Voilà peut-être l’une des révélations de cette rentrée littéraire, un de mes coups de cœur du moment, un ouvrage annoncé dans la lignée de celui de Gabriel Tallent, My absolute darling, qui rencontra un immense succès. Une fois encore, les éditions Gallmeister ont été déniché une petite pépite aux Etats-Unis écrite par une certaine Tiffany McDaniel, une auteure vivant dans l’Ohio, dont l’écriture se nourrit des paysages de collines ondulantes et de forêts luxuriantes de la terre qu’elle connaît. Elle est également poète et plasticienne. Son premier ouvrage devrait bientôt paraître chez Gallmeister.
Nous la découvrons donc avec Betty, un roman magnifique d’un peu plus de 700 pages que je ne suis pas prêt d’oublier, un ouvrage éblouissant qui nous transporte dès les premières pages et nous procure des émotions incroyables.
Betty, c’est le nom d’une petite indienne que nous allons suivre tout au long du livre. Betty Carpenter. Betty Carpenter est née dans une baignoire, sixième de huit enfants. Sa famille vit en marge de la société car, si sa mère est blanche, son père est cherokee. Lorsque les Carpenter s’installent dans la petite ville de Breathed, après des années d’errance, le paysage luxuriant de l’Ohio semble leur apporter la paix. Avec ses frères et sœurs, Betty grandit bercée par la magie immémoriale des histoires de son père. Mais les plus noirs secrets de la famille se dévoilent peu à peu. Pour affronter le monde des adultes, Betty puise son courage dans l’écriture : elle confie sa douleur à des pages qu’elle enfouit sous terre au fil des années. Pour qu’un jour, toutes ces histoires n’en forment plus qu’une, qu’elle pourra enfin révéler.
L’histoire que nous raconte l’ouvrage se déroule dans l’Ohio, sur les contreforts des Appalaches et on suit ce que Betty nous raconte de sa vie, au fil des années, entourée de ses frères et sœurs mais surtout de son père, particulièrement protecteur. Betty est métisse, différente de ses frères et sœurs, ce qui ne lui facilite pas la tâche dans un village où la plupart des habitants sont des sombres racistes. Betty est la petite indienne de son père, celle qui lui ressemble le plus. Le père, un homme pilier du roman, est un touche à tout, jardinier, formidable conteur d’histoire, soignant à l’aide d’herbes trouvées dans la foret mais aussi sculpteur sur bois. Il distille aussi lui-même son alcool. C’est un homme honnête, un être bon de nature, un bon père de famille qui se nourrit de spiritualité et de légendes indiennes qu’il aime raconter à sa fille.
Betty aussi va se nourrir des histoires de son père, de ses conseils pour arriver à traverser les tourments et les drames qui ont touché sa famille, particulièrement sa mère et sa sœur. Betty écrit aussi tout ce que les autres lui confient et les enterrent dans des bocaux en verre à proximité du potager de son père.
Betty est au final un magnifique roman sur l’enfance et la perte de l’innocence. Il y a tout dans ce livre, des passages d’une tendresse incroyable mais aussi des passages terriblement cruels. Sombre et lumineux à la fois, le livre n’oublie pas de nous brosser au passage les maux de l’Amérique de l’époque, entre racisme ordinaire et discriminations vis-à-vis des indiens mais aussi autour des violences faites aux femmes. Bref, on n'est pas prêts d’oublier cette petite indienne, cette petite Betty qui nous aura embarqués dans son enfance de la plus belle des manières. |