Pièce
écrite et mise en scène par Daniel Soulier, avec
Jeanne Vitez et Daniel Soulier.
Dans le registre des rencontres historiques, réelles ou imaginaires,
Daniel Soulier a trempé sa plume
dans la langue du 17ème siècle, pour fabuler "La veuve et le
grillon", pièce dont le titre laisse augurer du style
et qui met en présence deux contemporains que tout opposait
: la marquise de Sévigné et Jean de la Fontaine.
Daniel Soulier situe ce tête-à-tête dans une modeste soupente mal entretenue, papiers éparpillés au sol, linge séchant sur un fil, dans laquelle un dormeur repose sur une bien modeste couche. Telle est l'antre du libertin vieillissant qui ne constitue certes pas le décor habituel dans lequel se meut la très distinguée marquise de Sévigné.
Celle-ci, bien qu'indignée par sa réputation de jouisseur débauché, vient néanmoins rendre visite à l'homme de plume dont elle admire le talent. L'occasion pour l'épicurien qui aime toutes les femmes et celle, blessée à vie par l'infidélité de son mari, qui n'aime aucun homme et ne s'octroie aucun plaisir, de deviser librement, toujours sur le ton de la bienséance et de l 'humour feutré qui conviennent aux gens d'esprit, sur les mœurs et les affaires du siècle comme sur leurs conceptions bien différentes de la vie.
Ce savoureux échange sous forme de joutes oratoires, conçues
comme des round de boxe, ponctuées de quelques fables, est extrêmement
plaisant en ce qu'il place le spectateur au cœur du siècle des
Lumières et dans l'intimité de l'esprit de deux de ses illustres
et réputés représentants.
A la qualité du texte, vif et policé, s'ajoute l'interprétation
des deux comédiens. Jeanne Vitez
campe avec finesse la veuve qui aimerait haïr le bambocheur
mais se laisse presque circonvenir, en tout bien tout honneur
bien évidemment, par ce grillon beau parleur et éternel séducteur
a qui Daniel Soulier donne une bien
belle appétence gourmande de la vie. |