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Sad songs for ordinary happiness  (Katatak Records)  janvier 2010

J'ai toujours été un musicien. Je n'ai jamais véritablement joué de musique, pourtant. Mais dès les premiers pas de mon adolescence et peut-être même, quoique confusément, déjà avant, je me suis senti de toute évidence appartenir à ce monde, lié par l'âme, le sang, la soif d'émotions, à ceux qui pleurent, solitaires, courbés sur des instruments plus bavards qu'eux. Puis j'ai découvert que l'on pouvait rire ou exploser, aussi, en musique ; discourir, décrire, évoquer, s'amuser, aimer, explorer, supposer, contester, invoquer, dénoncer, inventer, détruire, poétiser, mourir... Toute une vie en un peuple de verbes d'actions à mettre en notes et en refrains.

Toujours, j'ai été attiré, quand je n'en étais pas jaloux, par ceux qui jouaient d'un instrument, fût-ce de leur voix – longtemps, ceux-là m'étaient plus facilement tolérables, parce qu'ils me semblaient en quelque sorte intermédiaires entre le joueur d'instrument et l'homme atone ; jusqu'à ce qu'ils me deviennent plus insupportables encore, eux qui avaient réussi à accueillir en eux la musique même, à la faire part de leur corps d'une façon qui continuera toujours à excéder mes capacités. Chaque pas de ma vie semble avoir tourné autour de la musique. Je dois tenir cela de la tante Ursule, avec qui j'ai passé tant de temps, les yeux grands ouverts à l'écouter rêver à voix haute de ses heures passées au cœur même de la musique, ses lieux, ses noms, son histoire.

D'Ursule, j'ai hérité l'amour des musiciens derrière les notes, le goût des histoires en minuscule et au singulier, chaque fois. Le goût d'être là, au milieu des choses, quand elles s'écrivent, avec leurs ratures, leurs notes marginales. L'idée qu'avant de se vendre, de se mettre en conserve pour qu'on puisse l'emporter partout avec soi, la musique se joue. Qu'il y a une vie, une vie de musicien, une vie à vivre, quand bien même on ne jouerait pas : ses heures, ses endroits, ses envers, revers, rêves, fièvres – son mode de vie. J'ai aussi hérité le goût de me coucher tard, le besoin de chercher à partager ce qu'elle fait en moi, cette musique, en sachant que je n'y parviendrai pas, jamais, en aucun façon – de toute nécessité.

C'est tout cela que l'on doit trouver dans un disque : l'impossibilité de dire (je veux dire : il doit y avoir une nécessité de jouer, un impératif de l'expressivité), l'impossibilité de dormir, le sentiment d'être là (pas juste à côté, pas après – il n'est jamais trop tard), de vivre. Les traces d'une vie, d'une histoire, qui doivent avoir quelque chose d'authentique. Rien de plus terrible que le disque d'appliqués imitateurs / suiveurs / copieurs dont la seule inspiration se résume à décliner selon de mornes règles le génie d'un modèle mis en recette, en équations – la musique technicienne est à mourir, tout simplement.

On me pardonnera alors mon faible pour Cabwaylingo – il n'y a rien d'ailleurs à pardonner, je ne prétends pas juger impartialement d'un disque ; j'entends, c'est déjà bien, échouer à communiquer ce pour quoi je peux l'aimer ; échouer mais avec juste assez d'éclat pour donner envie à qui me lira de s'y aller divertir.

J'ai rencontré Cabwaylingo il y a quelques années, quand Julien Cardaillac officiait encore en solo, à la guitare et tout aux tripes, le chant branché directement sur l'âme ébréchée. C'était une première partie de Jack The Ripper, à Marseille, et j'étais resté, comme toute la salle, ébahi par la prestation et le charisme de l'homme. Quelques temps plus tard, Julien s'est relocalisé à Toulouse et s'est trouvé un acolyte en la personne du batteur Frédéric Benazeth.

J'ai vécu, de mon côté, d'autres histoires, mais dans ma bande originale personnelle, il y avait un peu de cette rencontre, quelque chose des deux premiers mini-CDs qu'il m'avait expédié et sur lesquels je n'avais jamais écrit, tristement, faute de savoir assez bien manier le verbe pour en dire quelque chose qui vaille, quelque chose qui puisse donner envie d'écouter ; quelque chose qui rende la grandeur de ces tout petits disques (3 pouces), la superbe de ces compositions sobres, leur altesse. Dans l'original motion picture soundtrack de ma vie, il y aura toujours, je me souviens, ce Old friend of mine impérial.

Voilà maintenant que Cabwaylingo, version duo, sort un nouvel album, toujours épaulé par Katatak, le label-compagnon des premières heures : Sad songs for ordinary happiness. Chansons tristes – toute une tradition de musiciens écorchés se bouscule dans un titre comme celui-là, Leonard Cohen et Nick Cave en tête – quelque chose de chaleureux et de grinçant à la fois. La fièvre rock d'un blues lent vaudou blanc, peut-être, Chris Cornell aux chœurs ?

L'album est réalisé par Arno Massé, grand activiste de la scène toulousaine. Il a été enregistré, surtout, dans les conditions du live. Ça doit sentir la vie, ce rock-là, il n'y a pas le choix.

