" Des effets collatéraux des relations entre les hommes "
En somme, toute manifestation de l'activité humaine dans le champ des intérêts, se résout en un inextricable écheveau de relations. Le maître mot de ces relations est l'ignorance.
L'ignorance des effets que nos actes induisent sur des tiers dont nous ne soupçonnons pas l'existence. "Syriana", réalisé par Stephen Gaghan, avec dans les rôles principaux, George Clooney, Matt Damon et Jeffrey Wright, nous donne de cette réalité mondialisée, une vision d'un esthétisme aussi subtil qu'accompli.
L'histoire se déroule sous nos yeux avec une logique et une intelligence synchrone. La cohérence et la qualité de la photographie nous immerge lentement mais sûrement dans l'intrigue, qui ne se noue que par le jeu contradictoire des intérêts économiques, religieux et humanistes.
Tiré du livre de l'écrivain-ex membre des services secrets, Robert Baer "See no Evil", (littéralement, "Ne voir aucun Mal"), l'adaptation que propose le réalisateur n'oriente pas, elle décrit : la guerre du pétrole, la corruption - ordinaire du quotidien – l'idéalisme et ses limites dans sa mise en oeuvre, la voie de l'engagement religieux, lorsque les circonstances accusent les donneurs d'ordre du capital, qui font et défont le travail.
La violence est l'ordinaire de ce monde. Une violence du capital, une violence des identités, une violence d'aveugles, une violence finalement générée à distance, à l'abri mais qui trouve un écho en chacun et en n'importe quel lieu. "Syriana" est une vision documentaire de notre monde, tournée caméra à l'épaule. Une mise en scène de reportages, comme de longs extraits de vie des uns et des autres qui ne se croisent jamais, mais dont les destins sont corrélés pour former l'ensemble de la communauté des vivants.
Oui, "Syriana" documente notre conscience en nous confrontant aux conséquences de ce qui semble si justement anodin mais qui est tellement essentiel: le sentiment devenu rare d'appartenir au même monde.
Pour cette unique raison, "Syriana" doit être vu. |