C’est la rentrée aussi du côté des éditions Playlist Society qui ont la bonne idée de nous proposer un essai consacré à l’un des maîtres du jeu vidéo, un certain Hideo Kojima, connu du monde entier pour la plupart de ses jeux vidéo.
Au début de l’année 2020, la COVID 19 contraint une grande partie des pays du monde à instaurer un confinement de leurs populations. En quelques jours, un nouveau monde a imposé ses règles de vie avec d’un côté des gens cloisonnés chez eux, ayant comme seul lien extérieur internet et de l’autre des livreurs qui arpentent les rues pour assurer l’approvisionnement en produits essentiels.
Le réel rattrapait soudain la fiction d’un jeu vidéo sorti quelques semaines avant, un certain Death Stranding, véritable chef-d’œuvre d’Hideo Kojima dans lequel Sam Porter incarne un livreur équipé d’une tenue particulière qui sillonne une version post-apocalyptique des USA où les survivants vivent dans des bunkers connectés.
Une fois encore, Hideo Kojima anticipait l’avenir, chose qu’il avait déjà fait avec Metal Gear Solid 2 qui présageait les manipulations devenues depuis très courantes sur internet.
Hideo Kojima est un génie du jeu vidéo, peu de personnes peuvent le contester. Il était donc nécessaire de nous proposer un essai sur cette personne, ce qu’a fait Erwan Desbois avec talent. Il nous montre que Hideo Kojima est une figure majeure du jeu vidéo depuis maintenant quarante ans puisqu’il a, dès sa première création (Metal Gear) initié un genre entier, le jeu d’infiltration, qu’il va ensuite réinventer sans cesse dans les épisodes suivants.
On y découvre un réalisateur avec des œuvres alimentées par sa culture filmique et littéraire. Ces œuvres ébranlent le joueur, le poussent à s’investir émotionnellement et mentalement. L’ouvrage nous permet de plonger dans un univers adulte et complexe, aux procédés à la fois spectaculaires et expérimentaux, qui questionnent notre place face au jeu et notre positionnement social, tout en brisant les barrières entre mondes réels et virtuels, cinéma et jeux vidéo, rire et tragédie.
Construit autour de quatre parties, sur les premières expériences de Kojima, sur la saga Metal Gear, sur la place des films dans l’œuvre de Kojima et enfin sur P.T (jeu vidéo annulé et Death Stranding), l’ouvrage nous permet d’apprendre de nombreuses choses sur Kojima.
Kojima est hanté par la menace nucléaire, il est obsédé par la mort et cela se ressent dans ses jeux. On apprend aussi pourquoi Kojima se lance dans "les jeux de non combat" privilégiant l’infiltration pour des raisons techniques alors qu’au départ, cette idée était fortement contestée.
J’ai pris beaucoup de plaisir à lire les pages consacrées à Snatcher et Policenauts, deux jeux de Kojima que je ne connaissais pas. Ils sont essentiels pour voir l’importance du cinéma dans la réalisation de ces jeux.
La partie sur la saga Metal Gear Solid est passionnante, me renvoyant à ma jeunesse quand je jouais sur Playstation 1 et 2. Je me suis même surpris à me commander Metal Gear Solid V : The Phantom Pain après avoir lu l’ouvrage, avec le jeu Ground Zeroes inclus.
L’aventure P.T, si on peut parler d’aventure pour cette bande d’annonce d’un jeu jouable reste une aventure en soi, influencé par le cinéma de Lynch et marqué par l’éviction de Kojima de Konami qui entraînera son annulation. Radié par Konami, l’ouvrage nous montre comment Kojima renaît en indépendant pour produire un triple AAA en étant affranchi de tout intermédiaire. On voit les liens existants entre Death Stranding et des titres comme Metal Gear ou même P.T. Le regard porté sur ce Death Stranding que je n’ai toujours pas fini s’éclaire à la lecture du jeu, me donnant envie de me replonger dedans rapidement. C’est un signe pour moi que l’essai d’Erwan Desbois est totalement réussi, à la hauteur de l’artiste qu’il nous raconte. |