La voix de Julien a gagné en puissance, en une certaine virilité un peu rauque qui ne lui va pas si mal. L'ajout de la batterie apporte une nouvelle couleur à tout ça. Plutôt une palette de nuances supplémentaires. On retrouve quelques titres anciens dans une version nouvelle (Note : l'idée va tellement de soi que l'on regrettera que seuls les groupes "débutants" se permettent de l'exploiter : un morceau pourrait changer de peau d'un disque à l'autre, sans avoir à attendre l'happening d'un concert, l'évènement d'un live) : "Old friend", au titre ainsi raccourci et qui gagne quelque chose de plus direct et ne perd en tension que pour gagner en solidité ; "Freeze the line" et "Lullabye to nobody", aussi, également issus du premier mini (Katatak Records, février 2006) ; "So tired", issu du second mini (Katatak Records, janvier 2007).

On découvre surtout les nouvelles compositions, parmi lesquelles "1 a.m dead middle of the night" et "Superhero" s'imposent comme déjà essentielles. D'autres compositions permettent également au duo d'explorer des pistes à peine moins écorchées, un soupçon de légèreté, un souffle de vent tiède sur des plaies cicatrisées. "Fragile", s'essaie, avec beaucoup de succès, au chant francophone. La voix rappellera alors celle de Novö, autre formation toulousaine parfaitement recommandable, ou de Thomas Méry (rien de moins !), quand il officiait au sein de Purr. On goûte, encore, à l'art de prendre son temps dans le rock, que cultive à merveille Cabwaylingo.

Les chansons tristes d'une bonheur ordinaire – de quoi ravir, au quotidien, nos oreilles avides de musiques. Un bel album à vivre, qui fonctionne sur l'évidence simple d'émotions qui ne se laissent bien dire qu'en musique.

 

A lire aussi sur Froggy's Delight :

Cabwaylingo en concert au Poste à Galène (19 mai 2006)

En savoir plus :
Le site officiel de Cabwaylingo
Le Myspace de Cabwaylingo


Cédric Chort         
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# 8 septembre 2019 : du nouveau à l'Horizon

Beaucoup de belles choses en cette rentrée que ce soit sur le plan musical, théâtral, littéraire ou cinématographique. On vous en parle sans plus attendre dans cette nouvelle édition de Froggy's Delight. En route.

Du côté de la musique :

"L'horizon" de Manu
"Twelve nudes" de Ezra Furman
"Spleen 1" de Fleur du Mal, chronique assortie d'un entretien
Rencontre avec Le Flegmatic autour de son nouvel album "Ruine nouvelles" Le Flegmatic
"Echoplain Ep" de Echoplain
"Michel on my mind - Tribute to Michel Petrucciani" de Laurent Coulondre
Nous étions au Check In Party à Guéret et on vous dit tout : Jeudi avec Patti Smith, Prince Miiaou, Jeanne Added...
Vendredi avec Puts Marie, Slaves, Lysistrata, Gogol Bordello...
et le Samedi en compagnie de Deerhunter, Balthazar, Oh Sees...
et toujours :
"Debussy complete piano works" de Aldo Ciccolini
Retour sur la Route du Rock :
Jeudi avec Fontaines DC, Stereolab, Idles, Tame Impala...
Vendredi avec White Fence, 2 many Dj's, Hot Chip ...
Samedi avec Deerhunter, Metronomy, Oktober Lieber...
Toutes les photos par Jasmina sont ici
Pourquoi aller à la rRceci pour le savoir
"Ruine nouvelles" Le Flegmatic
"We are not your kind" de Slipknot
"Unis vers" de Mathias Lévy
"This is not a safe place" de Ride
"Bulle" de Théo Girard Quartet

Au théâtre :

les nouveautés avec :
"Le Cours classique" au Théâtre du Rond-Point
"Nuit gravement au salut" au Théâtre Lucernaire
"Bar" au Théâtre Essaion
"Melone Blu" au Théâtre 13/Seine
"Strip-tease 419" au Théâtre de Belleville
"Le Mont Analogue" au Théâtre La Reine Blanche
"Comme un roman" au Théâtre Essaion
"Les Carnets d'Albert Camus" au Théâtre Le Lucernaire
"Le Testament de Vanda" au Théâtre Les Déchargeurs
"Je ne suis pas Michel Bouquet" au Théâtre de Poche-Montparnasse
"Tant qu'il y aura des coquelicots" au Théâtre Essaion
des reprises
"Galilée le mécano" au Théâtre La Reine Blanche
"Le Double" au Théâtre Le Ranelagh
"Huis-Clos" à la Comédie Saint-Michel
"Céline, derniers entretiens" au Théâtre de Poche-Montparnasse
"Racine par la racine" au Théâtre Essaion
et la chronique des spectacles à l'affiche en septembre

Expositions avec :

dernière ligne droite pour "Paris romantique" au Petit Palais

Cinéma avec :

"Tu mérites un amour" de Hafsia Herzi
"Music of my life" de Gurinder Chadha
"Une joie secrète" de Jérôme Cassou
et la chronique des films à l'affiche en septembre

Lecture avec :

"Autoportrait d'une vie heureuse" de Ingo Schulze
"Conversations entre amis" de Sally Rooney
"Le dernier grenadier du monde" de Bakhtiar Ali
"Le siècle des dictateurs" Sous la direction d'Olivier Guez
"Les opérations extraordinaires de la seconde guerre mondiale" de Claude Quétel
"Les réfugiés" de Viet Thanh Nguyen
et toujours :
"Tempête pour les morts et les vivants" de Charles Bukowski
"Zébu boy" de Aurélie Champagne
"Tous les enfants dispersés" de Beata Umubyeyi Mairesse
"Mon territoire" de Tess Sharpe
"Ici tout est encore possible" de Gianna Molinari
"Dégels" de Julia Phillips
"De l'autre côté, la vie volée" de Aroa Moreno Duran

Bonne lecture, bonne culture, et à la semaine prochaine.

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