Enfermée dans une boite à la pochette intrigante représentant dans un noir et blanc sale et trouble Lisa Germano lévitant assoupie, on trouve un peu comme par miracle un bien joli disque insolite répondant au nom évocateur de Lullaby for liquid pig.
Si ce n'est bien sûr pas un disque lofi, le disque a pourtant été enregistré avec une économie de moyens visible (à quoi bon aller dans un studio quand on peut squatter chez ses amis!), l'habilllage sonore en ressort au final extrêmement léger mais pas minimaliste pour autant, offrant ainsi un écrin satisfaisant à la voix de la Lisa.
En effet dans ce genre d'entreprise musicale, le risque qui pend souvent au nez de ses voix un peu surnaturelles, c'est la tentation de vouloir les étoffer derrière un habillage atmosphérique expressif, lourd et épais, autrement dit souvent laid ou redondant. Et donc là non, ouf!
Malgré la multiplication des collaborations - dont Butch de Els qui agite quelques clochettes pour remercier Lisa d'avoir participé à l'album des anguilles, ou même le guitariste mythique Johnny Marr en personne, parce qu'elle le vaut bien - le rendu de l'album est assez homogène et cohérent. Ne vous attendez pas ainsi à être chahuté dans des directions osées aux affects démonstratifs : le disque commence comme il finit, sur la pointe des pieds et effronté. Un album court, c'est à dire compact, autrement dit cohérent (36 minutes en fait), comme une pose confuse avec l'excuse d'avoir tout dit en si peu de temps et de ne pas s'être égaré en chemin. Des titres courts donc, qui ne partent pas dans des vrilles infinissables proto-progressives mais vont droit au but, simplement avec justesse.
Quelques perles valent le détour comme notamment "From a shell" ou "Paper doll" à la fois simples et sophistiqués rappelant assez une PJ Harvey version "Is this desire?" qui aurait pris trois prozacs, ou encore des titres plus légers et ludiques (presque pop) comme "Candy" ou "It's party time" qui permettent de contraster avec l'ambiance générale du disque. La plupart des titres se consacrent en effet à l'élaboration minitieuse de cocons désenchantés, oscillant entre spleen et foi, entre l'intime inexpectoriable et l'universel vain (au moins). Des morceaux attachants et personnels, loin des incarnations de la miss avec op8 et compagnie, et qui fonctionnent.
En peu de mots, un album agréable, osé et limpide (et puis encore avec une très jolie pochette qui est parfaitement dans le ton du son).