Pour son 25ème anniversaire, le groupe Vive La Peinture expose à l’UniVer, du 4 au 29 juin 2008, avec cinq artistes de l’art urbain sous la bannière "Vive l’Art Urbain".
Le 21 juin 2008, VLP, Dix10, Paella ? et Jérôme Mesnager participent à une performance live de peinture collective. L’occasion de les voir au travail mais aussi de les rencontrer pour une interview flash autour d’une question unique : où situer leur travail pour lequel sont souvent évoqués l’héritage de la Figuration narrative, actuellement à l’affiche du Grand Palais, ou du Street Art américain.
Pour support à cette œuvre à cinq mains, une bâche rayée vert/rouge, store de magasin portugais récupéré à Romainville par Jérôme Mesnager.
VLP, honneur oblige, tenue noire et doc martens, commence le premier en esquissant un zuman et leur chien.
Michel Espagnon : VLP fait partie d’un des premiers groupes des années 80 du travail de rue et donc nous nous qualifions plutôt de Street Art. La Figuration narrative c’est une autre génération et puis une autre société. Il peut y avoir des rapprochements, comme sur mai 68, mais c’est un autre monde. Mais ce sont des artistes d’une autre génération qui nous intéresse car il y a un côté pop.
Jean Gabaret : VLP vient forcément après quelque chose, il n’est pas né de rien. Nous avons commencé à une époque où l’art conceptuel, essentiellement américain, dominait, doté de moyens financiers considérables avec lesquels nous ne pouvions pas lutter. Ils étaient minimalistes dans l’idée mais pas dans la réalité. Ils mettaient 50 tonnes de charbon dans la galerie avec quoi nous ne pouvions pas rivaliser.
Nous avons donc oublié tout ça et nos modèles c’étaient les groupes punk ; nous avons fait table rase de tout ce que nous avions appris. Nous sommes donc allés sur les palissades dans des lieux qui étaient considérés comme marginaux à l’époque et où personne n’allait.
Notre parenté avec la Figuration narrative c’est que eux, pendant 10 ans, avaient proclamé "la peinture dans la rue !" sans l’avoir jamais fait. Nous en avons rencontre les acteurs, quelque temps après, qui ont reconnu que nous avions fait ce qu’ils avaient proclamé. Mais nous, nous l’avons fait parce que, premièrement, nous n’avions pas le choix et que, deuxièmement, nous voulions secouer les choses.
Nous avons donc choisi une écriture et un style d’époque alors qu’eux continuaient une figuration dite "identifiable", quand même néo-bourgeoise, en exposant dans des lieux officiels et ils étaient achetés par des collectionneurs bourgeois. Ce qui n’est pas notre cas puisque nous avons un public très jeune, issu du Street et de l'art urbain, ce qui est assez différent.
Nous les connaissons, nous nous avons été influencés quelque part par mai 68, mais eux y ont participé, selon le slogan "Fais les choses, tu peux les faire si tu veux. Vis ta vie Le plus beau des chefs d’œuvre c’est réussir sa vie !" ce qui n’est pas, je crois, leur problématique.
Paella ?, également déjà sur place, a tôt fait de les rejoindre.
Paella ? : Mon héritage par rapport au mouvement de la Figuration narrative des années 60 est indirectement dans le côté politique plus que dans l’aspect formel car nous venons plutôt de la Figuration libre et, justement, d’un renouveau de la peinture, après les années 70, qui a été axée davantage vers les concepts et la peinture conceptuelle avec Supports/Surfaces ou les conceptuels purs et durs.
Pour ma part a priori, je suis né d’un désir de retourner à la peinture après que la Figuration narrative se soit un peu tarie. Ce qui était intéressant, c’était son effervescence, ce dans les années 60, mais après 68, elle n’a plus grand-chose à dire car les idées sont déjà comprises, donc c’est un peu du resucé.
