Comédie dramatique d’Arne Lygre, mise en scène de Stéphane Braunschweig, avec Anne Cantineau, Virginie Colemyn, Cécile Coustillac, Glenn Marausse, Pierric Plathier, Chloé Réjon et Jean-Philippe Vidal. Pour le quatrième opus de son cycle sur la thématique de l’existence identitaire et la désidentification des personnes-personnages, anonymes dépourvu d'état civil, simplement qualifié par un statut, et ce par un déterminant indéfini, dans une hiérarchie relationnelle, le dramaturge norvégien Arne Lygre indique explicitement avoir opéré un choix stylistique qui se matérialise par un texte avec l'incise du dialogue durassien.
Traduit par Stéphane Braunschweig et Astrid Schenka sous le titre significatif "Nous pour un moment", la partition se déploie en six séquences enchaînées à la manière de la ronde schnitzlérienne et sous obédience de la polyphonie woolfienne.
S'y croisent des vies interrompues par la mort, mort accidentelle, maladie, suicide, meurtre, pour décliner la métaphysique existentielle de l'homme postmoderne caractérisée par l'individualisme exacerbé et l'opportunisme affectif.
En d'autres termes, l'absence de projet de vie que le sociologue Zygmunt Bauman a conceptualisé sous la théorie de la société liquide fondée sur la paradoxalité de la quête d'une relation pérenne et le refus de toute implication et engagement qui constituerait un frein à la liberté individuelle et un renoncement à toutes le potentialités possibles.
Poursuivant son compagnonnage artistique avec Arne Lygre dont il a mis en scène les volets précédents - "Je disparais", "Jours souterrains", "Rien de moi", Stéphane Braunschweig, porte à son acmé l'exercice à l'épreuve de la scène.
L'a-réalité de la partition à la dimension purement mentale est soutenue par la scénographie conçue par Stéphane Braunschweig, un plateau transformé en immense pédiluve avec un espace scénique circonscrit par deux cimaises en angle droit, telles les pages d'un livre ouvert, sur laquelle s’affiche le rôle situationnel de chaque intervenant, placé sous la lumière blanche et réfléchissante de Marion Hewlett et la sonorisation des officiants. Des officiants triés sur le volet - par ordre d'apparition sur scène Chloé RéjonVirginie Colemyn, Glenn Marausse, Jean-Philippe Vidal, Cécile Coustillac, Anne Cantineau et Pierric Plathier - lesquels, dans cet univers glacial, presque clinique,en résonance avec la beauté des fjords nordiques, et sous son exemplaire et rigoureuse direction d'acteur, portent méritoirement le propos lygréen. |