Après une mini-tournée dans notre beau pays, voilà une
quinzaine de mois, (certains se remémoreront émus leur concert
aux Instants Chavirés), les cousins canadiens de GY!BE
gratifie cette année la France d'une halte consistante : 13 dates. Il
semblait donc assez judicieux d'aller prendre la température du groupe
en province avant leurs passages parisiens des 12 et 13 mai au Cabaret Sauvage
de La Villette. Un samedi, à une heure de TGV de Paris, Lille semblait
la destination idéale.
Le Grand Mix de Tourcoing est bien évidemment plein comme un oeuf,
les places s'étant arrachées dès les premiers jours. Un
splendide accident de la circulation à deux pas de la salle (sans gravité
il va de soi) donne le ton de cette soirée qui s'annonce dès cet
instant comme hors du commun.
Le groupe chargé d'ouvrir pour toute la durée de la tournée
est Hangdup, duo violon-batterie également originaire
de Montreal et sur le label Constellation. Totalement instrumentale, leur musique
s'apparente à du post-rock sans pour autant en posséder toutes
les caractéristiques, mais force est de reconnaître que leur show
fonctionne à merveille : les spectateurs, d'abord intrigués sont
au final complètement fascinés (un rappel aura même lieu
après les quatre titres du set). Et puis il y avait ce batteur, complètement
incroyable ... avec un instrument customisé où ont été
greffés des assiettes, une grille de radiateur et même un skateboard
orné de deux cordes de basse.
Les musiciens du collectif de Montreal pénètrent ensuite les
uns après les autres pour installer méticuleusement leur propre
matériel. Lorsque les lumières s'éteignent, le public découvre,
ébahi, neuf musiciens : trois guitaristes, deux bassistes, une violoniste,
une violoncelliste, un batteur et un percussionniste. Le concept visuel est
complètement fascinant : deux des guitaristes jouent assis, quasi dos
au public, avec 2m² de pédales sous les pieds, formant avec les
autres musiciens un demi-cercle (avec la section rythmique au centre) sur la
scène face à la salle.
Les éclairages discrets et les images projetées en arrière
plan achèvent ce fabuleux tableau. Retranscrire le concert titre par
titre semble mission impossible (et sans intérêt notoire) car on
rentre dans un concert de Godspeed avec le premier morceau pour n'en ressortir
que lorsque la musique réenvahit la sono.
Tout d'abord, le son est énorme, fort, très fort comme pour
percer les tympans des spectateurs et ainsi les attraper au plus profond d'eux-mêmes.
Les morceaux - d'une durée moyenne d'une vingtaine de minutes - alternent
passages instrumentaux apaisés (où les cordes et les bidouilles
guitaristiques sont mises en avant) et montées complètement cosmiques
(même si les similitudes musicales sont inexistantes, on songe pour ces
alternances à Led Zeppelin ou Jeff Buckley ).
Ces envolées peuvent s'apparenter au premier abord à du bruit
et seulement du bruit mais sont en fait basées sur des constructions
beaucoup plus complexes où un thème récurrent explose les
enceintes sur lequel vient se greffer une kyrielle de magiques interventions
complémentaires, donnant au son toute son épaisseur (au hasard
"Albanian").
Un concert de GY!BE relève au final plus de l'expérience transcendale
qu'uniquement musicale : le groupe est véritablement habité, un
lien invisible semble retenir les musiciens sur lequel chacun s'accroche pour
apporter sa contribution. La communion avec le public est également complète
même s'ils ne s'expriment pas, ne remercient pas : la musique prend littéralement
aux tripes, la fascination exercée sur la salle par un tel spectacle
est totale, l'impression de participer à quelque chose d'aussi incroyable,
de vivre une expérience surnaturelle font le reste.
Pour finir, le groupe prend même la peine de faire atterrir son public
en douceur (comme pour sortir sans douleur d'une expérience hallucinatoire)
avec "Outro", qui voit deux membres du groupe descendre dans la salle
pour battre une pulsation hypnotique annonçant la fin de la cérémonie.
Suite au prochain épisode...
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