A l'affiche du Petit Gymnase, Christel Willemez propose avec "Entre ciel et chair", qui retrace la vie d'Héloïse et son amour pour Abélard, une prestation tout à fait remarquable tant esthétique qu'émotionnelle.
Nous l'avons rencontré en coup de vent entre deux rendez-vous qui seront peut être déterminants pour l'avenir de ce spectacle.
Vous avez une formation à la fois complète et éclectique : comédie, danse, travail sur le corps… Comment tout cela se coordonne-t-il et dans quelle finalité ?
Christel Willemez : Tout est lié à mes besoins personnels, écouter ma sensibilité et mes envies. J'ai suivi des enseignements ou fait des activités qui n'avaient pas obligatoirement vocation à être utilisées mon métier. Au départ, le travail d'acteur s'est inscrit dans le cadre de l'amélioration de la présence sur scène en tant que chanteuse.
Vous avez donc commencé par le chant ?
Christel Willemez : Au départ je travaillais dans une entreprise après des études dans une école de commerce. Mon premier salaire a été utilisé pour des cours d'équitation et des cours de chant. Trois ans après j'ai démissionné pour me consacrer au chant et je suis venue à Paris. Le travail d'acteur me permettait d'être plus dans l'authenticité et pas dans le beau. Cela m'a plus parlé. Le travail du corps faisait partie d'un besoin personnel de s'occuper de soi.
Ensuite, une dynamique s'est créée autour de la comédie avec le théâtre et les tournages. En 1995, mon premier tournage était "Dans les nuages" de Wim Wenders dans une petite scène qui a été coupée dans le montage pour le film destiné à la diffusion en salles et mes premiers pas sur les planches ont eu lieu en 1996 avec une comédie de Jean Luc Lemoine "Les grillades du souvenir".
Et le chant ?
Christel Willemez : Je voulais vraiment tenter le chant en sachant que rien n'était écrit d'avance. J'ai commencé par le jazz et puis ensuite j'ai essayé un développement professionnel dans la chanson française. Nous avions fait des maquettes et au début Sony et BMG paraissaient intéressés. Puis les choses se sont enlisées notamment du fait que j'étais avec des ténors qui menaient plusieurs projets de front et le mien était tout à fait annexe. J’ai fini par renoncer.
Quelle est la genèse d'"Entre ciel et chair" ?
Christel Willemez : Ce spectacle est né de la rencontre avec un texte qui m'a été mis entre les mains par une amie metteur en scène à Lyon pour un spectacle qu'elle montait. D'extraits je suis passé au livre de Christiane Singer, livre qui m'a profondément percuté. Et ce fût tout. Les choses sont ensuite venues à moi. Je connaissais Chantal Portillo qui s'occupait de la programmation des lectures à la Maroquinerie et qui m'a suggéré de lui faire une proposition de lecture. J'ai sélectionné deux textes dont celui-ci qu'elle a choisi. C'était en janvier 2002. J’ai fait cette lecture accompagnée d'une jeune femme musicienne spécialiste de musique médiévale que j'avais rencontré dans le métro. Il s'agissait d'une première adaptation du texte et le public a été tellement impacté à l'issue de cette lecture que je me suis dit que je ne pouvais en rester là.
Cela étant je ne connaissais pas de metteur en scène et je ne disposais pas de structure pour monter ce spectacle. J'ai alors demandé à Christiane Cohendy de faire la mise en scène. Elle a accepté puis elle a dû se rétracter car elle était engagée dans d'autres projets notamment "Et puis, quand le jour s'est levé, je me suis endormie" de Serge Valetti auThéâtre de la Colline. J'ai ensuite contacté Gaétan Kondzot avec lequel j'avais travaillé à la Bastille dans "Othello" en 2003. J'ai voulu y intégrer le travail du corps, car le corps est très présent dans ce texte, et donc le projet a été monté avec une chorégraphe. Cette collaboration bien que difficile a donné lieu à une présentation en mars 2003. Elle a suscité de l'intérêt mais le problème résidait dans le fiat que je bougeais beaucoup sur scène ce qui nuisait à la compréhension du texte. Le projet est donc resté en jachère.
Nicole Chiche, avec qui j'avais coproduit "Love letters" que j'ai joué à Avignon a joué le rôle de marieuse en parlant de ce projet à une jeune metteur en scène Clara Ballatore. A cette époque j'étais un peu réservée compte tenu des vicissitudes passées mais en réalité cela s'est très bien passé. C'est également Nicole Chiche qui m'a présenté ensuite le contrebassiste Michel Touzeau. Et le spectacle est né après 9 mois de répétition à raison d'un jour par semaine. J'ai également créé une compagnie, la Compagnie Un 1er avril, et le spectacle a été présenté en Avignon en 2004 avec le grand étonnement de voir que le public est venu voir "Entre ciel et chair" parce qu'il se souvenait de "Love letters" que j'avais joué en 1999 et en 2000. Et ce spectacle a été un succès puisque nous avons fait la 2ème meilleure billetterie de la petite salle du Petit Chien derrière Bernadette Laffont. Nous avons bénéficié d'un très bon bouche à oreille. Et nous avons fait quelques dates notamment en Bretagne. Ensuite j'ai fait un bébé et j'ai eu envie de reprendre ce spectacle à Paris.
En quoi le livre de Christiane Singer vous avait fortement marquée ?
Christel Willemez : Le fait que cela parle d'amour. Je pense qu l'amour est très important dans la vie et en est le moteur essentiel. Tout se fait par amour par manque d'amour, pour donner de l'amour, même si cela ne paraît pas évident dans certains cas. Cette thématique m'a toujours intéressée en tant que comédienne. J'ai souvent eu des rôles de grandes amoureuses comme Alexa dans "Love Letters" ou Desdémone dans "Othello", d'amour maternel aussi puisque j'ai joué la mère dans "Petite mélodie et conte pour ma mère" de Marina Tsvétaéva à L’Elysée Théâtre à Lyon en 2000.
Dans "Entre ciel et chair" ce qui me touche profondément c'est la manière dont Héloïse traverse les épreuves. La vie lui apparaît sous le visage de l'extase et aussi sous celui du chaos, du manque et de la détresse, et comment elle a vécu chaque journée en y trouvant du sens. Comment relier les événements dramatiques et ne pas se laisser méduser. Pardonner grandir, trouver un autre espace et non pas se laisser submerger.
Donc première programmation à Paris sur une période assez courte à raison d'une soirée par semaine ?
Christel Willemez : Oui. Il s'agit en fait de la phase de lancement du spectacle car nous sommes en recherche d'un producteur. Dominique Coube a été séduite par ce spectacle en ayant vu une captation et m'a offert la vitrine du Petit Gymnase.
Les projets alors ?
Christel Willemez : Trouve rune production et un lieu qui pourrait être le Petit Gymnase ou un autre lieu.
Donc pour 2007 toute votre énergie sera orientée sur ce projet ?
Christel Willemez : Oui, tout à fait. Je jouerais certainement dans "Don Juan" que j'avais joué au Théâtre du Lierre qui partira en tournée cette année. J'ai bien sûr d'autres projets mais à plus long terme. |