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Interview  (Paris)  mars 2004

Où trouver Jean-Luc Jeener, auteur dramatique, acteur, metteur en scène, critique de théâtre, directeur de compagnie, directeur de théâtre ? Au théâtre, bien évidemment !

Et ce samedi, en fin d’après-midi, c’est au théâtre du Nord Ouest qu’il nous accueille, dans ce théâtre atypique qui brinquebale et fait le dos rond aux difficultés financières pour défendre son théâtre, le théâtre de l’incarnation.

Comment êtes-vous arrivé dans le théâtre ?

Jean-Luc Jeener : J’ai toujours été passionné par la vie, le rapport avec le sens. Quand on a 15 ans, on se demande toujours ce que l’on va faire de son existence. Je voulais être romancier. Et puis, il y a eu une rencontre un peu hasardeuse au lycée avec un camarade de classe qui m’a proposé de jouer dans la pièce qu’il montait. J’ai accepté et il m’a confié un petit rôle. Nous n’avions pas beaucoup d’expérience et tout le monde parlait, donnait des conseils. Et très vite on s’est aperçu que l’on n’écoutait que moi. Ma parole devenait la parole juste du projet. J’ai senti à ce moment que ma vie allait être cela. J’ai eu la chance de rencontrer la chose que je devais faire et j'ai su que j’allais consacrer ma vie au théâtre.

Donc une révélation ?

Jean-Luc Jeener : Une révélation quasiment immédiate dans le rapport juste à la chose juste. Comme si c’était de tous temps écrit. A partir de cet instant, ma vie n’a tourné autour que de cela, cette activité principale. Ce qui ne m’a pas empêché de faire d’autres choses, des études, notamment des études de théologie, de faire du journalisme, d’écrire. Mais c’est toujours mon activité principale, vitale, essentielle, ce qui me fait vivre.

Ces activités annexes, même exercées simultanément, étaient purement alimentaires ou gravitaient-elles toujours autour du théâtre, un peu comme des médias pour faire du théâtre ?

Jean-Luc Jeener : Tout n’était qu’autour du théâtre. J’ai fait du journalisme pour vivre mais je n’étais pas journaliste politique mais critique de théâtre. C’était un complément. Souvent les gens pensent que je suis un critique qui fait du théâtre alors que je suis un metteur en scène qui est devenu critique de théâtre à la mort de mon père car j’étais déjà couvert de dettes.

Les études de théologie ont-elles un rapport avec le théâtre ?

Jean-Luc Jeener : Plus qu’un rapport. J’ai écrit un livre dont le titre est Pour un théâtre chrétien. Je suis chrétien, catholique, apostolique et romain.

Quelles incidences sur votre travail de mise en scène, sur le choix des pièces ? Cela veut-il dire que vous ne vous intéressez qu’aux auteurs d’obédience catholique ou des auteurs qui traitent de sujets qui préoccupent l’Eglise catholique ?

Jean-Luc Jeener : La réponse est très simple. Le théâtre est l’art de l’incarnation et le christianisme est la religion de l’incarnation. Donc dans mon livre, j’essaie de faire ressentir comment l’un peut enrichir l’autre. Le seul problème du christianisme réside dans sa spécificité. La spécificité du christianisme est l’incarnation. Croire à cette folie que Dieu s’est incarné en Jésus. C’est une folie absolue, une chose impossible, ce qui fait que toutes les réflexions, toutes les hérésies pensent que le Christ est un prophète comme les autres car il est impossible d’être à la fois Dieu et homme en pensant qu’il est impossible d’être une chose et une autre chose simultanément. Cela paraît une folie totale.

Or, au théâtre, nous réalisons cela à chaque seconde car le comédien sur le plateau est à 100% le comédien et à 100% le personnage. Il devient totalement le personnage tout en restant parfaitement lui-même. Donc cela constitue une piste, une manière d’appréhender et de comprendre que cette folie n’est peut être pas aussi folle que cela. Je donne cet exemple sur l’incarnation mais on peut tout aussi bien parler de la liberté. Comment croire à la liberté si Dieu est le maître de tout ? Comment croire à la liberté du comédien s’il est entre les mains d’un texte et d’un metteur en scène. Ce sont des données fermées comme nos propres données et pourtant la liberté circule d’une manière violente. Quel est ce mystère ? Pourquoi ?

Comment peut-on rester soi-même tout en incarnant un autre ? Ne s’agit-il pas d’une forme de schizophrénie ?

