Cette soirée au New Morning commence sous les meilleurs hospices avec une salle comble. Les spectateurs semblent fins prêts à savourer la pause week-end avec la première partie assurer par Yules puis la tête d’affiche, Bjørn Berge !
20h30 passé, entre en scène Yules, duo français fort sympathique, comptant un bassiste et un guitariste/chanteur prêts à nous délivrer un folk très inspiré de l’univers des songwritters américains. Ils viennent nous présenter leur second album intitulé Strike a balance, fraîchement sorti.
Le résultat est sobre, mélodique, d’une appréciable humilité qui se retrouve également dans le comportement des artistes.
Ils ne sont pas sans me rappeler la pudeur et la discrétion d’artistes tels que Neal Casal ou You and You. Les quelques morceaux interprétés dont, un titre dédié à Johnny Cash, nous laissent nostalgiques.
Le public, même s’il paraît conquis, réserve un accueil plutôt timide au binôme qui doit sans doute avoir involontairement transmis une certaine réserve.
Le mini set s’achève alors sur une jolie ballade où l’arpège et les tintements de xylophone sont les maîtres-mots. En d’autres termes, leur prestation est douce, lumineuse et constitue une belle introduction à une soirée captivante.
21h30, apparaît la carrure imposante du chanteur/guitariste iconoclaste, Bjørn Berge. Les trois-quarts de la salle sont venues spécialement pour l’artiste. En effet, tout tend à montrer, avec l’accueil chaleureux qui lui est dédié, que sa notoriété est croissante. Il faut dire qu’à lui seul, ce personnage charismatique dispose de cette faculté incroyable d’occuper l’espace. Je me rappelle que l’an dernier, le norvégien avait cumulé quelques dates au Sunset, club de jazz reconnu mais avec une capacité d’accueil bien inférieure à celle du New Morning.
Cette fois, Mister Berge n’est pas là, comme il le précise à plusieurs reprises, pour faire la promo d’un nouvel album, mais simplement pour le plaisir de partager sa musique. Entre blues, folk, rock et black métal "with blood", le métissage d’influences est parfaitement maîtrisé, et retient l’attention des plus septiques. Il attaque son set avec l’énergie de morceaux comme "Crazy Times" et enchaîne tranquillement avec la légèreté de "These Streets". En fait, il manie parfaitement l’art de souffler le chaud et le froid avec des compositions brutes de forge et d’autres toutes en finesse.
Bjørn Berge va aussi rendre hommage à un maître de la slide en interprétant "Vigilante Man" de Ry Cooder. Alternant toujours entre sa guitare 12 cordes et sa 6 cordes, le guitariste émérite à la voix grave, marque le tempo du pied et parvient à faire à lui seul, le bruit d’un groupe entier. Le guitariste nous offre des riffs diaboliquement rythmés. Ayant compris la valeur ajoutée d’un live par rapport au disque, il emmène ses morceaux loin, très loin. Je suis incapable de dire si la part d’improvisation est grande mais il fait voyager ses morceaux et si parfois, le spectateur perd le fil, il parvient sans difficulté à le remettre sur la voie.
Je ne parlerai pas de son air filou, ni même de ses petites blagues (bien exploitées) qui entrecoupent habituellement ses sets. Cela contribue tout de même à la sympathie du personnage en créant une belle interaction avec le public. Pour en revenir à la musique, j’attribue une mention spéciale au titre qui swing, "One Meat Ball".
Le plaisir de jouer étant sans limites, il ne se fait pas prier longtemps pour les rappels et nous offre un bon bonus avec "Paris", instrumental dédié à notre jolie capitale.
Puis il conclut avec nonchalance par un medley allant de "Black Jesus" à "Zebra" de John Butler Trio, en passant par la reprise efficace de "Buena", titre du groupe Morphine. Les spectateurs médusés se lèvent pour saluer l’artiste qui n’a pas oublié de venir avec son enthousiasme et son talent. Ce fou furieux de la musique sait mettre le public dans sa poche et c’est tant mieux ! |