Andy arbore une magnifique crête sur son crane rasé et ne lâchera jamais sa guitare durant toute l’interview.
Lowkey entre immédiatement dans le jeu des questions, défendant Mongrel comme un programme politique.
Avec convictions, la petite salle d’interview chez Pias se transforme en ring social où la culture hip hop anglaise a davantage à dire et à défendre que la pop rock des groupes répétitifs que Londres nous envoie à longueur d’année.
Comment définiriez-vous le groupe Mongrel ?
Lowkey : Chaque membre d’un autre groupe qui est associé à Mongrel n’est pas avec Mongrel ce qu’il est ailleurs. Ce n’est pas un disque des Babyshambles, ce n’est pas un disque des Artic Monkeys, ce n’est pas un disque de Lowkey. Définitivement.
Ce n’est pas un side project.
Andy : C’est un vrai groupe, nous avons fait plus d’un disque, nous sommes allés rencontrer Chavez, Mongrel est un projet d’avant-garde et d’expérimentation, d’un point de vue lyrique et sonique. Les médias britanniques sont dominés par des hommes blancs caucasiens issus de l’enseignement privé. Ils veulent laisser les autres en bas. Ceux-là ne crieront jamais "Libérez la Palestine", car ce n’est pas leur intérêt et qu’ils n’y connaissent rien à la culture populaire et à l’implication des groupes.
Quel est le rôle de chacun d’entre vous dans le processus d’écriture et de composition ?
Lowkey : Chacun pose quelque chose de différent sur la table. Parfois l’un d’entre nous apporte une cassette avec des idées et des prémix, et on retravaille tous ensemble et ça devient une chanson de Mongrel. On peut aussi partir d’idées basiques ou de squelettes de chansons, et tous bosser ensemble. C’est vraiment un travail de groupe.
Pour les français qui ne connaîtraient pas votre musique, quels sont les thèmes de vos chansons ?
Andy : Nous abordons les problèmes du monde d’aujourd’hui que les artistes de la culture underground ne devraient pas avoir peur d’aborder.
Si un extraterrestre arrivait sur Terre maintenant et qu’il écoutait tous les CD et enregistrements qui ont été faits dans les dernières années, il lui serait très difficile de savoir ne serait-ce que ça : qu’il y a eu une guerre en Irak. Ou un massacre à Gaza, ou une invasion en Afghanistan. Tout le monde est très lâche, les musiciens se demandent avant tout combien cela va rapporter et ce que ça va apporter.
Lowkey : Ils vont serrer la main de Georges Bush et lui cracher dans le dos. Au lieu d’assumer et de lui cracher au visage. On parle de ça à la base : certains choisissent de s’asseoir et de faire du fric.
Votre vidéo clip "The Menace" est en noir et blanc. C’est un choix artistique ?
Andy : C’est inspiré du film français La Haine. Nous avons été vraiment inspirés par ce film car en Angleterre, nous n’avons pas une culture démonstrative, nous avons tendance à accepter les actions du gouvernement, même si on ne les approuve pas alors qu’en France, vous avez une culture très démonstrative, les gens descendent dans la rue ! En Angleterre, on va râler dans notre coin mais on ne va rien faire. On aimerait faire réagir les gens, commencer une révolution.
Pensez-vous réellement, comme écrit sur votre page Myspace, que la communauté hip hop est ignorée par les médias ?
Lowkey : Plus précisément les médias anglais populaires et majoritaires. Mon opinion sur le sujet : les gens en place qui décident des goûts du public, les directeurs de labels, les médias, les DJ sont fainéants. Ils ne travaillent pas en terme de découverte mais en terme de prototypes. Ils vont chercher le nouveau Eminem, ils essaient de recréer le prototype qu’a été Eminem. On finit par nous sortir un gars et on dit que c’est le nouveau Eminem : ce n’est pas le nouveau Eminem. Parce qu’on cherche à re-créer le succès des autres, on n’a jamais eu de succès hip hop mondial venant d’Angleterre. Ils ne croient pas en les artistes hip hop anglais.
Vous soutenez la Palestine sur votre page Myspace.
Andy : Nous ne sommes pas effrayés d’être rebelles. Nous n’avons pas peur de chanter "Libérez la Palestine". C’est un vrai crime ce qui se passe là-bas.
Est-ce que parfois vos paroles ne vous causent pas de problèmes avec votre propre label ?
Lowkey : Bien sûr que dès qu’on parle de Guantanamo, d’Irak, de choses très spécifiques, de Palestine, ils sont plus hésitants voire repoussés face à l’idée de vous soutenir à 100% et de promouvoir la musique. Parce que vous n’êtes pas le stéréotype souriant de la publicité.
Donc cela peut vous poser des problèmes.
Lowkey : Peu importe. Personnellement, si j’ai une vie qui ne sert pas à aider ces gens là alors ma vie ne sert à rien. C’est plus important pour moi que d’avoir une carrière, que de faire de l’argent, à cette étape de ma vie.
Andy : Faire de l’argent pour moi est secondaire, j’ai fait des festivals comme Coachela sans être payé, après toute la manipulation et la merde des journalistes, tout ce qui reste, c’est la musique elle-même. Et que les gens se disent à ce moment là que l’album des Mongrel est réellement innovateur et que c’est le meilleur des albums.
Retrouvez Mongrel
en Froggy's Session
pour 2 titres acoustiques
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