Jean-Luc Jeener : Non justement il ne s’agit pas de schizophrénie. C’est simplement être autre. Quand je joue, je suis simultanément complètement le personnage et pourtant je demeure Jean Luc Jeener. C’est extraordinaire mais pas schizophrénique car je ne suis pas déchiré. Il en va de même pour le Christ.

Il peut s’agir d’une schizophrénie maîtrisée.

Jean-Luc Jeener : Si elle est maîtrisée, ce n’est plus une schizophrénie.

Comment peut-on être critique de théâtre quand on est totalement engagé dans le théâtre à différents titres et comment peut-on porter un regard objectif sur un spectacle monté et interprété par quelqu’un d’autre ?

Jean-Luc Jeener : Peut-on être juge et partie ? C’est la question première que je me suis posée quand on m’a proposé de devenir critique. La réponse est extrêmement simple. C’est un problème 1) d’honnêteté 2) de conscience qui sont fondamentales et puis ensuite la réponse est liée à l’apport. Si tous les critiques me ressemblaient ce serait un peu embêtant mais il est aussi très important qu’il y ait dans le paysage de la critique française des gens qui connaissent le métier de l’intérieur. Certains critiques ne connaissent rien au structurel. Et ils sont épatés par un costume, par une lumière qui vont l’empêcher d’aller à l’essentiel. Moi, on ne me la fait pas. Ce n’est pas un svoboda qui va m’épater. La liberté est là.

Ce serait une erreur de croire qu’en allant tous les jours au théâtre, que l’on soit ou non du métier, fait que nous soyons un spectateur comme un autre. Nous sommes des spectateurs professionnels. Nous ne pouvons pas avoir le même regard que celui qui va au théâtre occasionnellement. Cela pose le problème du professionnalisme. On perd une fraîcheur, une naïveté de jugement mais on gagne en profondeur, en connaissances. Ensuite dernière chose, tous les critiques littéraires sont également romanciers et personne ne s’en choque.

Nous comprenons bien que le côté technique professionnelle ne vous épate pas et que vous êtes mieux à même d’en juger qu’un spectateur lambda. Mais vous prônez un théâtre militant et humaniste. Cela ne constitue-t-il pas un prisme par lequel vous appréciez le travail d’un autre ?

Jean-Luc Jeener : Il y a deux choses dans votre question. En premier lieu, je ne prône pas un théâtre militant car c’est un mot qui me répugne. Le second point est que la subjectivité dont vous parlez, celle de celui qui connaît la musique, est également la même que n’importe quelle autre subjectivité. On juge toujours à travers le prisme de ce que l’on est. Il ne faut pas chercher dans la critique une vérité mais une honnêteté. Quant à la deuxième partie de votre question c’est : est-ce que l’on critique en fonction de ce que l’on veut voir, comme Procuste (ndlr : brigand, fils de Poséidon, qui recevait les voyageurs dans son auberge et leur coupait les pieds ou les étirait pour les mettre à la dimension du lit), ou en fonction de que le créateur veut faire. C’est la question que se posent tous les critiques.

Pour ma part, faire de la mise en scène me rend beaucoup plus tolérant et plus ouvert que mes collègues qui sont des metteurs en scène qui s’ignorent. Quand on situe sa pensée et son identité, on est mieux à même de respecter et de comprendre l’identité de l’autre. Je juge à partir de mon identité tout en la dépassant. Je regarde au-delà. J’ai un ego trop dévorant et trop fort pour en être dupe. En revanche, quand on n’y prête pas garde, il se manifeste là où on ne l’attend pas. Se situer et être fort, dans son milieu professionnel, intellectuel dans ses convictions politiques ou religieuses permet de ne pas en être dupe. J’essaie d’accepter les spectacles en fonction de ce qu’on me propose et non en fonction de ce que je souhaite. Mais je ne suis que ce que je suis.

Vous disiez que vous apparteniez à une minorité en quelque sorte au sein de la profession de critique. Quelle est la différence avec ceux sont majoritaires ?

Jean-Luc Jeener : La différence réside dans leur naïveté. Ils se laissent rouler par la mode, par les noms, par des trucs qui me font hurler de rire. Ils ont l’impression que les spectacles sont travaillés alors qu’il n’en est rien.

S’agit-il réellement de naïveté ou de complaisance voire de compromissions ?

Jean-Luc Jeener : Ils se laissent berner par le metteur en scène en vogue alors que c’est un incapable à qui on a donné beaucoup d’argent et qui cache son manque de talent par des moyens considérables. Moi, je sais.

