Bien qu'elle soit déjà à la tête de quelques albums, je dois bien avouer que je n'avais jamais entendu parler d'Erin McKeown, jeune auteure compositrice et interprète. Pour faire court et branché, c'est donc une songwriter américaine qui sort donc avec Hundreds of Lions son nouvel album studio.

Et quand on dit studio, c'est plutôt d'une ferme dont on devrait parler puisque la petite histoire raconte que c'est en totale indépendance dans une maison isolée à la campagne, accompagnée de Sam Kassirer son producteur que Erin McKeown a pris le temps de composer, arranger et jouer cet album avant de le proposer à son nouveau label.

Sans contrainte de la part du label avec lequel elle n'avait à l'époque pas encore signé, Erin et Sam se sont donné le temps de faire les choses : jouer avec les compositions, les arrangements, ajoutant aux pianos et guitares quelques sons synthétiques, cordes, cuivres ou bois, aussi discrets qu'élégants pour façonner un album artisanalement. Non pas en bricoleurs mais en ouvriers qualifiés, sorte de Compagnon cherchant à réaliser son chef d'oeuvre. Lentement mais sûrement, ne laissant rien au hasard tout en conservant l'émotion des compositions, le duo a su faire la part des choses entre une production léchée et des chansons qui vont droit au coeur. Pas de prouesse technique évidente ici, mais un travail en finesse qui renforce la voix de McKeown et loin de l'enfermer dans un écrin inaccessible la rend étonnamment proche et touchante.

Quoi qu'il en soit, une fois le disque prêt, c'est sur Righteous Babe qu'Erin McKeown a trouvé refuge. Pas par hasard puisque la célèbre patronne du label, Ani Di Franco, connait bien Erin McKeown et que leur musique n'est pas très éloignée l'une de l'autre.
Tout au long de ce disque, on ne manquera pas de penser à Ani Di Franco bien entendu mais c'est un autre nom qui me vient à l'esprit, celui de l'oubliée Brenda Khan, auteure notamment des superbes Epiphany In Brooklyn et Outside the beauty salon. Une autre jolie brune dont la voix et les mélodies pop folk avaient su à l'époque nous charmer.

Et la musique, tout au long de ces 11 titres saura nous charmer, nous émouvoir, nous faire danser, entre la douceur et l'élégance d'une folk à tendance pop ("The Boats") et l'énergie, très canalisée d'un rock bon ton ("The Lions"), qui donne envie de taper dans les mains sans pour autant vouloir pogoter sur les pieds de son prochain.

Tout commence sur "To a hammer", ressemblant à une musique de chambre à la sauce pop qui n'est pas sans rappeler deux groupes hexagonaux, FM et Revolver. Le piano s'invite ensuite sur "Santa Cruz" et sera d'ailleurs présent sur bon nombre de titres, comme sur les très addictifs et guillerets "The Foxes" et "The Rascal". Et puis il faut forcément parler de "(Put the fun back in) The Funeral", chanson centrale du disque et, comme dirait Bernard Lenoir, morceau de bravoure de McKeown. Cette ballade folk, sombre et minimaliste met en valeur la superbe voix de Erin McKeown et ne manquera pas de vous faire frissonner. "Seamless" qui termine le disque lui répond de fort belle façon, les murmures sensuels de la chanteuse finissant de nous faire craquer pour ce Hundreds of Lions, brillamment domptés, sans fouet et sans heurt mais avec beaucoup de classe.