Bluffant dans Théâtre des dieux, Matt Suddain reprend sa plume de caractère et nous offre Chasseurs et collectionneurs. Des expressions croustillantes, des tournures de phrase malicieuses, l’auteur a l’écriture épique, à l’image de ses héros.
Tomahawk est Jonathan Chamberlain, et il critique la gastronomie. En gros, il se pointe dans des supers restau et s’il est mal servi, et bien ses publications ne sont pas tendres, sa réputation fait le reste, les méchants restaurateurs perdent une étoile, ou pire. Il est de ce fait redouté, craint et respecté. Un vrai gourou de la bouffe.
"Un repas si fade et sans prétention que je doute qu’il ait même l’ambition de devenir de la merde. Il restera probablement dans mon côlon à bailler."
Mais l’imaginaire de Matt Suddain ne s’arrête pas là. Tomahawk court les planètes à la recherche d’un hôtel légendaire officiellement disparu dans un bombardement. Aux frontières de la folie, traqué par des jaloux et des anonymes, le récit écrit parfois à la première personne, parfois la troisième personne louvoie entre les traversées, les souvenirs et les larges digressions de notre critique gastronomique.
"Le Touriste. Vos nuages de stupidités vêtus de graisse suante rose scrotum et d’habits synthétiques. Je lutte pour retrouver un lieu que j’ai visité dont la beauté n’a pas été ternie par votre visage débile. Goules sans menton. Vous dévorez des livres qui vous disent quoi faire, quoi penser, où dormir, à quel restaurant dîner. Eh bien, laissez-moi vous dire ce que vous devez absolument faire. Vous devez aller vous faire foutre."
Hors norme, bizarre, absurde, extravagant et drôle, le style de Matt Suddain a de quoi faire relire plus d’un paragraphe. Des sauts dans le temps et d’une temporalité erratique, l’auteur crée un puzzle logique dont l’issue ne se révèle qu’aux lecteurs les plus téméraires. Il désarçonne, assurément. Avec un regard cynique sur l’humanité et des vœux désabusés sur l’avenir de notre espèce.
"L’apocalypse est ma joie. Je ne ressens aucune tristesse à l’idée de notre extinction. La pire des horreurs pour moi n’est pas la possible fin de l’humanité mais la survie éternelle de notre Empire de Stupidité."
Chasseurs et collectionneurs est gore, weird, machiavélique et rocambolesque. |