Au niveau formel, je reconnais leur intérêt, de Monory à Klasen et Arroyo, mais je les sens trop axés sur une forme de peinture de la réalité retranscrite. Or, pour ma part, et le mouvement des années 80, il y avait l’idée de se libérer, de s’affranchir d’une réalité. Même si moi, ce que je revendique, c’est de parler de mes contemporains en utilisant les mots et une figuration auxquels peut s’identifier. C’est parler de la société mais sans tomber dans une peinture d’une retranscription de la réalité.
Je connais bien le travail des acteurs de la Figuration narrative mais il est finalement très daté. Est-ce que nous, nous ne serons pas datés dans 20 ans ? C’est possible, mais c’est très figé dans une sorte de travail à partir de la photo, de la presse et, du coup, cela donne une vision globale de ce mouvement qui est un peu poussiéreuse. Mais je reconnais que chaque artiste a son droit de cité et qu’ils furent des artistes intéressants.
S’agissant du Street Art, je n’ai pas l’impression de faire une peinture qui s’en rapproche. Mon activité dans la rue, je ne la qualifierai pas d’artistique; c’est plutôt celle d’un afficheur Ce que j’essaie de montrer, ou d’exprimer, dans la rue ce sont des idées politiques par le biais de ce moyen traditionnel qu’est l’affiche.
Par ailleurs, ma peinture d’atelier a forcément des liens avec ce que je fais dans la rue mais je me pose des problèmes de peintre quand je suis dans mon atelier. Alors que, chez certains de mes camarades, ce qu’ils font dans la rue se rapproche de ce qu’ils font dans la rue. A chaque fois j’essaie d’avoir une réflexion sur le moyen que j’utilise.
Jérôme Mesnager arrive, jovial, et sort son mythique pot de blanc pour se joindre à ses compères.
Jérôme Mesnager : J’ai commencé effectivement au milieu de la figuration narrative pendant mon adolescence avec la revue Chorus Jean-Pierre Le Boul’ch , Ernest Pignon Ernst, Gérard Fromanger qui sont des amis;
L’idée de peindre dans la rue vient de là, de Gérard Zlotykamien, l’idée d’être peintre aussi. Tout cela vient des années 70 et l’important c’est de continuer.
La présence de Gérard Zlotykamien était annoncée.
Et, effectivement, il participe, par toile interposée, découpée solennellement par les VLP, qui sera collée sur la bâche.
C’est enfin au tour de Roma Napoli de Dix10 d’officier et d’esquisser... une moulinette...à suivre...
Roma Napoli : Dix10 n’est ni Figuration narrative ni Street Art. Nous ne sommes pas du tout Street art.
Ce qui s’est passé, c’est qu’on s’exprimait dans la rue, en 1982, au début de Dix10, en collant des affiches comme état publicitaire des musées spéciaux pour signifier que nous faisions des expositions ailleurs.
Nous avons également réalisé des performances dans la rue, ce que nous faisons encore, comme tout récemment le 15 juin 2008 avec Artdealer. Nous faisons donc plutôt des interventions physiques avec de la peinture comme vendre du muguet au 1er mai. C’est uniquement par cet aspect que l’on peut nous associer au Street Art
Aujourd’hui comme nous exposons avec nos amis nous participons à la création d’une œuvre commune comme ça a été la mode, au début des années 80, de faire des peintures en direct.
Par rapport à la Figuration narrative, ce n’est pas la même génération et nous sommes arrivés au début de la Figuration libre à laquelle nous ne sommes pas vraiment apparentés, mais nous avons repris la balle de la Figuration libre au rebond.
Et nous nous en sommes servis. Mais nous sommes plutôt conceptuel même si la forme ne l’est pas toujours; Toutes nos actions partent toujours d’un concept pour arriver à la forme
Gérad Zlotykamien viendra faire une apparition, le temps d’une photo, pour voir l’œuvre achevée. Œuvre qui sera visible jusqu’à la fin de l’exposition.
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