Texte de Oscar Wilde, adaptation et mise en scène de Grégoire Couette-Jourdain, avec Jean-Paul Audrain.

Prendre pour amant, dans l'Angleterre puritaine du 19ème siècle, le fils d’un comte, membre de la Chambre des Lords, qui aime être à la une des journaux et lui intenter un procès en diffamation pour avoir été qualifié de sodomite n'est sans doute pas la meilleur idée qu’a eu Oscar Wilde.

Le dandy condamné, emprisonné, réduit au silence, à la réclusion, à l’isolement et à des conditions de détention particulièrement drastiques connaît alors l’abandon, la souffrance, mais également la vertu de l'amour transcendé, de l'amour pour l'humain, qui l'amène à une réflexion philosophique et évangélique sur ce qu’il nomme "la machine Humanité" qui lamine l’individu qu'il développera dans "La ballade de la geôle de Reading".

Grégoire Couette-Jourdain a choisi de monter au théâtre un écrit de la même période "De profundis" une longue lettre exutoire que Wilde écrivit à son cher Bosie, le trop aimé, qui relate son cheminement carcéral dont il propose une intelligente adaptation resserrée.

Dans une scénographie épurée aux lumières travaillées qui évite le réalisme naturaliste et nimbe le comédien d'un clair-obscur à la Georges de La Tour, Jean-Paul Audrain porte magistralement le verbe d'Oscar Wilde dans sa progression rédemptrice dans un spectacle qui suscite autant d'émotion que de réflexion.

Il incarne avec autant de conviction que de profondeur et d'humanité l'amoureux transi qui se complait dans de pathétiques récriminations contre l'aimé, sorte d'enfant gâté et de gigolo égocentrique, ingrat et versatile qui se faisait appeler le Prince Fleur de Lys, et l'homme qui élargit son champ de vision puis s'efface derrière le poète qui, sans renoncer à cet amour destructeur, transcende la souffrance qui révèle le sens de la vie, apprend l'humilité et embrasse la condition humaine dans ce qu'elle a de plus élevé, l'essence de l'amour qui ressortit au divin.