Le Musée des Impressionnismes de Giverny présente une remarquable exposition monographique consacrée à Maximilien Luce, une des figures du néo-impressionnisme méconnue du grand public et éclipsée par des noms devenus illustres tels Seurat, Pissaro ou Signac.
Signac qui fut son premier "client" en lui achetant un de ses premiers tableaux exposés en 1887 au Salon des Artistes Indépendants et qui y décela un peintre prêt à aborder la technique du divisionnisme.
L'exposition conçue par Marina Ferretti Bocquillon, directeur scientifique-conservateur du musée, forte d'un florilège de près de cent pièces, peintures, dessins et documents, et présentée dans un parcours chrono-thématique revêt le caractère d'une exceptionnelle rétrospective d'une oeuvre abondante et foisonnante d'un peintre qui fut un homme résolument humaniste et investi dans son temps.
Maximilien Luce, du néo-impressionnisme au pré-fauvisme, un peintre humaniste
Si elle privilégie quatre axes, le peintre néo-impressionniste, le chantre du Pays noir, les constructeurs et le peintre d'histoire, l'exposition rend compte de manière exhaustive de la diversité de registre et de palette dont a usé l'artiste tout au long d'une carrière d'un demi-siècle.
Fort d'une solide formation d'artisan-graveur qui impliquait l'art du dessin, il s'avère un brillant portraitiste et se distingue dans les scènes de la vie quotidienne des ouvriers.
Car natif de Paris et d'origine ouvrière, il se préoccupe essentiellement de l'homme de condition modeste et de la nouvelle catégorie sociale, le prolétariat née avec le siècle de l'industrialisation.
Car témoin et un acteur de son temps, Maximilien Luce, peintre de la réalité sociale et de la nature, affichiste engagé, grand illustrateur et homme militant de la cause anarchiste, est un peintre de tempérament plus que de salon qui s'affranchit des contraintes du pointillisme et de ses "aveuglantes averses de confettis multicolores" pour privilégier une touche plus virulente.
Ainsi, de nombreux tableaux saisissent sur le vif des ouvriers au travail.
Luce est proche des futuristes avec ses toiles d'un réalisme lyrique sur le développement industriel avec les scènes d'usines, de fonderies et de forges et notamment la série réalisée dans le Borinage belge.
Prônant l'avènement d'une esthétique révolutionnaire, il annonce le réalisme constructiviste avec ses tableaux sur les grands chantiers de construction parisiens qui glorifient le travail et exaltent la figure ouvrière même si dans ses travaux d'illustrateur il dénonce le drame social.
Quand il aborde la peinture d'histoire, ce sont encore les obscurs, les petits, les sans grade, victimes de la Commune ou soldats partant ou revenant du front de l'Est pendant la 1ère guerre mondiale qui sont au coeur de ses préoccupations.
Maîtrisant le clair-obscur et coloriste aguerri, il met sa technique au service tant de sa prédilection tant pour les contrastes violents que pour les jeux délicats de lumière.
Il excelle autant dans les nocturnes tant marins que fluviaux avec l'avènement de l'éclairage urbain, aux tonalités à dominante violette ou bleue que dans les brumes délicates et atones.
Car bien évidemment il a peint la nature mais la peinture de paysage qu'il pratique de manière pointilliste à ses débuts puis proche des nabis à la fin de sa vie, quand il s'est installé près de Giverny, à Rolleboise, est éloignée de la nature contemplative, déserte et idéalisée.
La nature, villégiature avec les plaisirs du bord de l'eau et le développement des loisirs balnéaires, est entendue comme cadre de vie inséparable de l'homme. |