Pour la deuxième jour de la Route du Rock, le programme des têtes d'affiche est à la fois explosif avec TV on the radio, intimiste avec Cat Power, popeux avec Belle and Sebastian pour finir avec les boules à facettes de la dance-pop de Radio 4.
Toujours allumé !
Groupe très attendu en ce samedi soir, les TV On The Radio arrivent en vainqueurs sur la grande scène.
Le quintet américain, fort d’un nouvel album Return to cookie moutain auréolé par la critique, vient prouver au public français que leur réputation scénique n’est pas usurpée.
Vocalement habité, musicalement maîtrisé, la musique des TV On The Radio brasse large. Un habile métissage des genres, puisant ça à là dans les différents courants tel que le rock, le gospel, la pop ou le blues.
Si scéniquement le show est parfaitement maîtrisé (grâce au charismatique chanteur Tunde Adebimpe notamment), le début du set est un peu lent.
Le côté rock et rentre-dedans du groupe est quelque peu laissé de côté, au profit des morceaux les plus expérimentaux du groupe. La démonstration passée, on se laisse gagner par le groove inimitable des américains, et leur mimétisme quasi chamanique.
Les titres défilent et une chose saute aux yeux et aux oreilles : les TV On The Radio font partie de ces groupes originaux, qui innovent sans jamais se laisser aller à un vulgaire copier-coller de leurs influences.
Une démarche honnête et purement créatrice, qui fait d’eux l’un des groupes du moment, et qui justifie leur position de tête d’affiche sur un festival comme La Route Du Rock.
Malgré un show décalé et prenant, on reste sur notre faim. La faute peut être à une prestation d’à peine une heure, laissant un goût amer dans la bouche.
Cat Power : Destination unknown...
Ce soir à 23h30 se
produira Cat Power
avec son orchestre Memphis rythm
band. Pari osé de la
part de l’organisation
quand on connaît les
frasques de la
demoiselle sur scène. "Ingérable" disent certains, "poignante" disent d’autres.
Quoi qu’il en soit un concert de Cat Power est toujours une
performance. Un spectacle de tous les instants pendant lequel
elle se livre sans retenue parfois au péril de ses chansons qui
se retrouvent inachevées bien souvent. Reste à voir si le
concert passera la barrière du festival et sera tout aussi
touchant que dans des salles plus intimistes… Donc un concert à ne
pas rater pendant lequel tout peut se passer.
Et ce fût un pur moment de rauque & roll avec Cat Power qui entre en scène comme un tigre dans l’arène.
Combat gagné d’avance pour la diva transformée en papillon.
Avec en préambule l’entrée en scène du Memphis Rythm Band pour deux instrumentales dans le plus pur style bluesy de la Nouvelle Orléans, l’esprit de Dr John jamais très loin.
Possédée la Chan Marshall, qui déboule dans le jeu de quille, impose sa voix tonitruante comme une Fiona Apple sous amphétamines.
Et balance l’essentiel de The Greatest avec la violence fragile qui la caractérise. "The greatest", chanson éponyme, ouvre le bal, puis "Living proof" et "Lived in bars" s’embrayent comme autant de joies collectives.
Des silences radieux dans la foule, procurés par une Chan touchante de sincérité. Simplicité.
Et puis le triomphe sur la reprise slow tempo de "Hit the road Jack" du grand Ray. Cat Power éclabousse et sublime.
Cat Power est un sirop de soul à tartiner sur le public. Chan est animale, Marshall est magnifique.
La belle et la bête, tout simplement.
Pop is not dead
Pour cette édition de la Route du Rock placé sous la bannière Pop is not dead, Belle and Sebastian prouve effectivement qu’il bouge encore …
Les popeux écossais ont perdus depuis quelques temps Isobel Campbell (qui jouera ce dimanche au Palais du Grand Large) mais ont toujours gardé leur secret pour des mélodies fraîches et sucrées propre à faire remuer le festivalier.
Ce soir c’est surtout Stuart Murdoch qui remue en tout sens dans son petit polo gentiment rétro, ainsi que son compagnon de chant Stevie Jackson encostumé façon comptable de la city.
Comme dirait l’autre "Ah pour rigoler, ça rigole !" … et effectivement le groupe s’éclate visiblement sur scène et enchaîne leurs sucreries comme on s’enfile un paquet de Bassett’s.
Résultats, le public tape des mains et gigote en cadence !
La sauce prend vite et Stuart dans un excès de confiance manque même de se vautrer en sautant de la scène sur la partie de la fosse réservée au caméraman (promenade qui au demeurant lui parait fort agréable puisqu’il renouvellera à plusieurs reprises l’opération).
Alors que Jackson s’agite, Murdoch Showman mime un robot en train de danser.
