Pour sa quatrième
édition, le désormais incontournable festival
MOFO de Mains d'oeuvres change d'orientation, abandonnant
une formule 100% antifolk érigée jusqu'ici en marque
de fabrique pour ouvrir son affiche au rock indé classique
; le prix du ticket s'en ressentant d'ailleurs douloureusement.
Première bonne surprise, Temple Temple,
incarnant à merveille cette nouvelle direction, guitare noisy
à la Sonic Youth, loin d'un vulgaire
groupe de reprises des Stooges comme
on l'avait entendu ça et là.
Pour la suite, Shannon Wright ne convainc
pas, s'empêtrant sur un coin de scène dans d'insignifiantes
complaintes au piano : n'est pas Cat Power
qui veut...
Encore enthousiasmé par sa prestation de l'an passé,
c'est même avec un peu d'avance que l'on arrive sur la scène
FO' pour Wilfried, véritable incarnation
de l'antifolk à la française. Rappelant parfois l'Adam
Green de Garfield pour les bluettes
folk, Wilfried se risque à quelques changements de registre
comme en témoigne l'irrésistible "Isabelle"
et son orgue si saillant.
Suite à un ultime chamboulement de programme, Lesser
Lewis se produit finalement en clôture de soirée.
Bien dans l'esprit de ses prestations avec son frère Jeffrey,
"Another Girl" balancée
en cadeau, le show de Jack Lewis part
dans tous le sens au gré des titres, mal recadré par
des frères Düne un peu en
bout de course ... Sympathique, mais on préférait
encore largement ses interventions impromptues en compagnie de son
génial frangin.
Retour le lendemain pour tomber sur Kimya Dawson
: là où sa prestation solo et amère de l'édition
2003 avait laissé un goût d'inachevé, c'est
une Kimya radieuse, soutenue avec brio par des frères Düne
autrement plus en forme que la veille, qui revisite ses trois disques
solo (A noter que la belle a troqué sa tignasse de dreadlocks
pour une coupe raze motte blonde).
Passage éclair ensuite sur la scène FO' pour y voir
des Pull sans souffle avant Cyann
& Ben d'un tout autre niveau, notamment grâce à
l'apport d'un membre du duo Berg Sans Nipple.
Jeudi 1er juillet donc, décidément une sale journée,
Marlon Brando meurt et Mark
E Smith ne daigne pas venir, jouant du même coup un
vilain tour à l'organisation obligée d'appeler l'incroyable
Damo Suzuki à la rescousse. Accompagné
par une improbable formation (batterie - 2 basses - 2 machines),
l'ancien chanteur de Can délivrera
un set indéfinissable, inracontable, usant de sa voix tel
un instrument à part entière, sortes d'incantations
hypnotiques ininterrompues durant cinquante minutes. Le genre de
concert dont on se sort pas indemne ...
Pléthores d'annulations pour la dernière soirée
mais l'occasion quand même de prendre une claque phénoménale
à peine arrivé avec le nouveau projet de la claviériste
de Stereolab, intitulé The
Projects, irrésistible pop sixties pour surprise parties
: nappes d'orgues pleines de couleurs, basse percutante et voix
légère.
Co-organisateur ayant déjà accompagné nombre
de groupes, les Herman Düne starring
Jack Lewis à la basse et Kimya Dawson au chant arrivent ensuite
en grands vainqueurs pour clore le festival : set étonnement
très court, quelques chouettes vieux titres chantés
par André, de superbes harmonies (!), une forte volonté
de faire participer ses invités d'où un résultat
forcément faussé pour qui s'attendait à un
set classique du groupe : excellent concert dans l'absolu.
Après Troy Von Balthazar dont
l'electro-folk tourne à vide, place enfin à la tête
d'affiche du vendredi soir, Jad Fair,
qui sous ses airs de quadragénaire tranquille se mue en fou
furieux, en terroriste : une sorte de Beefheart
des temps modernes ...
Au final, sans atteindre les sommets de l'an passé, le bilan
de ce MOFO 2004 est globalement très positif, notamment grâce
à un line-up souvent impeccable et à cette ambiance
"festival" introuvable dans pareille manifestation à
Paris. De quoi attendre avec impatience que les Mother
Fockers remettent le couvert l'an prochain, ou mieux encore
: avant !
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