C’est pour moi un grand plaisir de retrouver l’ecriture de Mia Couto, auteur découvert en 2020 avec le superbe Les sables de l’empereur. Originaire du Mozambique, Mia Couto a une très belle plume que l’on retrouve dans son nouvel ouvrage, Le cartographe des absences.
L’auteur nous emmène dans son pays. En 2019, un cyclone a entièrement détruit la ville de Beira sur la côte du Mozambique.
Un poète est invité par l’université de la ville quelques jours avant la catastrophe. Il retrouve son enfance et son adolescence dans ces rues où il a vécu dans les années 70. Il va faire un voyage "vers le centre de son âme" et y trouver son père, un grand poète engagé dans la lutte contre la colonisation portugaise. Il se souvient des voyages sur le lieu de terribles massacres perpétrés par les troupes coloniales.
Il se souvient aussi de Benedito, le petit serviteur, aujourd’hui dirigeant du FRELIMO au pouvoir, de l’inspecteur de la police politique, des amoureux qui se sont suicidés parce que leur différence de couleur de peau était inacceptable, de la puissante Maniara, sorcière et photographe, et surtout de Sandro, son frère caché. Les faits que l’enfant qu’il fut nous raconte sont terribles, le racisme, la bêtise coloniale, la police politique, la PIDE, les traîtrises.
C’est bien un roman que nous propose Mia Couto même si l’histoire repose sur des histoires réelles et s’appuie sur l’histoire coloniale et post-coloniale du Mozambique. L’intrigue s’appuie sur le cyclone qui a frappé la ville de Beira mais repose surtout sur le vécu du narrateur, un certain Diogo.
Autour de ce narrateur gravitent de nombreux personnages qui dévoilent au fil des pages des pans de l’histoire du Mozambique. Cela permet au lecteur de voir cette histoire au travers des yeux de ses différents personnages, d’avoir du coup plusieurs regards différents.
Les chapitres sont courts, superbement ecrits, sur qui donne un rythme agréable à la lecture, servi par la poésie qui se dégage de la plume de Mia Couto. Ce cartographe des absences, on remarquera au passage le superbe titre choisi pour l’ouvrage, est l’occasion de fouiner dans la mémoire du Mozambique, de remettre en avant les oubliés de cette histoire. Cela permet de revenir sur les exactions commises par les Portugais, sur la violence et le racisme présents au Mozambique dans les années 70. C’est donc aussi un formidable travail de mémoire que nous propose l’auteur avec cet ouvrage. |