Toujours à la limite du trop, parfois même au-delà, les Belle and Sebastian ont néanmoins pris pas mal d’ampleur sur scène et si Stuart ne chante toujours pas juste, il en joue maintenant davantage et ses déambulations scéniques ajoutent à l’euphorie générale que procure la musique du groupe.
La pop souriante de Belle and Sebastian a, quoi qu’il en soit, offert un joli moment de fraicheur et de détente aux festivaliers.
Radio 4 et boules à facettes
Ils le jouent quand ?. La grande question, avant même le début du concert de Radio 4, était de savoir à quel moment "Dance to the underground" serait entamé par les new-yorkais. Dur de bénéficier d’un hit post-punk trivial…
Et pourtant la sauce prend plus vite que prévu avec quelques pépites urgentes tirées du deuxième album, comme ce "Ennemies like this" efficace en ouverture, plus loin un "Grass is greener" sur lequel Franz Ferdinand n’aurait pas vomi, ce "As far as the eye can see" (et sa très grande ressemblance avec "Dance to the underground") dans la veine d’un excellent LCD Soundystem.
Mélange de beats et d’infra-basses, les compositions d’Anthony Roman donnent de la consistance à un groupe qu’on croyait éphémère.
Tribal et rythmé, Radio 4 clôture de bien belle façon cette deuxième journée en servant un melting pot Coldplay/Clash (Si si c’est possible… ) sur "Packing this up".
Presque qu’on entendrait danser les graviers si la musique était muette….
Entretemps les festivaliers auront découvert deux nouveaux groupes qui font bien parler d'eux : les girls de Brighton The Pipettes et le dernier-né de la fameuse scène canadienne You say part ! We say die !.
We are the Pipettes !
Avec leur look de collégiennes sorties de Happy Days et leur musique à la croisées
des chemins entre la pop sirupeuse des années 80 (quelque part entre Abba et Sheila
diront certains) et la production luxuriante des années 60 (pas très loin d'un Phil
Spector inspiré), les Pipettes ont de quoi charmer.
Et nombre de magazines spécialisés, ou non, ne s'y sont pas trompé et font ces
dernières semaines leur choux gras de cette nouvelle sensation fraîchement
débarquée sur nos platines.
Quoi qu'il en soit, sur la foi d'au moins un titre "Pull shapes" de leur album We are
the Pipettes, le concert des Pipettes semble assez prometteur.
Imaginez 3 nanas
rigolotes en train de chanter "What do you do when the music stop …Clap your
hands if you want some more" à 10 000 festivaliers assoiffés de rock' n roll !
Mais au delà de l'esprit un peu kermesse de la chose, ce sera sans doute une vrai
belle surprise que ce concert si la bonne humeur du disque est aussi présente et
communicative en live !
En confrontant le mythe à la réalité, le live des Pipettes a surpris le peu de détracteurs qui restaient encore dans le Fort, et même plus, avec leur accent Brit’ & Soul.
Les chansons des Pipettes ("We are the Pipettes", "Tell me what you want"), c’est un peu la cour de récréation avec la jupe à petits pois, des histoires de garçons méchants, très très méchants ("Dirty Mind") et la revanche des filles sur le genre masculin.
Belles, radieuses, illuminées, les Pipettes ont ce soir confirmé leur sexe à pile, et la candeur de leurs pop-songs dopées à l’hélium ("Because it's not love") et courtes comme leurs jupes. Au delà du marketing, les Pipettes restent donc bien plus qu’un instrument de laboratoire.
Peut-être même que Phil Spector en perdrait ses cheveux s’il avait encore.
YSP ! WSD ! : attention OMNI !
Le Canada est décidément un grand chaudron musical dont émane des groupes aux noms à tiroirs
et à l'inventivité dévastatrice.
Il y avait Godspeed You Black Emperor, The Silver Mount Zion Memorial Orchestra et le Tra La La
Band, voici le quintet de You say party ! We say die ! qui débarque à Saint Malo avec sa dancepunk
précédé d'une sacrée réputation.
Ce nouvel OMNI fera-t-il sensation en terre bretonne?
Les canadiens ne sont décidément pas des gens comme tout le monde.
Premier groupe au Fort samedi soir, les You Say Party ! We Say Die ! sont attendus par un bon nombre de festivaliers.
Révélation du dernier festival South By Southwest à Austin, les canadiens sont en train de déclencher un mini buzz dans les frontières et aux Etats-Unis.
Après Arcade Fire et Clap Your Hands Say Yeah, le monde tient peut-être sa nouvelle sensation canadienne. Bref, les You Say Party ont une légère pression sur les épaules ce soir.
