Eskimo, c’est : "c’est une personne, un projet, une atmosphère, une fascination pour les peuples autochtones et les pays du nord". C’est une jeune musicienne qui cultive un univers particulier pour ne pas dire singulier.
Son premier disque Que faire de son cœur ? offre une musique sophistiquée, savante, exigeante, aventureuse mais foncièrement mélodique, pop et indépendante. Dans une veine pas si éloignée de cela d’artistes comme La Féline, Mira Cétii, Fantôme : "c’est mon amie et on a même un groupe ensemble qui s’appelle "La Mantique", c’est de la musique improvisée". Cate Le Bon, Julia Holter ou St. Vincent. Ces influences ? "J'écoute beaucoup de choses diverses. Classique, jazz, soul, expérimental, rock alternatif, rock progressif, garage, punk, post-punk, rap, pop psychédélique, dream pop, et musique du monde et de toute sorte de bizarreries".
C’est tout un monde sonore, pas un monde lointain pour paraphraser Henri Dutilleux, car Eskimo arrive à tisser un lien étroit avec celui qui l’écoute. Comme si, par cercles concentriques elle arrivait à nous attirer à elle. C’est une musique envoûtante, solaire... expressionniste presque.
Si ce Que faire de son cœur ? est un choc de beauté et de sensibilité, c’est d’abord et avant tout parce qu’il repose sur une écriture, des compositions solides. Il se fonde sur une capacité à jouer avec les tensions, entre moments de calmes presque atmosphériques et moments de tension, à construire à la frontière des formats pop de grandes chansons habitées et à suivre des chemins hors des sentiers battus. "Il y a du bonheur hors des sentiers battus. Il y a du bonheur dans les sentiers rebattus et une certaine façon de cueillir le bonheur qui procure de la joie".
Des chemins, une esthétique moins brute que sur son premier EP Dancing Shadows. "Je voulais quelque chose de plus ouvert. Déjà le fait de chanter en français, change les choses. On n’aborde pas le texte de la même manière en français. Et puis, pour ce disque j’ai eu la chance d’avoir un ingénieur du son du nom de Guillaume Jaoul qui a aussi joué le rôle de réalisateur et on a travaillé ensemble pour avoir ce son, cet esthétisme".
Eskimo ne chante pas uniquement en français, puisqu’elle fait également des incursions en japonais. "Une langue c’est une culture et j’aime et suis curieuse des autres cultures. Ça apporte beaucoup de regarder ailleurs comment on pense. Ça permet d’élargir sa vision". Des textes, sur les rêves, l’amour, le rapport aux autres qui ont une importance. Ils font "écho avec notre période troublée. Et c’est intime car j’aborde les textes ainsi. C’est toujours quelque chose que je ressens ou vis et que j’intériorise pour ensuite le mettre en mot".
On ressort de ce disque comme après un rêve (ces jeux de timbres, avec le saxophone notamment, de rythmiques...), chamboulé, avec l’irrépressible envie d’y retourner.
Il faut soutenir absolument ce disque, cette artiste. D’abord et avant tout parce que cette musique vaut que l’on s’en donne la peine. Et puis en cette période de confinement, encore plus qu’habituellement, c'est vraiment difficile de se faire une place...
il fait (presque) beau partout, on sort un peu de chez nous, on voit nos amis, on pense aux vacances. Chez Froggy's on continuera tout l'été à vous alimenter en culture mais ce sera peut être un peu plus calme. En attendant, voici le sommaire et bien sûr le replay de La Mare Aux Grenouilles #5 !