Mélodrame Odon von Horvath, mise en scène de Alexandre Zloto, avec Charlotte Andres, Julie Autissier, Ariane Bégoin, Franck Chevallay, Maria Furnari, Dan Kostenbaum, Florent Oullié, François Pérache, Yann Policar, Honorine Sajan, Pierre Emmanuel Vos et Sabine Zovighian.
Alexandre Zloto et la troupe de la Compagnie Taf Théâtre réalisent un vrai et beau travail choral autour de ces "Légendes de la forêt viennoise" du dramaturge allemand Odon von Horvath.
Ce dernier, sous couvert de la comédie populaire viennoise et du mélodrame classique, avec fille perdue et abandonnée qui échappant de peu à la prostitution, finit danseuse nue et voleuse, homme veule vivant d'expédients qui nourrit des rêves trop grand pour lui et surtout pour son courage, et enfant bâtard mis en nourrice et assassiné au nom de l'honorabilité, brosse un portrait cruel et lucide de l'Autriche, terreau fertile pour l'expansionnisme nazi qu'il dénonçait et qui lui valut d'être rangé au nombre des artistes dégénérés dont les oeuvres subirent l'autodafé hitlerien.
Celui qui s'était fixé comme but non la satire mais ce qu'il nommait "le dévoilement de la conscience" s'y livre à une critique socio-politique féroce cruelle et sans rédemption, démontrant que la bonne conscience et les bons sentiments ne sont qu'un leurre qui masque de viles et serviles pulsions induites tant par la bêtise humaine que par l'acquiescement à une idéologie petite bourgeoise.
Dans un quartier populaire de Vienne dans les années 1920, Marianne, métaphore du souffle de la liberté, fille d'un commerçant viennois promise au commis boucher, aspire au bonheur hors des contraintes de ce microcosme délétère mais s'amourache d'un vaurien qui entraînera non seulement la perte de ses illusions mais sa chute et son asservissement.
S'affranchissant de la sempiternelle référence à l'expressionnisme pictural allemand, Jean-Marc Alby a opté pour des décors pop-up ressortissant davantage au réalisme naïf et procédé à un essaimage de petits espaces scéniques nécessaires à la représentation de cette fresque narrative se déroulant sur plus d'une année dans une pluralité de lieux.
Alexandre Zloto assure une mise en scène fluide, et parfois cinétique, qui met l'accent sur le burlesque, au sens premier du terme, révélateur d'une société qui ne fonctionne que sur le mode de la domination, et une solide direction d'acteur. Tous les comédiens, qui campent avec justesse leur personnage sans verser dans le larmoyant ou le misérabilisme, participent à la belle réussite de ce spectacle. |