A première vue, on sent le groupe qui à soigneusement travaillé son line up. Deux femmes dans les rangs, et à des postes stratégiques. Une claviériste, et une chanteuse tout de rouge vêtue, sorte de mix entre Courtney Love et Peaches, la provoc en moins. Passons outre le look.
Musicalement, YSPWSD (c’est plus court) livrent un joyeux bordel sonore, quelque part entre un post punk sauvage et du rock débridé. Si le début du set se prend un peu les pieds dans le tapis, le groupe redresse peu à peu la barre, avec des morceaux bien construits et originaux.
Pas toujours évident d’être le premier groupe de la soirée, mais le groupe remplit parfaitement cette tâche ingrate, laissant la fosse conquise et rugissante de plaisir.
Un groupe à suivre, malgré une prestation en dent de scie.
Le crooner, l’irréductible, le gominé prend le Large .
Pour les amateurs éclairés, le rendez-vous à ne pas manquer avait lieu au Palais du Grand Large.
Ambiance intimiste en perspective donc pour le leader des Tindersticks que
certains parmi les plus fidèles d’entre vous se souviennent probablement d’avoir vu
ici même au Fort de Saint Père en 1999.
En vacance de son groupe, Stuart Staples continue d’explorer ses failles à coup de
short-stories qui tapent dans le mille, droit au coeur.
Leaving songs, son nouvel album sorti au printemps de cette année, et passé
injustement inaperçu, sera à l’honneur en cette fin d’après midi avec une nouvelle
formation mais toujours dans un univers de crooner ténébreux dont la pièce
centrale est la voix de Staples superbement soutenue par les mélodies dont il a le
secret et si familières aux fans des Tindersticks.
Tant attendu que la salle en vomit d’être remplie jusqu’à la gueule pour le fêter .
Ses chansons, Stuart A. Staples ne les quitte pas, il les borde et les met au lit de son timbre de voix si particulier.
Tout y passe rien de résiste, ca "trémolote" très haut et Stuart confirme son rôle de lord anglais.
Au délà des modes, au dessus du lot, l’Anglais semble être ici au zénith de sa créativité, un degré au dessus de son premier opus, et sa voix d’outre tombe.
La brune et l'ex lapin.
Et puis, pour les fans de plage et bronzette, la Plage recevait une belle brune.Les brunes comptent pas pour des prunes chantait Lio en 1986…elle ne croyait pas si bien dire la banana girl. 20 ans après, c’est sa sœur qui trône fièrement sur la scène de La Plage, confirmant brillamment ce vieil adage de la chanson populaire.
A peine sortie de la mer (tout juste a-t-elle pris le temps d’enfiler un pantalon par dessus son maillot de bain) et flanquée du guitariste Federico Pellegrini des feux Little Rabbits (de même que Laurent Allinger à la guitare pour l’occasion), Héléna Noguerra se donne en spectacle devant un public charmé.
Des remparts encerclant Saint Malo jusqu’au bout de la plage, les festivaliers et les touristes dévorent des yeux cette belle plante, sensuelle au possible, qui se dandine au rythme des accords pop folk, flirtant par moment même avec la country.
Ceux qui ne donnaient pas cher de la peau de l’ancien mannequin, sont bien obligés de reconnaître à la demoiselle un bien beau filet de voix, s’accordant parfaitement avec celui plus rauque de ses deux acolytes.
Enregistré à Tucson en Arizona, sous la houlette de Jim Waters, les morceaux de Dillinger Girl & Baby "Face" Nelson sont chargés de cette ambiance désertique du grand ouest américain.
En anglais ou en français, légères ou plus rythmées, les compositions du duo font mouche. Rajoutez à cela le soleil qui a enfin daigné pointer le bout de ses rayons, et vous obtiendrez un très bon moment de ce festival.
Jour de chance
Enfin, la défection de Micah P. Hinson donne sa chance à My name is nobody, soit de la folk-song également un brin torturée, belle comme la jeunesse du duo français pour un beau moment en catimini sur fond d’arpèges sensibles.
Vincent Dupas, guitariste auteur, s’excuserait presque d’être ici pour délivrer ses contines intimes : "En fait j’ai été prévenu de ce matin de mon passage cette après-midi confie-t-il à l’assemblée lâche-t-il, avant d’embrayer sur deux pépites solitaires ("Last night", "I dreamt three times" et "Take the 7.00 AM train").
Accompagné de sa pianiste Faustine, My Name Is Nobody cajole le
Palais de sa magnifique voix, et de ses arpèges sensibles et célestes.
Il bafouille le nom de ses chansons, et se confond en
remerciements. Le public, semble autant touché par la grâce de la
musique que par la timidité du jeune homme.
Un très joli moment, qui aura fait oublier au public l’absence du
ténébreux texan. |