Vous êtes également directeur d’une compagnie théâtrale. Pouvez-nous nous parler de la Compagnie de l’Elan que vous avez fondé à la fin des années 60 qui au début jouait des textes contemporains avant de s’attaquer aux classiques ?

Jean-Luc Jeener : Cette compagnie a été crée au lycée. J’ai toujours pensé que quand on est jeune on manque de maturité. Dieu sait que j’avais pourtant envie de monter les auteurs classiques. Ainsi je remercie le Ciel tous les jours de ne pas avoir monté Bérénice quand j’avais 18 ans ! Ce qui m’a permis de monter le plus beau spectacle de ma vie quand j’avais 40 ans. C’est la plus belle pièce du monde et à 18 ans je l’aurais gâchée ! Et je pensais qu’il était important de découvrir des auteurs contemporains. En découvrant des textes, on se fait un peu les dents.

Le problème est de savoir ce que l’on peut apporter de plus à des textes classiques qui ont été vus, revus, montés des centaines de fois. Quand on est metteur en scène, on se doit à l’œuvre que l’on monte, on doit lui apporter quelque chose de plus. Refaire ou recopier ce qui a été déjà fait ou utiliser une œuvre pour se faire valoir n’est pas bien. Et puis monter des œuvres contemporaines permet de faire découvrir des auteurs. Ainsi j’ai été le premier à monter Soyinka ..et j’espère que c’est grâce à moi qu’il a reçu le prix Nobel (sourire). Il est important de faire découvrir des auteurs. Et ainsi nous avions également une parole un peu nouvelle.

Et dès sa création vous saviez qu’elle perdurerait ?

Jean-Luc Jeener : Je voulais en faire mon métier et c’est la seule compagnie de cette époque qui existe encore aujourd’hui.

Quelle corrélation existe-t-il entre cette compagnie et le théâtre du Nord-Ouest à part le fait que vous en êtes le directeur ?

Jean-Luc Jeener : C’est très simple. Ma compagnie était indépendante et nous jouions dans tous les théâtres de Paris. Mais j’ai toujours eu envie d’être libre et cette liberté passait par les moyens de production et les moyens d’accueil. Donc j’ai dirigé pendant des années la Crypte Saint Agnès, puis de manière officieuse le Théâtre 13. Le théâtre du Nord-Ouest est un miracle.

Je cherchais un lieu et un spectateur voulait me rencontrer. Il m’a dit qu’il venait de faire fortune et qu’il souhaitait m’offrir un théâtre. Je lui ai fait part des réalités du métier et des pertes financières importantes qui l’attendait. Mais cela ne l’a pas découragé. Ensuite, deuxième miracle, j’ai rencontré le propriétaire de ce théâtre, un homme plein d’humour avec qui j’ai sympathisé, un homme de grandes qualités.

Le problème fut qu’à la veille de la signature du bail, mon milliardaire, ramené sans doute à la raison par son épouse plus persuasive que moi, s’est désisté. Le propriétaire m’a proposé de signer tout de même et pour trouver de l’argent j’ai fait une souscription avec les gens du métier que je connaissais, Yasmina Reza, Francis Huster, Laurent Terzieff qui m’ont aidé.

Mais vous percevez des subventions ?

Jean-Luc Jeener : Oui, 400 000 F de ma compagnie.

Mais vous n’avez pas de subvention de la ville de Paris?

Jean-Luc Jeener : Non. J’en ai eu mais je n’en ai plus. Le théâtre fonctionne avec 400 000 F et avec des dettes. Et puis, il y a parfois des miracles. Récemment j’ai été sauvé par un ami d’enfance, Vincent Bolloré, grâce à sa secrétaire qui est une spectatrice fidèle, qui a permis d’éviter la liquidation judiciaire. Je suis effaré mais il y a un désengagement des pouvoirs publics et les personnes qui pourraient et devraient venir nous voir pour dialoguer et nous aider ont des problématiques éloignées de l’art.

Vous avez récusé le terme de théâtre militant. Quel théâtre faites-vous ?

Jean-Luc Jeener : Si je faisais du théâtre militant comme je suis catholique je ne travaillerais qu’avec des catholiques, etc… Or je fais le contraire puisqu’ici travaillent des personnes qui ont des convictions radicalement différentes des miennes et cela ne me pose aucun problème. Je fais du théâtre militant au sens que c’est un théâtre où l’homme est au cœur du théâtre. Je fais un théâtre d’incarnation et non un théâtre de distance. Quand je monte un spectacle, par exemple Cyrano de Bergerac, j’essaie de faire en sorte que le comédien devienne Cyrano. Je n’essaie pas de réfléchir sur Cyrano. Aujourd’hui le théâtre c’est montrer, réfléchir sur. Et là se situe effectivement mon combat. Mais même ici parfois, j’accueille des spectacles de distance avec lesquels je ne suis pas en accord idéologiquement mais je trouve qu’il est bon de montrer quelques couleurs différentes d’autant qu’on fait un théâtre par thème. Mais personnellement je ne crois qu’au théâtre d’incarnation.

