On voudrait en savoir un petit peu plus sur votre collaboration avec Ed Harcourt et le chanteur Christophe sur votre album ?
Erik Truffaz : Ed Harcourt, je l’ai rencontré à Paris il y a quelques années pour une soirée en hommage à Chet Baker, j’ai joué avec lui, on a fait une chanson que j’avais fait enregistrer, dont le résultat était incroyable. Quand j’ai eu l’idée de refaire un album avec des voix, je l’ai contacté. Christophe, je l’ai rencontré sur un plateau de télé, il jouait avec Keren Ann, je lui ai demandé un autographe, il m’a dit "Ok, je te le donne mais si tu acceptes de jouer avec moi". Après on a fait plusieurs concerts avec lui, dont un à Saint-Brieuc en Bretagne, et comme il était question de faire cet album avec des voix, je l’ai naturellement contacté.
Ce soir Ed Harcourt sera présent, avez-vous l’habitude de jouer comme cela avec des invités, ou cela reste-t-il exceptionnel pour se soir ?
Erik Truffaz : On a une grande habitude de jouer avec des invités parce que on a très souvent joué avec Nya. J’ai fait un groupe où il y avait un chanteur tunisien.
Et ils vous suivaient régulièrement aux concerts ?
Erik Truffaz : Non, parfois on joue juste à quatre et parfois avec des invités. Là en l’occurrence on aura Nya et Ed Harcourt sur Bourges et demain à Paris salle Pleyel. Ed Harcourt fait l’ensemble de la tournée française.
Vous avez fait un voyage en Russie avant l’album…
Erik Truffaz : Je suis allé trois fois en Russie, on y est allé deux fois avec le groupe, effectivement on est allés dans cette ville qui s’appelle Arkhangelsk.
Quel a été l’influence, l’impact des ces paysages, de ce pays, sur la composition de l’album ?
Erik Truffaz : L’influence par rapport au titre, elle n’a rien à voir avec la musique, on compose la musique, et après, à part si c’est des textes qui ont été composés par des chanteurs, après on cherche le titre et là c’était un rapport graphique.
Marcello Giuliani : Les voyages en tout cas nous nourrissent, cela nous amène pas mal de réflexion après. Pour parler de la Russie et d’ Arkhangelsk ce n’est pas une vie aussi facile qu’on a nous ici, il faisait froid, l’eau chaude était coupée dans toute la ville, c’est une ancienne base de sous-marins atomiques, on a vu des dépotoirs d’armes atomiques, il y a beaucoup de zones dangereuses dans cette région à cause des radiations. Cela marque de voir ça, les maisons de travers parce qu’il fait froid, des endroits beaucoup plus durs à vivre qu’ici… Ce qui nous fait penser qu’il faut toujours être vigilant, dès qu’il y a des dirigeants qui pensent plus à leurs basques plutôt qu’aux gens. Quoi qu’il en soit le fait de voyager, nous nourrit évidement humainement et également pour la musique.
Quels sont les ingrédients pour cet album ?
Marcello Giuliani : Effectivement on est tous des fans de pop music, des années 70 des fans de Miles Davis. Nous, ce qui est très important ce sont les ambiances dans les morceaux, on fait très attention à toutes ces choses là. Du Jazz vient la possibilité d’improviser sur scène, les morceaux peuvent être beaucoup plus longs, on a notre grille d’accords et Erik improvise plus ou moins sur ce qu’il a envie donc c’est très libre. On peut changer des harmonies, on peut faire plein de choses… de la musique pop… Sur le dernier album avec les chanteurs, on voit clairement quelles sont les influences.
Vous ressentez à chaque fois un besoin d’innovation, de nouvelles rencontres pour chaque album ou chaque concert peut-être même ?
Erik Truffaz : Ce qu’on essaye c’est d’être intègre avec nous-même et de faire ce dont on a envie et effectivement après trois ans de tournée avec le même répertoire on a besoin de faire d’autres choix. Alors il y a plusieurs réponses à ceci, si l’on faisait tout le temps la même chose, on s’ennuierait et on n’aurait plus de travail, c’est évident. Et puis on est intéressés et très contents par exemple de nos premières expériences avec le chanteur tunisien Mounir. Après ces chansons avec Ed Harcourt cela nous emmène ailleurs et c’est un grand plaisir, on aime tellement de musiques différentes - cela ne veut pas dire qu’on va faire un disque avec Yvette Horner - mais on est intéressés par plusieurs choix.
Daniel Colling essaye de faire du Printemps de Bourges un carrefour de rencontres, par exemple hier entre Juliette Gréco et Abd al Malik, est-ce un bon concept ?
Marcello Giuliani : Oui et non je ne parle même pas de Bourges, je viens d’une ville où il y a un grand festival, "Jazz à Montreux". Des fois, les grandes rencontres sont juste ¼ d’heure d’embrassades et l’on joue juste un standard et au deuxième couplet au lieu qu’il y ait les paroles, il y a l’autre qui fait un solo de flûte ! Je préfère lorsqu’il y a un travail commun, une envie commune des gens. Pour revenir à Juliette Gréco et Abd al Malik on est pour l’ouverture, contre le racisme. Notre musique est un mélange ce n’est pas juste DU jazz, DU rock, DE la pop, je ne sais pas ce que cela veut dire. Le morceau d’ Abd al Malik est vraiment terrible on va d’ailleurs faire 2 festivals en même temps que lui, et en plus il y a des copains qui jouent avec lui, le batteur qui est un très vieux pote.
Vos projets, la tournée ?
Erik Truffaz : La tournée débute maintenant, elle se terminera mi-mai pour la France. Après ce sera l’étranger : l’Italie, l’Allemagne, les pays de l’Est, la Russie, un peu partout dans le monde.
Je ne sais pas si vous avez déjà fait ou si vous pensez faire une bande originale de film ?
Marcello Giuliani : Il faut qu’on nous la file ! Eh comment !
Erik Truffaz : Déjà j’ai fait une bande pour un film, un film muet d’Yasujiro Ozu sur lequel on a joué. C’est une commande de la cité de la musique. Effectivement on a déjà eu quelques propositions, on était pressentis pour composer effectivement la musique de "La Marche de l'Empereur" et au dernier moment la production s’est opposé à ce phénomène et donc on ne l’a pas eu. Mais il y a quelque chose en l’air en ce moment avec un cinéaste français qui habite à Vancouver avec qui on va certainement travailler. On est très intéressés, on adore travailler sur les atmosphères, les ambiances, c’est parfait pour nous.
Des projets bientôt en Inde ?
Erik Truffaz : Alors je dois faire une résidence en janvier prochain en Inde avec un pianiste qui s’appelle Malcolm Braff. Et effectivement je vais enregistrer là-bas avec des indiens. Nous revenons d’une tournée de 3 semaines en Inde. Une tournée magnifique où à chaque fois des musiciens nous ont invités. |