Des percussions, lentes, militaires, graves, "Entendu que la beauté a toujours raison, et qu’il nous faut en être un creuset, l’horreur a son potentiel, c’est le cri" ("La joie noire"). L’ouverture. Et quelle ouverture ! Mercenaire de la rime, Andoni Iturrioz puise ses mots dans la fange et ses rythmes dans les constellations pour ce troisième album Le roi des ruines.
"L’amour est la formule des cieux dans les louanges" ("Jérusalem")
Expérience de mort, de renaissance, la résilience, cette indéfinissable puissance que savent invoquer certaines âmes, au prix d’une douleur infinie. L’artiste pose ses mots sur des émotions, des sensations, sur les vides et les espaces, les incompréhensions et l’absurde. Il tisse des liens entre tout ce qui est en marge, l’insaisissable et le paradoxal, proposant une vision du monde de son regard à l’horizon perpétuel.
"Je vois des fleurs dans l’invisible, elles sont belles parce qu’elles nous manquent, j’ai des baisers indestructibles, dans ma mémoire au gout de menthe" ("Dans la rocaille").
Le roi des ruines pourrait être une interprétation intérieure d’états inconscients, l’album floute la frontière du conscient et de l’inconscient pour parler de l’humanité dans sa pleine nature, à poil et toute nue, de la fragilité de ses sources à la bassesse de ses contraires. Il n’y a pas à redire, Andoni a l’art de la formule.
"Mon amour est une fable, et ce fut un coup de foudre, et son cœur est de sable et le mien est en poudre, que de ruines romantiques, dans les limbes du temps, entêtement héroïque, des amours débutants, j’avance à pas de lune dans ma propre lumière, oh roi des infortunes, des ruines et des misères, à lancer sur le ciel, des mirages éprouvants, des messages torrentiels, et des charmes mouvants, je suis le roi des ruines." ("Le roi des ruines").
Chansons à textes, sarcasme à la pelle, rock à la pleine lune, l’artiste propose un intense voyage intérieur, le blues du bisphénol en prime. Andoni Itturioz pose de la musique sur les souffles, il fait remonter les remous des profondeurs. Aux rythmes de basses assourdies, les cordes insufflent de la vie dans les textes, véhiculent la voix de l’artiste, mi phrasée, mi chantée, de ce timbre mat et régulier, rassurant, vibrant comme une ligne de basse, un vertige.
"On s’évertue à donner un sens, on monte sur des échelles de cordes accrochées à nos propres épaules, on se contorsionne, on se grimpe sur le corps, on se gravit le sommet du crâne, croyant y trouver Dieu, à la fin de nos vies, dans le désert de nos calvities, on plante un drapeau ridicule : victoire" ("La fabuleuse histoire de Judas Iscariote").
# 5 avril 2020 : sous le soleil... mais pas vraiment
Les beaux jours sont au rendez vous en ce début avril mais nous, sages et confinés n'allons pas cette année envahir parcs et terrasses à comparer son bronzage à coup de vin rosé douteux... non on attend que la mort détourne les yeux de notre pauvre monde. Donnons nous un peu de baume au coeur avec notre sélection culturelle hedbo.