Tout le théâtre qui n’est pas d’incarnation est inutile ; c’est du spectacle qui ne présente aucun intérêt. Alors que le théâtre d’incarnation est le seul qui soit utile car on crève de ne plus rien comprendre à son frère humain et le lieu théâtre s’avère le seul lieu où on peut montrer l’homme à l’homme, l’homme dans sa globalité. Tous les autres arts n’en montrent qu’une partie. Ainsi là maintenant que nous parlons, il suffit que quelqu’un nous regarde et on est au théâtre. Mais je ne suis pas le théologien, le journaliste, tout en étant un peu de cela ainsi que le mari, le père de famille, celui qui a une âme immortelle – enfin je l’espère (sourire) - , je suis celui qui croit en Dieu mais aussi celui qui pèche…

Peut-on dire que vous faites un théâtre humaniste ?

Jean-Luc Jeener : Oui. L’homme est au cœur du théâtre.

Que pensez-vous de la place du théâtre dans la cité ?

Jean-Luc Jeener : La place du théâtre dans la cité est pour moi essentielle. Aujourd’hui, le théâtre n’occupe pas la place qu’il devrait. C’est symptomatique quand je vois ce qui s’est passé en Avignon où des comédiens ont osé ne pas jouer. Un comédien qui décide de ne pas jouer ne comprend rien à l’essentiel, à l’importance, à la gravité de son métier. Les problèmes d’argent ont pris le pas sur leur métier. C’est un peu comme si Chateaubriand s’était arrêté d’écrire pour embêter Napoléon. En fait, il a écrit trois fois plus. Si nous ne croyons plus en notre art …Moi, j’ai eu un problème avec les subventions, je n’ai pas fait la grève, j’ai écrit une pièce qui s’intitule Subvention. Je travaille et je dis avec mon instrument qui est mon métier.

Le problème des intermittents du spectacle est essentiel. Ils ont absolument raison mais l’instrument choisi qui était de ne pas jouer est scandaleux, ce qui fait que je ne discute même plus car on tombe dans l’horreur. C’est comme si Rubens avait pris un couteau pour déchirer ses toiles. Il s’agit d’un acte désespéré et c’est encore plus grave car c’est insulter la grève. La grève est une chose sérieuse que l’on ne doit utiliser que dans des cas très sérieux.

Comment travaillez-vous avec si peu de moyens financiers ?

Jean-Luc Jeener : Nous travaillons en participation. Nous nous partageons les recettes et cela est possible dans la mesure où il n’y a aucun frais fixes. Nous faisons tout nous mêmes. Il n’y a pas de caissier, il n’y a pas de régisseur, de standardiste. Je ne fais pas de publicité. Tout l’argent sert à payer les frais du théâtre et les comédiens. On se débrouille comme on peut, en trouvant des combines. Ainsi nous avons monté Cyrano de Bergerac c’est-à-dire 4 heures de spectacle avec 26 comédiens, 60 costumes qui coûterait 5 millions de francs dans un théâtre normal. Ici, cela a coûté 30 000 francs et encore ce qui a coûté le plus cher ce sont les épées car il faut éviter d’avoir des accidents.

Quelle devrait être l’implication des pouvoirs publics ?

Jean-Luc Jeener : S’ils jouaient leur rôle, ils devraient nous donner de quoi permettre de vivre, c’est-à-dire suffisamment pour qu’on ne ferme pas. Si nous avions 500 000 francs de plus, cela pourrait aller. Je suis pour que la subvention soit incitative. Or, il y a eu une époque où le montant des subventions était tel qu’il fallait trouver de quoi les utiliser. Il ne faut pas devenir des fonctionnaires car c’est un métier qui doit comporter une part de risque, une part de jeu. Sinon on s’endort, comme dans tous les métiers, mais c’est encore plus grave dans un métier artistique.

Et comment pourriez-vous agir pour obtenir à nouveau une subvention ?

