Un ami me propose de chroniquer un disque de rock. Il se ravise lorsqu’il songe à ma complète incompétence en la matière (aujourd’hui, j’écoute plutôt de la musique classique mêlée parfois au métal le plus lourd), et surtout à ma mauvaise foi laquelle me fait préférer à Frank Zappa, le groupe King Crimson emmené par Robert Fripp (et puis, comme Jésus Christ, paraît-il, les Beatles et les Rolling Stones n’ont jamais existé!). Bref, malgré l’ami dont je vous parle, décision est prise de rédiger un article sur ce disque.
À la première écoute, je me dis que Everything that happens will happen today, fruit de l’association entre Brian Eno et David Byrne, mérite bien sa pochette. On voit une maison gentillette, soit la maison pour vieux couple, avec mari qui doit tondre la pelouse régulièrement, et bobonne qui prépare les petits plats. En fin de compte, selon moi, Eno et Byrne devaient absolument prendre leur retraite, tant l’optimisme de ce disque me faisait regretter les tentatives expérimentales dans les années 70 entre Eno, justement, et Robert Fripp.
Oui, j’en venais à préférer à cet album le dernier Motörhead. La brochure du disque intitulé Motörizer nous montre, en effet, deux meufs (gros seins siliconés, bien sûr) à une table de jeu avec les membres du groupe. Lemmy, le leader de Motörhead, a toujours su soigner l’image de sa petite entreprise. Le mauvais goût en est de rigueur.
Ou dire que Steve Reich, le compositeur américain, ne faisait, récemment encore, point la distinction entre sa propre musique et celle de Brian Eno ; sinon que ce dernier vendait plus de disques que lui… Non, il fallait de suite que je voue aux gémonies ce Everything that happens will happen today.
C’est alors qu’un miracle se produisit : j’enchaînais écoute sur écoute. Finalement, j’étais conquis. Le titre "Home", qui me semblait, au départ, une sucrerie inoffensive, révèle une vigueur qui permet de ne pas regretter la prépondérance de Byrne au chant par rapport à un Eno quelque peu en retrait du point de vue instrumental. Autre morceau remarquable : "I feel my Stuff" est comme une ballade lancinante, une pierre précieuse qui cache ses propres éclats à l’intérieur d’elle-même, une œuvre dans laquelle toute violence demeure sous-jacente. Puis, il y a ce "Life is long" démontrant une alacrité stupéfiante. "Strange overtones" et "Poor boy" prouvent, quant à eux, que tout fonctionne parfaitement entre Brian Eno et David Byrne (alors que je n’y croyais guère au début, et je m’en excuse ; vraiment, je m’en excuse ; et avec génuflexion, s’il vous plaît!).
Certainement, Everything that happens will happen today est un bon disque (j’oubliais encore de vous dire tout le bien que je pense de "Wanted for life",…). |