Monologue théâtral d'après l'oeuvre éponyme de Montaigne conçu et interprété par Hervé Briaux dans une mise en scène de Chantal De La Coste.
Après sa superbe prestation dans le monologue "Tertullien" portant le brûlot contempteur sur le divertissement, et plus précisément le théâtre, de Tertullianus, théologien intégriste de l'Antiquité à la vocation de stigmatisateur et à la plume d'inquisiteur, au demeurant peu connu grand public, Hervé Briaux réitère l'exercice monologal d'adaptation théâtrale d'une oeuvre réflexive.
Et ce, avec la même intelligence, au terme d'un grand écart intellectuel et temporel en proposant une partition composée des morceaux choisis de l'oeuvre-phare, et fleuve, d'une personnalité symétrique, celle d'un humaniste éclairé, figure majeure du Siècle des Lumières, avec "Les Essais" de Montaigne.
De ce recueil ressortant aux miscellanées il a retenu un florilège avec des extraits certes relatifs aux thèmes philosophiques classiques mais également sans doute ceux résultant d'un choix subjectif ainsi que certains en résonance évidente avec les peurs et angoisses contemporaines suscitées par la pandémie virale intervenue en 2020 tel notamment celui de la mort, instillé de quelques passages amusants pour ne pas rendre laborieux l'écoute.
Après quatre siècles, l'analyse réflexive de Montaigne, sur la diversité humaine, le sens de la vie, concept philosophico-métaphysique, et le sens à donner à sa vie au niveau de la quête individuelle, entre altérité et nécessité de se réserver une chambre à soi, l'éloge de la vie et de sa finitude indispensable corollaire, et ses pensées politiques, qui devraient inspirer les petits marquis de l'actuel aréopage curial, demeurent d'une profonde sagacité et acuité.
En adresse au public, et dans une grande sobriété tant scénographique, avec les lumières caravagesques de Morgane Rousseau, que de mise en scène assurée par Chantal De La Coste, Hervé Briaux, endosse, au sens figuré à défaut de costume, le pourpoint de Montaigne, dont il livre le profil en son vieil âge dans son antre qu'est sa bibliothèque avec son indéfectible passion pour les livres et tel qu'il résulte de son autoportrait sans fatuité ni aménité.
Et comédien aguerri et émérite avec la maîtrise de l'éloquence sensible qui sied au passeur de textes, il invite le public à un passionnant questionnement introspectif voire une méditation subséquente. |