La maison. Titre apparemment anodin. L’histoire aurait pu être celle d’un chantier, du terrassement au toit en passant par les rendez-vous chez le carreleur et le choix des rideaux de douche. Et bé non. L’histoire de La maison est plus sombre, plus glauque, tenir le roman entre ses mains revient à s’asseoir sur la margelle d’un puit, lire le roman vous fera glisser irrémédiablement dans ses sombres profondeurs sans contour.
Vanessa Savage choisit le Pays de Galles pour décor de ce premier roman, ça tombe bien, elle y vit également. La maison serait-elle inspirée d’une bâtisse de sa rue ? J’en ai une en face qui m’inspire le même effroi. Vous savez, de ces demeures fantômes abritant des drames plus ou moins célèbres. Et bien Patrick y a grandi et compte bien la racheter pour y loger sa famille.
Sa femme Sarah d’abord, fragile bout de dame à la déprime pesante, et leurs deux ados en quête d’identité : Joe et Mia. Quand Sarah fait une seconde tentative de suicide, quand son fils a un accident, quand sa fille accumule les mauvaises fréquentations, Patrick réussit à convaincre tout le monde de déménager. Les enfants protestent, Sarah cède, ils déménagent. Reste plus qu’à repeindre le tout et happy end pour tout le monde.
Mais non, La maison n’est pas n’importe quelle maison. Des cadavres y ont été retrouvés quelques années plus tôt, massacrés par Ian Hooper. Nommée "La maison du crime" par la presse et attirant les charognards, le nouveau foyer de Sarah et Patrick tarde à retrouver sa sérénité. Mais il n’y a pas que ça.
Les angoisses planent dès les premières lignes du roman, avant même que le lecteur en prenne conscience. La famille est en péril depuis bien plus longtemps que le début du roman. Patrick guette l’opportunité de racheter la maison du crime depuis plusieurs années. Les meurtres ne changeront rien à la rancune éprouvée depuis que ses parents ont dû se séparer de ce bien.
Mais pourquoi lui faut-il absolument reconquérir ces murs moisis et ces souvenirs sanguinolents ? Pourquoi Sarah semble éteinte à ce point ? Qui est le rôdeur qu’elle croit voir ? Fruit de son imagination troublée ou danger ? Qui est vraiment Anna ? Est-ce que Joe doit apprendre la vérité sur ses origines ? Pourquoi Sarah cache ses dessins à son mari ? Ne l’a-t-il pas encouragé à peindre ?
Nous ne sommes pas sans savoir que les mystères ne font pas bon ménage avec les secrets. Ils font en revanche de bonnes histoires. Glaçantes à souhait.
Vanessa Savage sait que le passé n’a besoin que d’une surface pour remonter. Elle fait de son roman un thriller déroulé d’une main de maître, jusqu’à la dernière goutte d’encre, épuisant le lecteur à le tenir éveillé ou à revenir dans ses cauchemars. L’auteure tisse les liens humains de nœuds inextricables, fragiles attaches ancrées profondément dans la chair.
Il sera facile de juger les personnages, mais il sera bien moins évident de décoller l’ambiance noire et addictive de La maison. J’ai même essayé au pied-de-biche, reste toujours ce goût. |