Dans la foulée du centième anniversaire de la naissance de Beckett, et du Festival Paris Beckett de 2006, Marianne Alphant, pour le Centre Pompidou, et Nathalie Léger, pour l'Institut Mémoires de l'édition contemporaine ont élaboré, en collaboration notamment avec l'Ircam, l'Ina, la BNF et la Beckett International Foundation at University of Reading, une exposition chronobiographique sobrement intitulée "Samuel Beckett".
Le but premier est de permettre au public, certes, de découvrir les multiples facettes de l'œuvre de Beckett, mais aussi, de la replacer dans son environnement historique en la confrontant aux œuvres contemporaines dont elle s'est nourrie, comme celle de Bram van Velde, et d'apprécier son incontestable influence sur la création artistique dans tous les domaines et notamment celui des arts plastiques avec des oeuvres de Bruce Nauman, Sol LeWitt, Richard Serra, Sean Scully
Certains artistes ont également été sollicité pour "illustrer" en quelque sorte leur compréhension de l'œuvre de Beckett comme le livre ouvert d'Alain Fleischer proposant au visiteur de s'aventurer dans une double page de "Comment c'est".
La scénographie de l'exposition réalisée par Nathalie Crinière, à l'image de l'œuvre sombre et labyrinthique de Beckett, est composée de huit espaces en zig zags circonvolutionnaires, souvent dans une relative pénombre, qui de "Voix" à "Noir", en passant par "Restes", "Scènes", "Truc", "Œil", "Cube, "Bram", réunissent de nombreux documents exceptionnels dont certains jamais exposés.
Une exposition très dense, à lire, à voir, à écouter qui s'adresse néanmoins à des amateurs éclairés.
Samuel Beckett (1906-1989), écrivain, auteur dramatique, metteur en scène, cinéaste s'est vu décerné le prix Nobel de littétrature pour "son œuvre, qui à travers un renouvellement des formes du roman et du théâtre, prend toute son élévation dans la destitution de l'homme moderne" et est un des auteurs majeurs du 20ème siècle.
On accède à l'exposition par "Voix" un couloir de néons au fond duquel est projetée l'image d'une bouche géante qui parle inexorablement.
Comme les personnages de Beckett, qui sont surtout des voix, qui ne cessent de parler, parler comme moyen et preuve d’exister.
Quand tout est perdu, subsiste la parole, ultime rempart au néant. "Se taire, tarir en soi la source des mots c'est disparaître".
La partie biographique de l’exposition présente de nombreux documents, lettres, manuscrits et photographies inédites ainsi que des archives audiovisuelles et la diffusion d’une série d’entretiens réalisés par Pascale Bouhénic avec notamment des écrivains.
Beckett connaît la notoriété au théâtre avec "En attendant Godot" et une salle est donc consacrée au théâtre avec la diffusion d’extraits de pièces, la présentation de maquettes de décor et des photographies.
Le visiteur découvrira également l'oeuvre filmique de Beckett qui écrivit des scénarios avec deux oeuvres rares dont le fameux "Film" , film muet expérimental tourné en 1964 avec Buster Keaton.
Et "Quad", pièce minimaliste de télévision expérimentale, réalisés par Alain Schneider.
Pour ce dernier la projection au sol de cette sarabande muette et ritualiste destinée à abolir le temps est particulièrement hallucinante te fascinante.
L'exposition s’achève par "Noir", salon beckettien plongé dans la quasi-pénombre où sont projetées des d’oeuvres télévisuelles réalisées par Beckett.
Le visiteur prend le temps de s'asseoir pour les lectures de textes par Michael Lonsdale en regardant les toiles de Robert Ryman et Geneviève Asse
Et l’exposition s’achève sur sous le signe de la vacuité et de l’absence avec une archive sonore inédite : la voix de Beckett lisant "Lessness". |