La chaleur revient enfin sur Paris en cette veille de changement de saison. Belle soirée pour un concert et malgré la rude et interminable montée de Ménilmontant pour accéder à la Maroquinerie, la récompense se trouve assurément au bout.
Précédé de sa réputation scénique, Wraygunn avait déjà fait forte impressions lors de ses précédents passages, transformant chaque concert en une frénésie gargantuesque.
Le groupe lusitanien vient défendre ce soir son nouvel album Shangri-la sur la scène parisienne. Enfonçant le clou du déjà célébré Ecclesiastes 1.11, Wraygunn avec son dernier opus accède définitivement au statut de prophète du rock-blues-funk-hiphop portugais.
L’australien Chris Kenna ouvre la soirée, seul sur scène simplement muni d’une guitare électrique. Lui qui joue habituellement dans des bars parisiens se retrouve sur les planches de la Maroquinerie et en faisant l’effort de s’exprimer en français acquiert immédiatement l’aval du public.
Sa voix grave et éraillée, s’intègre parfaitement au mélange blues folk country prodigué. Parfaite première partie pour ce qui va suivre, il raconte, avec un chant émaillé de quelques rugissements d’outre tombe, des histoires de cowboys australiens, de gangsters, d’amour et de mort.
Le public, bien que encore peu nombreux, se montre enthousiaste. Fin de set, le lonesome bluesman conclut alors avec "One more cup of coffee", reprise de Monsieur Bob Dylan.
Après quelques poignées de minutes, arrivent enfin les sept membres de Wraygunn. Verres éternellement fumés, et tatouages ornant ses bras, Paulo Furtado aka The legendary tiger man est le maître de cérémonie. Tendance gringalet, il se révèle pourtant monstrueux d’énergie, de rage et de conviction. Et il est comme toujours bien entouré : Batteur, percussionniste, homme de main aux samplers, bassiste et deux choristes l’accompagnent pour cette soirée. La Maroquinerie est le format idéal de salle pour ce groupe. Le public est proche et condensé dans la petite fosse centrale et la promiscuité augmente la température déjà élevée.
C’est le languissant "Just a gambling man" qui ouvre la soirée. Paulo susurre tandis que les chœurs font monter doucement monter la sauce. Dès lors les choses s’accélèrent rapidement avec "Ain’t gonna break my soul" tiré du premier album Soul jam. Porté par un riff hypnotique, Paulo alterne ses deux micros transformant sa voix comme au travers d’un mégaphone.
Plus apaisé et soul, "Love is my new drug" donne le chant libre à Raquel Ralha la deuxième voix de Wraygunn. Il faut dire que Shangri-la dans son ensemble, offre plus de place aux voix féminines. De même, "No more, My lord" permet à Selma Uamusse, la seconde choriste, de prendre le lead pour un Gospel détourné au son Hammond du synthé.
Suit "How long, how long" qui, commençant doucement mais porté par la montée de la batterie, entame un hypnotique rythme qui enflamme le public. Les chansons se suivent en crescendo présentant ainsi un aperçu des trois albums du groupe.
Finalement le groupe passe définitivement la cinquième, voire plus, avec "Love letters from a muthafucka" lancé à toute allure sur les highways du rock.
Enfin le boogie "All night long" tiré du précédent album clôture le concert. Les choristes semblent possédées et les lumières blanches stromboscopiques transforment la salle en night club. Prise dans une frénésie démoniaque, l’assemblée s’anime pour de bon. Puis, baissant de régime, la chanson se fait langoureuse et permet à Paulo de descendre de scène, de se promener entre les gens, d’embrasser les filles et les enlacer. Au son d’un "Love that’s woman" répété à l’envie par Paulo et repris par les choristes la soirée se termine donc sur cette prière.
Acclamé par le public, le groupe revient pourtant et effectue son habituelle dynamitée reprise des Kinks "You really got me" avant de se retirer définitivement au son d’un très speed "Juice" .
Mélange de Blues, soul, rock et hiphop Wraygunn dégage une énergie déraisonnable faite de déflagrations musicales. Tels des prêcheurs en terre inconnue, messies d’une délivrance musicale, le groupe a laissé ce soir sur scène plusieurs litres de sueur et comme toujours a électrisé le public. Une énergie animale, sexuelle sur des incantations chamanes. Mélange des genres et genre unique. L’effet était déjà garanti à l’écoute de l’album mais ce n’était rien comparé à l’effet sur scène.
Set list :
Just a gambling man
Ain’t gonna break my soul
Keep on praying
Love is my new drug
No more, my lord
How Long? How long?
Everything’s gonna be ok
Work me out
She’s a go-go dancer
Drunk or stoned
Lady luck
Love letters from a muthafucka
All night long
You really got me
Juice |