A l’occasion du 60ème anniversaire de la célébrissime agence photographique Magnum, créée en 1947, par Robert Capa, Henri Cartier-Bresson, George Rodger et David Seymour, Serge Toubiana, directeur général de la Cinémathèque française, et Diane Dufour, directrice des projets spéciaux de Magnum Photos, ont souhaité abordé la thématique de l’influence contaminante du cinéma sur le travail du photographe.
A l'instar de l'exposition "Le mouvement des images" organisée par le Centre Pompidou sur la réflexion "penser l'art à partir du cinéma", ils ont sollicité dix photographes de cette agence, spécialisés dans la photographie documentaire et cinéphiles, sur la définition du cinéma par Cartier-Bresson "L’image d’après", qui donne son titre à l’exposition.
Une exposition qui, dans une scénographie judicieuse et très esthétisante de Giuseppe Caruso, propose donc dix installations singulières et inventives, laissées à la libre imagination des dix photographes sous influence, consacrées à l'image, fixe et animée, et à une vraie démarche réflexive sur leur métier.
La photographie écho
La photographie témoigne d'une vision du monde qui peut faire écho à celle perçue lors du visionnage de films prégnants comme pour Harry Gruyaert qui retrouve dans ses clichés des images qui lui rappelle l'univers des films de Michelangelo Antonioni
Abbas présente, en ligne continue comme une pellicule de film, les photographies extraites de son journal photographique en noir et blanc réalisé lors de la Révolution iranienne entre deux vidéo-projections de grand format de son film fétiche "Paisà" de Roberto Rossellini qui mettent en évidence les similitudes entre la fiction et la réalité.
Des similitudes factuelles ou ou recherchées par l’œil du photographe sous influence ?
Ainsi, le reportage sur les salles de cinéma abandonnées du Texas d’Alec Soth s’inscrit totalement dans la lignée du film "Au fil du temps" de Wim Wenders, sur le road-movie d’un projectionniste, qu’il visionna adolescent grâce au vidéo-club de sa ville natale.
La fusion intime
L'écho peut être complètement intériorisé au niveau du vécu personnel.
Donovan Wylie met en paralèlle ses photographies de la prison de Maze en Irlande du Nord avec le film "Elephant" d'Alan Clarke.
Mark Power, comme le héros du film "L’amateur" de Kieslowski, retourne l'objectif vers lui, à l'occasion du décès de sa mère, à l arecherche de sa propre vérité.
Les photos des lieux de son enfance sont floues comme les films amateurs de son père, projetées dans un bassin rempli d'eau sont brouillés parun egoutte d'eau.
L'hommage au panthéon personnel
Les repérages photographiques sur le New York d’après le 11 septembre de Gilles Peress en vue d’un film en hommage au livre "Repérages" d'Alain Resnais qui lui a fait découvrir photographie.
Antoine D'Agata qui rend hommage à "L’empire des sens" de Nagisa Oshima, avec une projection d'images en mouvement et de photographies réalisées lors du tournage de son journal intime et autobiographique relatant ses nuits au Japon.
Impressionné parle cinéma shanghaïen des années 30, Patrick Zachmann entreprend volontairement des reportages sur les communautés chinoises et constate la réminiscence inconsciente montrée dans un dispositif scénographique de 3 écrans.
La filiation revendiquée
Gueorgui Pinkhassov revendique une influence consciente et volontaire après avoir assisté au tournage de "Stalker" d'Andrei Tarkovski.
Deux murs d'images en échos assumés parce que cette influence s'est révéle de manière patente, perçue comme un message personnel : "En état de choc, j’avais la vive sensation que Tarkovski s'adressait directement à moi, qu’il dévoilait mes
secrets les plus enfouis, dont je n’avais pas même supposé l’existence."
Comme à livre ouvert
Bruce Gilden, qui a acheté son premier appareil après avoir vu "Blow up" d'Antiononi, est fasciné par les gens qui circulent en ville et sur lesquels il pose un regard radical.
Il a imaginé un immense livre ouvert pour supporter quelques uns de ses clichés, d'immenses portraits en noir et blanc, qu'il confronte à des extraits de films noirs américains des années 40-50.
Profitez-en pour voir ou revoir les films qui sont à l'origine de ces travaux ainsi qu'une sélection d'autres films, proposée par la Cinémathèque française, qui en relation directe avec la thématique de l'exposition.
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