Jean-Luc Jeener : Je fais tout ce qui est possible mais je ne peux pas passer ma vie dans les couloirs des ministères. Mon métier est de monter des spectacles. Et puis normalement je ne devrais pas avoir à quémander si la société était bien faite. Les politiques finissent par oublier qu’ils sont élus et que ce sont les citoyens qui paient. Et puis, il y a des choix drastiques à faire par exemple entre donner de l’argent à un hôpital ou à un théâtre.

Tout le système théâtral français directement ou indirectement est subventionné. Le problème est de savoir si seules les choses quantifiables comptent dans une cité ou si des choses qui n’ont pas d’économie peuvent y trouver une place. Ce qu’apporte le théâtre n’est pas une marchandise au sens économique. C’est un apport spirituel et culturel. Il faut réfléchir à ce qu’est une cité sans prêtre, sans artiste. Croire que l’artiste est un agent économique est faux. Nous sommes bien plus car nous transformons, changeons le monde car nous montrons l’homme à l’homme.

Le théâtre public est subventionné directement. Le théâtre privé est subventionné par le biais du fonds de soutien et ce d’une manière considérable. A chaque fois que vous avez une jeune troupe qui dit qu’elle ne touche pas de subvention, c’est erroné puisqu’elle ne pourrait pas vivre. Elle vit en vendant ses spectacles à une municipalité qui paie bien avec des fonds publics. Tout le système est subventionné et le problème des ASSEDIC c’est exactement cela. Ce que ne veut pas comprendre le gouvernement, ce que ne veulent pas comprendre les comédiens, et là je les renvoie dos à dos, c’est que les ASSEDIC constituent une subvention et une subvention essentielle car elle permet à l’artiste d’être véritablement libre. Elle permet de refuser de faire des choses avec lesquelles il n’est pas en accord artistiquement. Si on supprime cette subvention, on retire à l’artiste la possibilité de choisir librement et individuellement.

D’ailleurs, une société idéale étendrait le système des intermittents du spectacle à toute la communauté, pour tous les gens qui travailleraient. Ça serait beau. Le problème n’est pas tant le chômage que de perdre la vie à faire un métier qu’on n’aime pas. Ce système serait magnifique à condition que tout citoyen qui travaille sache qu’il est au service de la communauté. Il donne et il reçoit. Mais ce discours n’est plus majoritaire aujourd’hui. Je serais traité d’utopiste, d’angéliste, presque de chrétien, insulte suprême (rires).

Votre compagnie se compose de combien de membres ?

Jean-Luc Jeener : Actuellement, il y 25O personnes qui travaillent au sein du théâtre. Et puis on engage des gens de l’extérieur.

Vous avez indiqué qu’il vous arrivait d’héberger des spectacles qui n’appartenaient pas au même registre que les vôtres. Quelle en est la raison ?

Jean-Luc Jeener : Il y a plusieurs raisons. D’une part, la programmation du théâtre du Nord-Ouest se fait par thème : 6 mois autour d’un thème et 6 mois autour d’un auteur. Par exemple, Claudel a écrit des pièces d’incarnation et des pièces qui sont parfaitement des pièces de distance. Donc pour ces dernières, j’ai fait appel à des personnes de l’extérieur puisqu’il ne s’agissait pas de pièces qui m’intéressaient personnellement. Il en va de même pour les textes contemporains retenus pour le thème qui peuvent ne pas être du théâtre d’incarnation et qui sont passionnants car ils font réfléchir. Pour moi ce n’est pas du théâtre mais c’est aussi important qu’un livre.

La deuxième raison, qui est un peu moins avouable mais qui existe, est qu’il est tellement difficile de trouver des théâtres. Et il m’est difficile de dire non à des gens qui viennent me voir avec des projets car nous savons combien il est difficile de les concrétiser. J’essaie de les influencer pour les amener à faire du théâtre d’incarnation. Ils me font oui du bout des lèvres mais je ne suis pas dupe. Je fais semblant d’être un peu surpris et déçu après.

Comment procédez-vous en termes de choix pour boucler votre programmation ?

Jean-Luc Jeener : Politiquement, je ne crois qu’au tyran juste. Et ici, au théâtre du Nord-Ouest ? Je suis le tyran juste. Il y a une personne qui décide, c’est moi. Donc c’est moi qui définit les critères de choix. C’est aussi simple que cela. Je privilégie de monter des auteurs d’incarnation tels que Claudel, Hugo, Musset, Racine, Molière, Corneille, Tchekov. Les thèmes sont ceux qui me préoccupent et souvent autour de la spiritualité. L’année prochaine, il y aura un thème autour de la politique. Mais je ne sais pas encore comment cela sera orienté. En ce moment, c’est la mort et le passage qui permet de réfléchir sur la vie éternelle, de pouvoir lire les textes sacrés. Normalement , mais il y a quand même un problème de niveau de culture et notamment de culture religieuse, on aurait dû me proposer une lecture de la Bhagavat Gita, du Livre des morts tibétains…etc.

