Textes dits par Damien Houssier.
Dans le cadre des créations de la Compagnie 36 Eleusis qu'il a créée avec un homologue de promotion du CNSAD, Maxime Kernazet, Damien Houssier donne corps, à travers un croisement de paroles, à un parricide, Pierre Rivière.
Le triple meurtre commis par celui-ci a défrayé la chronique au début du 19ème siècle puis, un siècle plus tard, au début des années 70, lors de la publication de "Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma soeur et mon frère...", ouvrage collectif de chercheurs au Collège de France publié dans le cadre d'un cours consacré à l’histoire des rapports entre psychiatrie et justice pénale dispensé par le philosophe Michel Foucault, ardent critique des institutions sociales, lui-même se déclarant "subjugué par le parricide aux yeux roux".
En 1835, un jeune paysan, n'épargnant que son père, commet un meurtre familial qui, en raison de la dichotomie existant entre le portrait type du criminel rural de cette époque - idiot, cruel envers les animaux, solitaire et agité d'une crainte exacerbée du démon - qu'on lui accole et la teneur du mémoire-récit rédigé en prison qui révèle un individu lucide et revendiquant l'acte prémédité qu'il a commis, suscite perplexité et polémique.
Les extraits de textes choisis, qui émanent d'auteurs différents dont le principal protagoniste, mettent en lumière la problématique de l'origine du meurtre, entre le mobile et la cause, qui annonce et résume toute la réflexion contemporaine qui se trouve à une croisée multidisciplinaire entre justice, criminologie, sociologie, philosophie et psychiatrie. Du monstre rêvant de gloire au criminel engendré par la famille pathogène et/ou l'anomie sociétale, folie atavique due à la consanguinité, monomanie mystique, meurtre comme prise de parole ou psychose pubertaire, toutes les pistes sont évoquées.
Dans une scénographie originale, qui commence par un homme nu dans un aquarium géant, comme un phénomène dans une éprouvette, sous les lumières crues et blanches de Karl Francisco, Damien Houssier, remarqué dès les représentations publiques dispensées au CNSAD, excelle dans l'interprétation des personnages fiévreux et ambigus à la personnalité polymorphe tels Ravachol et Philoctète qu'il a interprété sous la direction de Patrick Zuzalla à la Maison de la Poésie ou même dans le rôle du fils infirme dévoré par la jalousie dans "Vassa 1910" de Gorki mise en scène par Gilberte Tsaï.
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