Happy here, happy it is….La pop nordique se porte bien, il a enlevé ses mitaines, pissé sur ses bas, troqué sa culotte contre un riff.
Et ce n’est pas la surf music baltringue de Gravy qui chantera le contraire, car Gravy, album éponyme, surprend par ses influences et son sens du contrepoint. Son danois de leader, Nikolaj Grummesgaard, offre avec ce premier album un condense de décontenancement musical, plus proche de la pop noisy bricolo Weezer que du rock garage auquel on l’étiquette à tort.
Gravy le groupe sors donc Gravy l’album, mélange subtil de pop 60’ toute sucrée dedans ("Remember me" et ses guitares en barbapapa Beatles), enregistrée dans le garage au papa qui vend sûrement des meubles Ikéa. Gravy semble loin des clichés, s’en fout du moins, produit 11 galettes sans sel ne durant pas plus de trois minutes chacune et pas moins de deux ou trois singles potentiels dans un monde merveilleux où les radios diffuseraient la qualité et les auditeurs achèteraient les albums. Autant commencer ici et maintenant, le rêve et l’illusion.
Sans se taper le membre par terre, on décèle ça et là des moments de musique unique, sorte de crossover entre les 60’ des Trashmen et Duane Eddy (pour la surf music indépassable) et les 70’ psyché ("Amon Duul" et "Hapshash and the coloured heat" pour le refus des structures classiques), voire même un relent de 90’ arty/dirty sur le très My Bloody Valentine "Do I feel free".
Les yeux clos, l’auditeur pourra même voir Fonzie de Happy days débarquer dans le bar, sur le très teenager "Can’t you see", frôlant même le gimmick innocent du générique de Friends. Si Gravy flirte souvent avec le limite, leur écoute prolongée de Pet Sounds et Smile les sauve souvent des catastrophes, et l’on peut retrouver les harmonies Bouglione (xylophones, piano, batteries syncopées, orgues) si chères à Wilson Brian.
Et puis, au détour d’une rue guimauvée, on tombe sur le tube évident, piste 4, "Shine on us", mélange de trop de choses pour qu’on les résume, avec la batterie martiale et les guitares en fuzz, l’orgue qui vibre dans le fond, peut être un clavecin, et ces voix doublées qui rappellent Arcad fire…. Clairement une autre époque.
Le pathos et le spleen semblent être des jurons au pays des danois, jamais, jamais glauques, portés par l’espoir du Nord comme seule lumière, ils tirent leur pop vers des cimes agréables et gratuites (l’intriguant "Party in the mens room", uh uh…). On marche, on avance en terres inconnues et l’on tombe sur un autre single, "Behind my wills", avec un énorme riff en mise en bouche, très lads dans l’esprit, proche de l’Angleterre en lui léchant les côtes, mais revenant vite à sa base pop, avec l’éternel refrain de la voix qui suit la partie mélodique de la guitare.
S’en suit un coup de bambou pop, oui, Gravy sort un premier album d’excellente facture, pondu dans l’artisanat, comme les premiers Beatles justement, où la voix et les harmonies faisaient tout par ses petits riens. Ces petits riens, c’est déjà tout. Achetez Gravy.
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