Nonchalance et cynisme n'ont jamais fait aussi bon ménage qu'au travers des albums de Bertrand Louis.
Ce quatrième album continue dans la lignée de la vision critique de Bertrand Louis du monde qui nous entoure, particulièrement en milieu urbain et hautement mercantile.
On se rappelle bien entendu "Slogan" puis "Slogan 2" sur ses deux premiers albums qui mettaient en chanson des slogans publicitaires. Sur Le Centre Commercial, Bertrand Louis va plus loin en proposant une sorte d'album concept autour de la société de consommation. Facile, me direz-vous, ce n'est pas le premier, ni le dernier à le faire. Certes, mais lorsqu'on y ajoute le recul nécessaire pour lire entre les lignes l'humour et le cynisme que déjà dégagent ses textes, on se dit que le point de vue est plutôt original et le parti pris plutôt osé.
Car l'histoire n'est pas celle d'un banal centre commercial, c'est plutôt celle que pourrait vivre chacun de nous d'un côté ou de l'autre du mirroir.
L'histoire d'une société de toutes les consommations, de l'esprit de compétition, de réussite et de beauté de papier glacé.
Glacé comme le coeur du personnage principal qui s'en prendra à cette "Putain publicitaire" qui veut tout nous vendre avec son corps trop parfait et qui finira attachée au radiateur dans une "Scène de crime" qui ne manquera pas d'apporter le tant desiré quart d'heure de gloire médiatique à son bourreau.
Bourreau au bout du rouleau, abruti par la television dont le "20h" est le clou du spectacle avec ses nouvelles sensationnelles sur la mort et la misère. Évidemment tout cela finira mal, dans le centre commercial.
Musicalement, Le centre commercial est aussi abouti que son texte, le rock nonchalant de Bertrand Louis, toujours entre deux eaux, fait des merveilles tout comme son chant qui ne cesse de progresser et colle parfaitement à l'ambiance à la fois glauque et distante du texte.
On pense bien entendu aux histoires de Florent Marchet et Arnaud Cathrine pour l'histoire ancrée dans notre société et montrant ses travers, mais aussi à un improbable mélange de Katerine et Jean-Louis Murat ("On n'est pas à l'abri d'un succès").
Une réussite assurément pour un artiste atypique de la chanson française qui avoue caresser le rêve de composer un jour un album avec un humour à la Desproges, et on y est presque ! |