Et la programmation n’est pas établie très à l’avance puisque vous n’avez pas encore bouclé celle de 2005 ?

Jean-Luc Jeener : Non. Je sais ce que je vais faire pour 2005 si Dieu prête vie à ce théâtre mais pas plus loin. J’ai des idées. J’adore Marivaux, Montherlant, Shakespeare... mais il est clair que je ne ferais pas une année Genet.

Et techniquement, cela se passe comment ?

Jean-Luc Jeener : Et bien voilà, regardez ! (ndlr : il nous désigne un carton rempli de feuilles, de cahiers). Je prépare un festival Feydeau. Tout le monde le sait et toutes les propositions, tous les projets que je reçois sont là. Je vais tout dépouiller.

Donc le programme à venir ?

Jean-Luc Jeener : En juin, c’est Feydeau puis en janvier un thème autour de la politique si je peux. Car ici, le théâtre est confronté à de terribles problèmes d’argent, et des problèmes violents. Donc à la grâce du Seigneur !

Dans le programme en cours, que recommanderiez-vous à ceux qui ne peuvent pas venir voir tous les spectacles ?

Jean-Luc Jeener : Cyrano bien sûr car vous ne reverrez jamais Cyrano comme cela. Pas parce que je l’ai monté mais parce que c’est formidable de voir 30 comédiens dans un spectacle profond. Il ne faut pas rater non plus Le partage de midi.

Parmi les pièces qui vous intéressent, y en a-t-il que vous ne monterez pas dès lors qu’elles on déjà été superbement mise en scène par d’autres ?

Jean-Luc Jeener : Je vais vous faire une réponse prétentieuse : Non. Maintenant que je connais mon métier, j’essaierai de monter les pièces qui m’intéressent.

Quelles sont celles qui figurent dans vos projets à court terme ?

Jean-Luc Jeener : Un dernier chef d’œuvre que je n’ai pas monté, car j’en ai monté beaucoup de ceux qui me tenaient à coeur, c’est Le mariage de Figaro de Beaumarchais. C’est une des œuvres les plus parfaites qui existent au monde. Si Dieu me prête vie, je le ferais.

L’alternance est-elle une condition de survie de ce théâtre ?

Jean-Luc Jeener : Quand l’événement vous dépasse, feignez d’en être l’organisateur, disait Cocteau. J’ai essayé de déterminer la manière de procéder la plus intelligente dans les conditions dans lesquelles nous sommes. L’alternance est formidable car elle permet aux comédiens, qui ne peuvent pas vivre uniquement avec les recettes de ce théâtre, de travailler ailleurs et avec d’autres gens et donc de choisir d’être ici. Et quand ils choisissent d’être ici cela est très sérieux. Cela veut dire qu’ils se sont engagés à jouer ce jour là ici et même si la MGM leur fait une proposition, ils ne peuvent pas l’accepter. Le spectacle programmé c’est comme la messe. On peut s’arranger jusqu’à la dernière seconde mais après on s’engage et on s’engage individuellement mais également envers d’autres personnes. On ne peut travailler ici que si on est adulte, libre, responsable.

L’artiste devient producteur, sans cigares ni gros chapeaux comme dans les pièces de Brecht, mais nous avons quelque chose que personne ne peut nous ôter c’est notre force de travail qui remplace l’argent. Personne ici n’a de fortune personnelle, moi je n’ai que des dettes, mais personne ne m’a retiré ma force de travail qui est encore immense. Je ne sais pas ce qu’elle deviendra. C’est cette force de travail qui constitue notre capital. Et ça fonctionne. Je n’ai jamais un problème. J’ai fait travailler 1 000 comédiens et je n’ai jamais signé un contrat. On se tape dans la main. Et personne ne trahit la parole ainsi donnée. Il n’y a rien d’idéal. Mais on parle, on discute. Les comédiens qui jouent ici ont choisi en connaissance de cause. Je comprends très bien que certains comédiens ne veulent pas venir jouer ici parce que tout travail mérite salaire. Il s’agit d’un discours d’esclave mais je le comprends. Ici, il n’y a pas de patron mais en revanche il y a un garant de cet esprit, le tyran juste.

