Encore une belle pioche pour les éditions de l’Olivier avec ce premier roman de E.J Levy, une enseignante dont le premier ouvrage, un recueil de nouvelle publié chez Rivages avait été récompensé par de nombreux prix en Amérique.
Ce premier roman, Le médecin de Cap Town, nous raconte la vie d’une jeune femme devenue un homme au 19ème siècle. L’ouvrage est inspirée d’une histoire vraie, celle du docteur James Miranda Barry sous un angle inédit. Certains considèrent ce personnage réel comme le premier transsexuel de l’histoire. E.J Levy défend un autre point de vue. Selon elle, Jonathan et Margaret cohabitent dans la même peau, l’un suivant la carrière ascendante d’un homme, l’autre s’autorisant dans l’intimité la plus secrète à être une femme amoureuse.
Chez E.J Levy, James Barry devient Margaret, une jeune irlandaise née à Cork dans une famille et une époque, le 19ème siècle, incapables de lui un promettre un destin à sa hauteur. Son mentor, un professeur de sciences, la pousse à se grimer en garçon afin de suivre les études de médecine qui la passionnent. Elle bande ses seins, achète des vêtements masculins, change l’intonation de sa voix et devient Jonathan Mirandus Perry. Mais derrière la réussite éclatante, Margaret apprend à se cacher sans cesse. Afin d’être pleinement ce qu’elle veut, elle doit mener une double vie ou plutôt une vie multiple.
Je ne connaissais pas l’existence de cette histoire de ce chirurgien militaire qui vécut au début du 20ème siècle et le fait de la découvrir sous cette forme romanesque est plutôt plaisant. Officiant au Cap, en Afrique du Sud, on voit ce personnage principal passait de l’homme à la femme sans que l’auteure cherche à en faire une icône transsexuelle ou une militante. Elle est une femme pour ce qui est des sentiments, de la sensibilité mais un homme pour ce qui est de sa profession, de son métier de médecin qui à l’époque n’était ouvert qu’aux hommes.
C’est son rêve de devenir médecin qui transforme donc son corps, le "elle" qui devient un "il", ce secret qu’elle doit surtout conserver pour ne pas risquer de rencontrer des problèmes. Elle doit tout le temps être méfiante, faire en sorte de ne pas être découverte car elle risque la prison. Elle bouge beaucoup pour exercer la médecine, pour ne pas se faire démasquer.
Elle conservera son secret jusqu’à sa mort, c’est là que la vérité éclatera, montrant qu’au final l’important n’est pas qu’elle fut femme ou homme mais la vie qu’elle mena, son courage, ses actes, ses prises de position et son métier de médecin.
C’est au final un très bon livre qui brasse de nombreux thèmes, l’identité, l’amour, l’amitié, le deuil, le mensonge autour de cette femme incroyable qui a dû emprunter des routes sinueuses au milieu de ce monde ou le masculin l’emporte trop souvent. C’est une très belle découverte, que cela soit l’auteure ou le personnage qu’elle raconte. |