Deux disques : Média Vita et Galerie des glaces qui permettent d’entendre Karol Beffa le compositeur et Karol Beffa l’improvisateur. Composition, improvisation, deux activités que l’homme considère comme différente. Karol Beffa, c’est la liberté et l’indépendance esthétique, c’est le refus des diktats d’une avant-garde tournant parfois à la parodie, le choix du mélodique et un fort discours harmonique.

Média Vita fait la part belle à la voix avec notamment la soprano Jeanne Gérard : ("De profundis" pour chœur mixte et alto, "Deux Poèmes de Guillaume Apollinaire" pour voix et piano, "Média Vita" pour chœur mixte, "Fragments of China" pour voix et piano) mais pas que, puisque l’on retrouve des œuvres pour piano ("Solstice", "Sérénade d’hiver", "Les Cités de l’oubli", "Nel mezzo del cammin", "Rocking-Chair", "Self-Portrait").

De la beauté magnétique et envoûtante du "De profundis" et son alto (Arnaud Thorette) comme surplombant le chœur, avec "Solstice" reprenant ce même matériau thématique, à "Média Vita" s’inspirant de l'antienne grégorienne Media vita in morte sumus avec comme un écho "Nel mezzo del cammin", en passant par l’impressionniste "Deux Poèmes de Guillaume Apollinaire", "Fragments of China" comme une évocation d’un cycle sur l’amour (de ses débuts à sa fin) sur des poèmes de Li Qingzhao, poétesse chinoise du XIIe siècle, dans leur traduction anglaise, la calme "Sérénade d’hiver", le troublant "Les Cités de l’oubli" ou "Self-Portrait" reposant sur les lettres de son nom de famille transcrites musicalement selon l’analogie lettres-notes en vigueur en Allemagne : B.E.F.F.A. (si bémol - mi - fa - fa - la), c’est avec délectation que l’on se plonge dans l’univers du compositeur.

Galerie des glaces est son quatrième disque consacré à ses improvisations. Un genre qu’il affectionne particulièrement, ce qui lui permet de promener l’auditeur dans des textures, des harmonies, des couleurs.

Le chemin est sinueux, Beffa avec un grand sens des lignes directrices (et quelque part de l’affect également) nous balade avec des touches d’expressionisme, de romantisme, de jazz, de réminiscences espagnoles, jouant avec les plans harmoniques, les rythmes, le tout avec une réelle modernité.

Deux disques, deux versants d’une œuvre musicale en pleine construction et toujours aussi marquante.