Je reviens vers le carton qui contient tous les projets qui vous sont proposés pour la prochaine programmation. Tout traiter doit demander un travail colossal ?

Jean-Luc Jeener : C’est monstrueux. Ma femme n’est pas très contente mais elle serait encore moins contente si on perdait le théâtre.

Votre femme travaille également ici ?

Jean-Luc Jeener : Elle est professeur de philo mais elle a monté des spectacles ici, notamment le plus beau spectacle qui se joue en ce moment Le partage de midi de Claudel. Elle a beaucoup de talent. (ndlr : Laurence Hétier). Mais c’est très difficile et la vie personnelle en prend un coup, surtout la vie familiale d’autant que j’ai une fille de 5 ans.

Vous êtes auteur, metteur en scène et également acteur. Comment cela se combine-t-il ?

Jean-Luc Jeener : Je ne joue jamais dans les pièces dont j’assure la mise en scène. Et quand je suis acteur, je n’ouvre pas la bouche. Dans ma pièce Subvention qu’Yvan Garouel a mis en scène, je me suis conduis comme j’aime que les comédiens se conduisent avec moi. Ainsi dans Théâtre monté par Carlotta Clerici. Je ne me mêle pas de la mise en scène. C’est un excellent metteur en scène. Elle fait un travail impeccable et moi je fais humblement mon travail de comédien. Les approches sont très différentes. Devenir un personnage et aider un comédien à devenir un personnage sont deux choses différentes. Les metteurs en scène qui également jouent sont des incompétents. Ils font de l’illustration scénique sans savoir ce qu’est le travail de fond pour passer 3 heures sur une phrase pour en trouver tous les sens, amener progressivement le comédien à s’approprier le verbe pour qu’il devienne le sien.

Comment cela se passe-t-il quand vous avez un metteur en scène qui ne remplit pas son rôle ?

Jean-Luc Jeener : Je suis présent à la première de chaque spectacle et il y a un passage obligé dans ce bureau après la représentation. Je ne dis pas un mot aux comédiens mais je parle avec le metteur en scène et je lui dis le plus honnêtement possible ce que j’ai pensé du spectacle que ce soit en bien ou en mal. Et quelquefois je suis très dur. Et quelquefois je suis très ravi. Mais cela pour éviter toutes les hypocrisies. Les comédiens ne sont pas informés de ce que j’en ai pensé.

Mais le spectacle qui vous a déplu continue à être programmé ?

Jean-Luc Jeener : Oui, il y a des spectacles extrêmement mauvais qui continuent d’être joués. Je me suis engagé… avant. Je n’avais qu’à pas me tromper avant. Et puis ce n’est pas un problème de goût parce que des spectateurs peuvent trouver formidables des pièces que je trouve nulles.

Il n’y a donc pas de corrélation entre les recettes et la qualité du spectacle ?

Jean-Luc Jeener : Offffff…Croire que les meilleurs spectacles seraient ceux que préfèrent les spectateurs est complètement faux. On a beau les éduquer…Mais vous savez il y a des gens qui trouvent Guy des Cars formidable et qui seraient incapables de lire Stendhal. C’est une question de culture. Mais il faut parfois passer par Guy des Cars pour arriver à Stendhal. Je ne porte aucun jugement. Quand j’étais petit je lisais des bandes dessinées. Plus maintenant. Certains diront que j’ai tort car les bandes dessinées sont peut être mieux. Moi je ne le crois pas.

La bande dessinée peut néanmoins être incluse dans la culture…

Jean-Luc Jeener : Il y a des œuvres qui sont beaucoup plus nourries que d’autres comme il y a des êtres qui sont plus nourris, plus habités que d’autres. Les gens quand ils préfèrent Guy des Cars, c’est par paresse, par ignorance, par inculture. Il en va de même pour les spectacles. Mes spectacles sont travaillés, réfléchis, pensés. On peut aimer ou non mais rien ne m’a échappé, on a tout visité. C’est nourri. Moi je vois les spectacles qui ne sont pas travaillés, ou du moins pas assez travaillés. Pour moi ça se voit, pas pour le commun des mortels.

Vous a-t-on proposé de monter des pièces dans d’autres théâtres ? Et acceptez-vous ?

Jean-Luc Jeener : Oui, cela est arrivé et j’accepte quand je peux. Au contraire, il ne faut pas se laisser coincer. Mais maintenant je reçois moins de proposition de ce genre car les gens pensent qu’on ne travaille qu’ici. C’est d’ailleurs un problème pour les comédiens qui jouent ici.

