence Boué), le fantôme du dernier jeune amant (Louis Berthélemy), l'archétype de l'amant de passage (François Nambot) et celui de la rencontre d'une heure (Daniel San Pedro).
Jean-Luc Lagarce élabore une partition mentale à l'instar d'une recherche du temps perdu dans laquelle il rassemble son petit monde, tels les personnages de la bible du romancier, qu'il met en scène mêlant les formes dialogale, monologale et narrative selon toutes les modalités du lyrique au dramatique.
Et elle se constitue d'une multitude de séquences courtes sans linéarité chronologiques qui constituent autant de points de vue sur le protagoniste central et de variations d'événements susceptibles de rendre compte de la vérité de son instigateur, celle d'un homme qui s'est refusé à tout attachement.
Clément Hervieu-Léger la dispense comme une fresque presque légère scandée par des gongs sonores et des noirs dans une scénographie glauque de Aurélie Maestre, un décor gris de désolant noman's land, aire de parking avec cabine téléphonique et voiture désossée devant une palissade de béton délimitant un terrain vague.
Quasiment toujours présents sur scène, tous les comédiens, aguerris, avec une mention spéciale à Vincent Dissez, ou jeunes pousses tel le prometteur Louis Berthélémy, officient en jeu frontal pour (dé)livrer dans la choralité cette "histoire d’un jeune homme qui décide de revenir sur ses traces, revoir sa famille, son monde, à l’heure de mourir".
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