Biopic théâtral conçu et mis en scène par Stéphan Druet et interprété par Sebastiàn Galeota. En 1919 naît María Eva Duarte animée d'un précoce et inébranlable désir de revanche sociale pour sortir de sa condition plébéienne. Devenue actrice pour entrer dans la lumière, elle scelle son destin en 1945 en misant judicieusement sur Juan Peron "le colonel qui monte" sur l'échiquier politique.
Il a 50 ans et deviendra le leader du péronisme et la tête de pont d'une dictature populiste à la mode sud-américaine. Elle a 26 ans et trouve son meilleur rôle en se créant, calqué sur l'archétype de la star hollywoodienne et l'iconographie de la Vierge des rutilantes églises d'Amérique latine, le personnage autofictionnel d'Evita, Sainte patronne des "descamisados" qui, nonobstant la controverse, sera iconifié de son vivant et mythifié par une mort prématurée.
Cette figure ambivalente "à mi-chemin de Marilyn Monroe et de Mère Teresa" comme il l'indique, a fasciné l'auteur et metteur en scène Stéphan Druet qui a conçu un (im)pertinent biopic théâtral(isé).
Ne participant ni de l'hagiographie, de la caricature copienne ou de l'historicisme, il résulte d'une approche kaléidoscopique usant de surcroît d'un humour au second degré, telle la harangue avec l'antienne "No señor" qui évoque la réplique des "non merci" rostandien de Cyrano.
Intitulé "Evita - Le destin fou d'Eva Peron", il est délivré en adresse au public par l'intéressée sous forme hybride, celle d'un monologue mnésique comportant de brèves incises dialoguées et des interférences avec les soliloques de son coiffeur confident, celles-ci, fiévreuses, s'avérant génératrice d'une troublante étrangeté identitaire. Partition pour un comédien, elle n'a pas été écrite pour un anonyme mais pour Sebastiàn Galeota, comédien, chanteur et danseur d'origine argentine qui, sous la direction éclairée de Stéphan Druet, investit cette figure plus grande nature qui trône, statufiée et momifiée comme le fut le corps d'Eva Peron, carapaçonnée dans une somptueuse robe de bal de princesse de conte de fées confectionnée par Denis Evrard. Gantée, endiamantée et casquée de l'emblématique coiffure élaborée à des fins signifiantes, reconstituée par la perruquière Micki Chomicki, la diva ressemble à une édifiante figurine de gâteau de mariage qui parle et raconte son ascension vers la gloire appuyée par des inserts vidéographiques d'images d'archives projetées sur le bouillonnement de la jupe et rythmée par des intermèdes musicaux.
La symbiose entre l'auteur-metteur en scène et l'interprète concourt à l'excellence
d'un opus porté par l'art protéiforme de Sebastiàn Galeota qui procède à une ébouriffante composition et dispense une éblouissante prestation. |