Alexandros Avranas
(Wild Bunch Distribution) janvier 2025
Réalisé par Alexandros Avranas. Drame. 1h39. Sortie le 1er janvier 2025. Avec Chulpan Khamatova, Grigory Dobrygin, Naomi Lamp, Miroslava Pashutina.
Pour son cinquième long-métrage, Quiet Life, le cinéaste grec Alexandros Avranas fait escale en Suède pour étudier un "curieux" phénomène qui touche les enfants des candidats réfugiés à la citoyenneté suédoise et qu'on appelle "Syndrome de résignation".
Pour l'expliquer, il prend en exemple une famille d'immigrés venant sans doute de Russie ou d'Ukraine. Ils sont quatre, Natalia et Sergei, les parents et Alina et Katia, les deux filles.
Dès ses premiers plans, le film d'Alexandros Avranas se déroule dans une ambiance étrange. C'est sûr, le silence règne en maître dans la petite famille choisie par le cinéaste. En analysant ce qu'il montre, il est encore impossible de savoir s'il décrit le monde actuel ou un monde se situant dans un futur proche de quelques années. Va-t-il basculer dans une critique sociale et sociétale comparable à celle décrite avec méchanceté et cynisme par le réalisateur suédois Ruben Ostlund, doublement palmé à Cannes ?
La scène-clé va avoir lieu assez rapidement : celle de la commission qui a le destin de la petite famille en main. Et, contrairement à ce qu'on aurait cru, en voyant ces "bons" immigrés avec des parents à l'aise en anglais et des fillettes slaves aussi blondes que des Scandinaves et maniant déjà bien la langue de Zlatan Ibrahimovic, ils sont recalés. Ils n'ont pas le profil de réfugiés attendus par la Suède post-social démocratie. La conséquence immédiate confronte enfin le spectateur avec le "syndrome de résignation" : une des fillettes, apprenant la nouvelle, tombe dans un coma profond.
Feint-elle pour annuler ou reporter la décision la chassant elle et sa famille du "paradis" suédois ? En tout cas, l'administration locale leur accorde un délai de grâce, au moins tant que la fillette ne revient pas à elle. La description d'un univers technocratique proto-fasciste se poursuit mais quelque chose paraît perturber la machine.
Car, c'est au tour de la seconde fillette de sombrer dans le coma et de prouver ainsi qu'il n'y a pas un "truc". Alina et Katia subissent comme des centaines d'enfants d'immigrés en attente de régulation un mal inédit. Sans doute, comme les enfants sont scolarisés, font du sport, ont des copains et des copines suédois, pendant que leurs parents, qui ne travaillent pas encore ou ont des petits boulots genre nettoiement, sont encore hors la société, le refus de leur accorder la nationalité les affectent davantage. Elles vivent un stress insupportable à six ou dix ans.
Alexandros Avranas réussit à maintenir jusqu'au bout le "suspense" sur l'avenir scandinave de la famille. Tout sera clair dans le chlore d'une piscine avec des sourires qui n'impliquent pas forcément un vrai happy end.
Quiet life décrit comment une société avancée comme l'était la Suède a perdu son âme en préférant contrôler drastiquement les immigrés plutôt que de les accueillir avec humanité et de les intégrer.
Après L'histoire de Souleymane, voilà un nouveau film sur une thématique qui risque d'occuper de plus en plus d'écrans dans les prochaines années.
Philippe Person
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