Voilà
déjà bien trop longtemps que les Walkabouts
ne font plus parler d'eux, si ce n'est pas l'intermédiaire
de compilations plus ou moins réussies (drunken soundtracks,
I'm sorry) ainsi que par le remarquable hommage à Nina Simone,
5 titres regroupés sous le nom "Slow Days with Nina".
Mais Chris Eckman, lui, est toujours
présent sur les pochettes de disques tel que ceux de Terry
Lee Hale, ou Midnight Choir notamment,
en tant que producteur ou musicien à la patte reconnaissable
entre toutes.
Cette patte qui précisément a fait la renommée
des Walkabouts et de leur country-rock si particulier, et cette
voix si profonde et chaleureuse, capable des plus mélancoliques
ballades comme des rock des plus incisifs.
Chris Eckman avait déjà tenté un album solo
intitulé A Janela, passé
totalement et injustement inaperçu, et il revient, en ce
début d'année, avec un superbe The
Black Field.
Enregistré dans un studio en Slovénie dans des conditions
live et entièrement acoustique, ce disque dégage une
impressionnante et incroyable chaleur non seulement par le rayonnement
de la voix de Chris et l’harmonie des guitares mais aussi
par l'atmosphère ambiante qui, en toile de fond, capte certes
les parasites sonores, tels les bruits de ou le claquement d’une
porte, mais tout en les conservant restitue ainsi l’émotion
et la magie de l’instant, renforçant le sentiment,
en fermant les yeux, qu’il ne joue que pour vous et près
de vous.
Tout cela concourt à créer un album intimiste, Chris
Eckman nous entraînant dans son univers quasi familial. Familial
car il s’est inspiré de la technique picturale et de
l’univers de son beau-frère, le peintre
Nikolaj Beer, dont il a retenu une toile pour en faire la
couverture et donner le titre à son album.
Difficile de parler d'isoler les morceaux qui participe de la création
d’un univers. Après le morceau d'ouverture "Nights
like these", moins accessible au premier abord sur lequel
Chris Eckman a entièrement travaillé seul, du chant
aux samples, "Healing waters of the flood",
porte incontestablement, et avec un bonheur toujours renouvelé,
la marque de fabrique des Walkabouts.
Car en effet, après un enregistrement en solitaire qui constitue
le socle des morceaux, il a demandé à ses amis d'en
rajouter une "couch"e. Autrement dit de procéder
par strates en jouant sur l'existant et en y apportant chacun leur
touche personnelle, ce qui, loin d'alourdir les compositions ou
de les déséquilibrer, aboutit à créer
de véritables perles comme "The
Black Field" et sa lourde Telecaster manipulée
par Al Deloner (Midnight Choir) ou encore
une dobro qui vient habilement revêtir de sa chaleur l'impeccable
"Restless", manipulée
par le génial Terry Lee Hale.
"Crystalline" nous invite
du coté de chez Nick Drake, avec ce petit quelque chose dans
la voix, et ces arrangements au cordeau, mais poétiques,
qui paraissent tellement désuets et pourtant terriblement
efficaces, une berceuse d'un autre âge à la douceur
trop rare de ce côté-ci du rock'n'roll.
Les autres titres (seulement 9 morceaux au total) sont du même
acabit. Un album intimiste et minimaliste, mais pas lo fi. Un disque
personnel mais très ouvert dans lequel chacun de nous saura
lire et dans lequel nous laisserons glisser nos émotions
avec bonheur et mélancolie.
L'album se termine sur une reprise, un hommage aux
Buzzocks sur "Why Can't I touch
it ?", 7 minutes d'une intensité remarquable,
mêlant à la fois la force des Buzzcocks et la sensibilité
de Chris Eckman.
Attention !.. chef d'oeuvre à ne pas ignorer....
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