Réalisé par Rob Jabbaz. Taïwan. Epouvante/Horreur. 1h40 (Sortie 6 juillet 2022). Avec Regina Lei, Berant Zhu, Tzu-Chiang Wang et Ying-Ru Chen.
Evidemment, il ne faut pas conseiller "The Sadness" de Rob Jabbaz aux yeux sensibles. Mais il faut aussi le déconseiller à ceux qui n'ont besoin que de leur dose quotidienne d'hémoglobine cinématographique.
Car "The Sadness", film d'un canadien vivant à Taïwan est avant une histoire d'amour entre deux jeunes vingtenaires pris dans une époque pandémique portée à son maximum d'horreur.
Ici, les gens aiment tuer et leur libido participe au carnage, donnant à Rob Jabbaz l'occasion de montrer tout sa maîtrise dans des scènes d'une grande efficacité.
On pense forcément à "Rage", l'un des premiers films de David Cronenberg. Peut-être l'initiateur du "gore" moderne. Et l'on retrouve aussi dans "The Sadness" tout l'humour Grand-Guignol de "Dernier train pour Busan" du coréen Yeon Sang-ho.
Cette question de "l'humour" dans un film qui aligne les meurtres et les viols sera pour ceux qui sont rétifs au genre "gore" une nouvelle fois la question majeure.
A-t-on le droit de filmer une scène où l'on découvre un bébé vivant dans un sac poubelle en plastique ? Est-on passé de l'autre côté de la morale ? Le cinéma va-t-il trop loin et tous ces "critiques" qui vont parler de "The Sadness" comme ils parleraient d'un film de Dreyer ou de Godard ne sont-ils pas des irresponsables ?
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On leur répondra que Rob Jabbaz tient son histoire jusqu'au bout, parvient à montrer, ne serai-ce qu'une microseconde, toute la détresse de ses gens contaminés. Ce ne sont pas des sadiques heureux de leur sort, mais des victimes contraintes à des actes de violence ou des actes contre-nature et dont l'espérance ultime n'est plus que la mort.
Film désespérant, nihiliste, "The Sadness" porte bien son titre. Ne s'y entrevoit qu'un vain espoir dans un final assez époustouflant dans sa conception minimale. On n'oubliera pas la jeune Regina Lei, toute en fraîcheur devant tant de crimes et d'horreurs. Pas plus que son compagnon, Berant Zhu, guère plus âgé, arpentant Taipeh de fond en comble au volant de son deux-roues, pour la rejoindre.
Ce qui se joue entre eux fait de "The Sadness" de Rob Jabbaz un film paradoxalement romantique.