Darkel est l’album solo de JB Dunckel, lui-même plus connu comme étant la moitié de Ai, lui-même plus connu comme étant l’auteur de "Sexy boy", etc…..
L’un des problèmes d’Air, c’est la théorie des masques. Qu’ils soient à gaz ou vénitiens, ce sont ces masques qui entravent le succès qu’Air mériterait dans l’hexagone. Encensé dans le monde entier, insensé en France, méprisé sans doute une fois passé les portes de Paris…Phoenix, Tellier, Tahiti 80 ou Rob (Et son génialement méconnu "Don’t kill") empruntent le même sentier.
Le problème est connu, la messe est dite. De quoi vous ruiner une carrière, l’identité, toujours le besoin de connaître et reconnaître….
Alors pourquoi parler d’Air si Darkel est le side project de JB Dunckel…Car en étant différent, Darkel rejoint c’est évident l’essence même des compositions du groupe. Batteries éthérées, voix filtrées, nappes de claviers vintage. Tout est là, avec Dunckel au chant. N’oublions pas que Sexy Boy, comme d’autres compositions d’Air, c’est avant tout lui au micro, trafiqué, trituré, malaxé ; le tout composant le meilleur ce qu’il reste de cette fameuse French Touch marketée…
Qu’en est-t-il de Darkel ? Album surprenant et inégal. Ses montagnes et ses plaines, ses récifs et ses coraux. "Be my friend", chanson d’ouverture, laisse d’emblée entrevoir un monde imaginaire riche en couleurs, rose bonbon, comme un Bacharach passé au filtre de la modernité, toute en clavier. Une vraie réussite de single qui entête, comme une échappée solitaire en terrain inconnu pour un Dunckel bien plus pop qu’à l’accoutumée.
Car si Darkel l’album séduit l’auditeur, c’est avant tout grâce à la réhabilitation de la Pop, sens noble du terme. L’impression que succès et musique de masse pourrait cohabiter sans prostitution des mélodies sur le trottoir. Et le naïf "At the end of the sky", insouciant et léger, paroles qu’on devine débile, n’est qu’un subterfuge pour lâcher les chiens sur les névroses de Dunckel.
Pop électronique. Darkel s’éloigne des obsessions d’Air (Gainsbourg et Polnareff, pour résumer grossièrement) et lorgnerait presque du coté de Robots and Disguise, sans loucher.
Un peu de guitares fuzz et foutraques sur "TV destroy", qui s’élève comme un ballon sous hydrogène dans une fête foraine, puis un bref message écologique sur "Earth" ("We belong to the earth/ Doesn’t belong to us") avec sa ligne de basse mixée bien en avant, disco-queen, chœurs angéliques...
Clairement, Darkel fait le non choix des guitares, il n’y en a pas, ou peu, des discrètes peut-être. C’est l’ère des claviers qui s’installe, posés par couches comme un mille feuilles à 88 touches. Il faut néanmoins "Bathroom spirit" attendre avec sa chute de clavier très inspirée de "Riders on the storm" des Doors pour retrouver l’éclaircie.
La mièvrerie sonore étant un peu lassante sur la longueur, Darkel parvient malgré tout à insérer une atmosphère festive et dansante là où Air impose son électronique cinématique. Et cette chanson de cloture, "Bathroom spirit", convaincra sans doute l’auditeur que Dunckel n’est peut etre jamais aussi bon que dans l’instrumentale très Boards of Canada.
Une alternative aux paroles et aux mots. Un voyage personnel sans repères. Un moment de solitude partagée. |