Vous êtes dans ce théâtre, vous jouez et vous allez encore au théâtre pour votre métier.

Jean-Luc Jeener : Je vais au théâtre quasiment tous les soirs.

Pouvez-vous citer quelques spectacles que vous avez appréciés ?

Jean-Luc Jeener : L’amour est enfant de salaud d'Alan Ayckbourn, Détournement de mémoires de Pierre Richard, La panne de Friedrich Durrenmatt

Etes-vous allé voir ou irez-vous voir La danse de mort de Strindberg ?

Jean-Luc Jeener : Non, parce que je déteste cette pièce. En plus, pour ce genre de spectacles, mes collègues critiques y vont tout de suite. Pour ma part, j’essaie d’aller voir d’autres spectacles dont on parle le moins. J’ai une dimension missionnaire. Le snobisme des critiques…

Quelle est la raison de ce snobisme ?

Jean-Luc Jeener : Parce que c’est plus rigolo de parler d’une chose que tout le monde a vu.

Vous avez utilisé le terme missionnaire. Vous pensez être un missionnaire ?

Jean-Luc Jeener : Oui, tout à fait ! Totalement ! Et je le revendique. Parce que je pense que ce que je fais est important pour la société et pour l’humanité.

Ainsi dit ex abrupto, cela peut paraître très prétentieux ?

Jean-Luc Jeener : C’est extrêmement prétentieux mais je pense que tous les hommes sur cette terre devraient prétentieux comme ça. Ce que je pense de moi, tout le monde devrait le penser pour ce qu’il fait. Cela permettrait au monde d’évoluer. Si je pensais faire du mal à la société ou à mon frère, je ne le ferais pas. Je ne fais pas de mauvaise action volontairement. Si j’en faisais, je rougirais, je n’arriverais plus à dormir. Le matin on se lève en se disant qu’on va faire du bien et puis le soir on n’a fait que du mal parce qu’on a blessé quelqu’un. J’essaie.

Quand je monte des spectacles j’essaie d’apporter quelque chose d’important au spectateur et je crois qu’il n’y a rien de plus important que de montrer l’homme à l’homme. C’est ma mission. Pourquoi ? Parce que l’on vit dans une société qui se déshumanise. Si vous voyez un clochard sur un banc vous vous assiérez à dix mètres. Là, au théâtre, si je mets un clochard sur le plateau, les gens paient leur pour voir ce clochard vivre et agir. Ils sont à un mètre, ils ne fuient pas, ils ont payé pour le regarder et vont s’apercevoir que c’est un homme comme eux. Si je montre un assassin, ils verront aussi un homme. Nous avons en nous le possible d’un assassin, d’un clochard et cela relativise un certain nombre de choses.

J’ai regardé une émission où on parlait du crime passionnel et on constatait que la justice se durcissait quant à la lourdeur de la peine. Quand on a aimé passionnément, tuer est dans le possible de l’homme. Il faut donc peut être un peu plus réfléchir avant de l’envoyer pour dix ans dans une prison, savoir que c’est aussi un peu soi qu’on enferme. Il ne faut pas faire à l’autre ce qu’on n’aimerait pas qu’on nous fasse. La justice n’est qu’un exemple. Un autre cas, si on est timide on peut rater une grande histoire d’amour à cause de sa timidité. Si je montre un timide, cela permettra peut être au timide de démonter le mécanisme de sa timidité et de prendre la main de la dame ou du monsieur qu’on aime et que cela changera toute sa vie. Je montre comment l’homme est fait.

Alors bien sûr c’est idéologique. Cela veut dire que nous sommes tous fils, que tous les hommes se ressemblent, tous sont frères, qu’il y a un père etc… Il y a des gens qui ne croient pas cela, en cette généralité. Quand je travaille avec un comédien, nous partons de toute mon expérience et de la sienne pour faire un être utile au spectateur et lui permettre de retrouver des choses qu’il a vécues sans le prisme trompeur de l’image, du cinéma qui fait que ce n’est pas vrai. Au théâtre c’est vrai.

Avec le recul, pensez-vous avoir failli à votre mission ?

Jean-Luc Jeener : Je suis l’homme le plus prétentieux du monde mais je crois que j’ai absolument fait tout ce que je devais faire. Je peux mourir demain et je mourrais avec l’esprit tranquille et fier de ma vie. Je suis tout à fait fier de ce que j’ai fait et si je devais revivre je signerais tout de suite pour revivre exactement la même vie, sans rien y changer.

 
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