En résonance avec certains de ses éléments décoratifs, le Musée Marmottan-Monet présente l'exposition "L’Orient des peintres, du rêve à la lumière" dédiée à la peinture orientaliste qui s'est déployée au 19ème siècle.
Elle résulte de la vogue de l'orientalisme initiée par la mode des turqueries suivie par l’égyptomanie qui a été relancée par l’expansion coloniale au Maghreb et au Moyen Orient qui a motivé de nombreux peintres à réaliser un avatar oriental du Voyage en Italie du 17ème siècle.
Et elle s'est déclinée en deux registres, celui de la peinture naturaliste ethno-historique et celui de la peinture "exotique" qui, par l'expérience de la couleur et de la lumière, est considérée comme une des voies annonçant la peinture moderne et menant à l'abstraction qui constitue le propos - et l'intérêt - de cette exposition.
En effet, telle est la démonstration que la commissaire Emmanuelle Amiot-Saulnier, Docteur en Histoire de l’art, propose en cinquante oeuvres, quatre des genres picturaux et sept étapes chrono-thématiques dans une scénographie dynamique de Anne Gratadour articulée autour d'une version contemporaine du moucharabieh masquant les belles au bain. L'Orient pictural, transcender le rêve et la réalité
L'exposition permet en premier lieu de découvrir, décliné tant par les grands noms de l'Histoire de la peinture que les petits maîtres devenus méconnu, le répertoire orientaliste.
Celui-ci opère un renouvellement des motifs classiques, dont celui de la Venus antique novée en odalisque par Ingres et revivifie le sujet de la femme à sa toilette comme le genre du nu tous deux placés sous le signe d'un érotisme fantasmé dans des scènes imaginaires de hammam et de gynécée ("Le jeu d'osselets" de Paul Alexandre Leroy - "Massage" de Edouard Debat-Ponsan).
Et l'idéal de beauté se décline en brune sensuelle et pulpeuse ("La juive de Tanger" de Charles Zachare Landelle - la "Jeune algérienne" de Corot)souvent représentée dans des scènes de genre qui font la part belle à sa nudité comme dans "Intérieur de HArem" de Théodore Chasseriau et "Le marché aux esclaves" de Jean-Léon Gérôme.
L'Orient est également synonyme d'expérimentation extrême de la lumière et de la couleur. La puissance du soleil qui sévit dans ces contrées modifie la lumière qui paradoxalement sature les couleurs et, quand le soleil est à son apogée, les décolore jusqu'au blanc qui permet d'user d'une palette de couleurs pures tout en explorant les camaïeus et le monochrome "Le Pays de la soif" et "La rue Bab-el-Gharbi à Laghouat" de Eugène Fromentin).
Enfin, la confrontation avec les arts décoratifs musulmans induit une géométrisation progressive et une bidimensionnalité qui privilégient la composition et le rythme des couleurs annonçant l'abstraction qui sont significatifs dans la peinture de paysage ("Le Port d'Alger" de Jules-Alexis Muenier) comme l'analogie entre l'arabesque ornemental et la courbe du corps.
Ainsi se déploie l'évolution vers l'abstraction, pour la figure, de la "La Grande Odalisque" de Jules Flandrin à "L'odalisque en culotte rouge" de Matisse, pour la scène de hammam, du "Massage" de Edouard Debat-Ponsan au "Bain turc" de Félix Vallotton en passant par le "Bain maure" de Jules Migonney, et, pour la scène de genre ,du "Pays de la Soif" de Eugène Fromentin à l'"Oriental" de Kandinsky.
Bien d'autres sujets telle ce que la commissaire nomme "la parenthèse lumineuse" pour caractériser la tentation orientaliste des peintres impressionnistes et post-impressionnistes dont Pierre Auguste Renoir avec un "Paysage algérien, le ravin de la femme sauvage, scandent cette passionnante exposition.
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