Comédie de Feydeau, mise en scène de Mitch Hooper, avec Anthéa Sogno, Anatole de Bodinat, Patrick Azam (Stéphane Roux ou Christophe Barbier), Bruno Paviot (ou Michel Papineschi), Smadi Wolfman (ou Elise Roche), Sacha Petronijevic (ou Guillaume Crozat), Michel Baladi (ou Jean Tom), Hervé Masquelier et ou Renaud Castel (ou Philippe Simon).
Un salon design zen, un écran digital et un homme en complet-veston qui manie le camescope numérique, voilà une entrée en matière inattendue pour un vaudeville de Feydeau. Et pourtant...
Mitch Hooper, auteur, scénariste et metteur en scène, membre de la Compagnie Théâtre Vivant qui prône un théâtre de réflexion sur la condition humaine, a choisi de monter "La main passe" de Feydeau en débarrassant le vaudeville des oripeaux anecdotiques de la Belle Epoque pour en extraire la comédie de moeurs, qui traite de thèmes intemporels et universels, et libère de leurs costumes les personnages pour dévoiler des êtres, de chair, de sang et de sentiments pas toujours glorieux, certes, mais terriblement humains.
Car comme il l’indique dans ses notes d’intention, il privilégie le regard humain, "un regard lucide mais tendre. J’aime ces personnages. Ils sont aussi bêtes que moi. Et je voudrais laisser une porte ouverte à l’espoir. En riant d’eux, nous rions de nous-mêmes. C’est sain, et ça fait du bien."
Par ailleurs, Mitch Hooper a opté, pour sa mise en scène, pour un point de vue presque cinétique, avec notamment de judicieux intermèdes vidéos, qui apporte une connotation contemporaine et une fluidité nerveuse totalement novatrices et a conçu une distribution composée de comédiens chevronnés.
Comédie de moeurs donc, mais qui ne succombe pas aux pièges du psychologisme distancié. "La main passe" demeure une comédie divertissante au rythme trépidant, fertile en rebondissements, à l'humour ravageur et aux répliques acerbes dans laquelle Feydeau applique les règles du baccarat à la vie conjugale.
Contrairement à la typologie féminine duelle de la comédie bourgeoise, l'épouse conventionnelle qui ne prend, ou plutôt tente de prendre, un amant que par vengeance ou la cocotte au grand coeur, il brosse le portrait d’une femme moderne, sensuelle et amoureuse de l’amour plus que d'un homme, dont Anthéa Sogno, comédienne fine et pétillante, donne une éblouissante incarnation.
Autour d'elle, dans une ronde dérisoire et tragiquement drôle, un mari placide et philosophe (Patrick Azam impeccable), un amant torride mais lâche (Anatole de Bodinat irrésistible) et un amoureux transi version émotif bégayant (Sacha Petronijevic désopilant). Tout irait peut être pour le mieux du monde si n'intervenaient deux trublions par qui le scandale arrive, 'un maçon aboyant (Renaud Castel cocasse) et un voisin éthylique (Bruno Paviot remarquable).
Une épouse rivale fidèle (Smadi Wolfman parfaite) un célibataire bon ami (Michel Baladi épatant) et un commissaire de police complètement allumé (Hervé Masquelier étourdissant) complètent cette fresque pathétiquement truculente. |