S'il n'y avait qu'un livre à lire sur l'extermination perpétrée par les nazis, ce serait celui de Primo Levi "Si c'est un homme".

Persuadé qu'aucune expérience humaine n'est dénuée de sens ni indigne d'analyse, il entreprend dès son internement de prendre des notes sur ce qu'il vit pour survivre et témoigner sur ce qui a eu lieu, cette "abomination qu'aucune prière propitiatoire, aucun pardon, aucune expiation des coupables, enfin rien de ce que l'homme a le pouvoir de faire ne pourra plus jamais réparer".

Scientifique et athée, il décrit avec rigueur et précision le processus de déshumanisation qui mène à l'extermination : l'homme privé de tout ce qu'il possède et de tout ce qu'il est devient "un homme vide, réduit à la souffrance et au besoin, dénué de tout discernement, oublieux de toute dignité, un homme dont on pourra décider de la vie ou de la mort, le cœur léger, sans considération d'ordre humain" mais aussi de la lutte psychique quotidienne du prisonnier pour ne pas être détruit du dedans.

Quand Levi tente d'expliquer la haine des nazis envers les Juifs, il évoque notamment l'aversion pour ce qui est différent de nous, thèse qu'il est intéressant de mettre en parallèle avec celle du philosophe Wladimir Jankelevitch pour qui, au contraire, ce génocide est dû à la haine de soi.