A la question "L'inutile est-il nécessaire", certains seraient tentés de répondre "Oui pas du tout". C'est en ces termes qu'on aborde After in Paris et son Johnny Lounge, album de reprises forcément lounge de notre Johnny national. Un bordel foutraque surfant sur la vague des covers pour bobos en manque de Nouvelle vague, le dernier album de reprises ayant réellement marqué les esprits.
Que dire que penser que faire, face à cette idée incongrue ? A savoir reprendre le pire du catalogue au songbook plus long que celui d'Elvis dans des versions samba et latino, dans la langue ibérique. Dieu nous pardonne le cœur faiblit d'avance, le CD pas encore inséré dans le lecteur, l'auditeur a peur.
Peur d'aimer, de trouver une once d'humanité dans ces chansons travesties par After in Paris - déjà en soi tout un programme -, peur sûrement de foncer réécouter les originaux comme d'autres s'en iraient se laver les mains, peur de Johnny en fait, et de ses monolithes laissés à la portée du premier venu.
Le propos est dur, certes. Johnny Lounge s'avère être du second degré, une alternative ambient aux chansons taillées dans le blues de Smet. Comment parler de Johnny lounge autrement que par la diatribe, à l'écoute de la voix latino trafiquée sur Cubase, Protools ou Soundforge, calée sur la piste enregistrée comme un œuf dans la poêle. Ca colle ça accroche cela sent le réchauffé.
Comme sur "El Penal", les portes du pénitencier pour les novices, reprise ici à la sauce Nouvelle Vague, rythme cosy et batterie synthétique, voix filtrée à mort. Comme si les compils Hotel Coste faisaient le trottoir. Et pour pas cher en plus. Quinze euros la passe pour une heure de pénétration tiède. Tiède comme un "Black est noir" reprise version techno 90' par 2 Unlimited (auteur d'une magnifique chanson affreuse : "No limit" pour les moins jeunes).
No limit, le mot est lâché, il semble que Jean-Michel Vallet (piano, programmations) et Patrick Chartol (basse, contrebasse, claviers, percussions) ne trouvent aucune barrière devant laquelle s'arrêter, aucune falaise infranchissable pour comprendre que ce projet frôle la tête de gondole Auchan pour mère de famille à la recherche du temps perdu, en quête de l'icône Johnny remise au goût du jour avec une production datée de vingt ans.
Le plus touchant de cet album restant la volonté de réaliser un one shot commercial sur la base du succès obtenue par Nouvelle Vague voila 3 ans avec ses reprises bossas de titres phares et mythiques des 80' . Qui est le torchon qui est la serviette ?
Johnny Lounge. A écouter d'urgence si vous êtes dépressif actif en voie de disparition, fan de métal hardcore mais néanmoins sensible , fonctionnaire d'une sombre banlieue de province perdue entre le désert et le village, simplement fan absolu de Johnny ou pur pervers sexuel.
On préférera le doux son du silence au son des claviers placés en couches pseudo-lounge de cet album à ranger entre le Metal machine music de Lou Reed et le meilleur des sonates de Bach en finger picking. |