Coup d'oeil dans le
rétroviseur, deux ans et demi après la révélation
au monde du désormais incontournable duo de Detroit tout
de rouge et blanc vêtu. Beaucoup d'eau a coulé sous
les ponts, la sensation rock de la rentrée et des Inrocks
2001 n'a désormais plus grand chose à voir avec le
groupe brut de décoffrage d'alors : Jack
White se voit imprimé sur papier glacé dans
la presse people, le dernier-né Elephant
s'est vu dépoter par camions, et comble ultime, "Seven
Nation Army", l'incontournable simple de 2003, passe
en boucle sur des radios même pas respectables.
Côté scène, les incroyables prestations première
époque ont trop souvent laissé place à de bons
sets néanmoins un peu ampoulés (comme à l'Olympia
en mai dernier), concessions au succès obligent ... d'où
une certaine frustration. Tout comme Radiohead
à l'automne dernier, quel peut être l'intérêt
pour le fan de toujours de casser le mythe en se rendant à
ce show du Zenith. Autant être clair, aucun.
Juste l'espoir d'assister à une renaissance, voire plus
modestement d'écouter quelques bons morceaux. A peine rentré,
la grande salle de la Vilette demeure fidèle à sa
sinistre réputation, dénuée d'âme entre
ses publicités pour Coca Cola et ses panneaux à l'effigie
de RTL2.
Dans la grande tradition des premières parties de choix
(Von Bondies, Whirlwind
Heat ...), le premier groupe à jouer assure sévèrement.
Encore un nouveau venu de la Motor City, il se prénomme Blanche,
rappelle Calexico - probablement pour
l'utilisation du banjo -, mais surtout le Gun
Club et son emblématique leader trop tôt disparu
: Jeffrey Lee Pierce. Simple et propre
sur elle en apparence, la musique du quintet s'avère en réalité
malsaine, obsédante et avant tout fascinante. La parution
de leur premier album dans quelques mois est désormais attendue
de pied ferme
. Ne restent ensuite plus que quelques minutes à patienter,
au son de "Fire Of Love" du
Gun Club justement avant de pouvoir tirer une (ultime ?) conclusion
sur les faux frères et soeur de Detroit. Dernier - avant
un bout de temps, comme le laissent supposer les ennuis judiciaires
se profilant à l'horizon du leader - d'une tournée
dédiée au Royaume-Uni, ce show des White
Stripes, en forme de franche réussite, demeure (et
demeurera certainement encore longtemps) un mystère complet.
Le groupe s'est montré tranchant comme jamais, a retrouvé
cette urgence faisant initialement sa force, ne cédant jamais
à la facilité de satisfaire le public récent,
complètement absorbé dans une folle réinterprétation
de l'intégralité de son répertoire. Et le groupe
de ressusciter nos classiques chéris semblant perdus à
jamais : "Let's Shake Hands",
"Astro", "Jimmy
The Exploder", "Death Letter"
et les non moins jouissifs "Hotel Yorba"
, "Fell In Love With A Girl"
(irrésistible), "We're All Gonna
Be Friends" tout en réservant quelques surprises
comme "Superstition" des Kills.
"Elephant" n'a cependant pas
été laissé sur la touche mais interprété
avec classe : "In The Cold Cold Night"
, "Blackmath" ...
Preuve suprême de la détermination du groupe, l'exécution
en simple filler au milieu du set du tubuesque "Seven
Nation Army" . Tout comme Noir
Désir à l'automne 2002 en ces mêmes lieux,
une partie non négligeable du public reste perplexe, complètement
coite, donnant presque l'impression de s'être trompée
de lieu, visiblement déroutée par un groupe qu'ils
imaginaient autrement. Ultime concession (ou remerciement à
un si nombreux public), "I Just Don't
Know What To Do With Myself" pour finir.
Claque générale, chers amis snobeurs, c'est vraiment
trop bête, comme souvent, vous avez eu tort de ne pas venir
...
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