N&SK
(Nomades et Skaetera) c’est une bande de zico's stéphanois
qui, comme son nom l’indique, sillonne les routes de France
toute l’année pour partager son goût de la musique
dite métissée qui constitue un véritable creuset
dans lequel se fondent toutes les influences. Pour leur première
participation à Solidays, en outsider comme il le dit lui-même,
N&SK s’est taillé un beau succès sous le
Dôme bourré à craquer.
Pour la conférence de presse qui suit leur concert, c’est
Tof, l'accordéoniste, qui s’y
colle pour présenter le parcours du groupe mais aussi ses
valeurs et ses engagements.
Quel est le parcours du groupe ?
Avant 1997 nous formions plutôt un collectif
de musiciens où beaucoup de gens passaient avec toute sorte
d'instruments. C'était un peu les prémisses et ce
collectif absorbait des styles très variés, très
métissés, un peu comme une éponge. Les vrais
débuts du groupe ont eu lieu en 1998 quand nous avons décidé
de faire de la musique sérieusement. Nous avons commencé
par faire des concerts dans les bars du coin, puis de scènes
régionales. La première démo est sortie en
autoproduction et puis il y a eu ensuite 2 albums successifs.
N&SK c'est d'abord le live. Le disque était
au départ un passage obligé car ce n'était
pas évident au départ pour un groupe de live de mettre
son énergie dans la galette. Maintenant ça devient
un plaisir. Notre démarche naturelle est la rencontre avec
les gens. Nous avons du faire 600 concerts. Nous nous arrêtons
à l'inverse des groupes. En fait nous tournons tout le temps
et de temps en temps nous nous arrêtons pendant trois semaines-un
mois quand on peut.
Donc
un plaisir accru en ce qui concerne le passage en studio ?
Oui. Parce que nous avons beaucoup appris et progressé.
Nous sommes plus réguliers et nous avons moins l'angoisse
de la performance. Et puis nous avons compris que lors de l’enregistrement
studio on pouvait se faire aider. Pour le dernier album nous avons
été aidés par Lati Kronlund qui est le bassiste
du groupe newyorkais Brooklyn Funk Essential qui est un des rares
groupes que nous écoutons tous. Le passage en studio devient
alors un plaisir car on peut retravailler les morceaux et donner
une autre couleur. Quand tu as gagné un peu de sous sur l'album
précédent tu disposes d'un peu plus de sous pour avoir
un peu de temps pour enregistrer. Mais au début c’est
très dur quand tu sais que tu as 10 jours pour enregistrer
12 chansons et que si tu te plantes ça restera comme ça
dans la galette "waouh" tu n'y vas pas complètement
détendu.
Comment se débrouille-t-on en autoproduit
pour sortir un album et organiser des concerts ?
On se débrouille. Avant de financer une
démo, il faut les essayer en live dans des bars et on peut
toujours trouver des petits bars pour commencer. On ne gagne pas
sa croûte avec, c'est une certitude mais tu peux avoir le
plaisir du travail bien fait et tu apprends
ton métier sur scène. Notre première démo
a été financée comme c'est le cas pour
la plupart des groupes en faisant une souscription. On va voir les
parents, les amis et on leur donne un papier qui leur permettait
en payant par avance d'avoir le cd quelques mois après.
Ensuite quand en faisant des concerts nous avons
eu la chance de rencontrer un distributeur de disques qui voulait
se lancer dans la production, nous avons sorti le premier album.
Nous avons également fait le second avec lui car nous avons
une entière liberté mais nous avons fonctionné
en licence c'est-à-dire en distribution et en promotion avec
les maisons de disques. Et ça nous correspond bien parce
que ça reste le plus gros des petits et le plus petit des
gros.
Quel
conseil donner aux groupes qui démarrent ?
Etre persévérant, acharné,
têtu. Mais il n'y a pas de bonne méthode. Au début,
je pensais que dans la musique le système commercial faisait
que tu ne pouvais jamais t'en sortir sans un coup de chance faramineux.
Ce n'est pas faux mais en même temps en y travaillant et en
bouffant du kilomètre ça marche aussi. Il n'y a pas
que la star academy pour devenir un nouveau talent.
Avez-vous rencontré de grosses galères
?
Il y en a eu pleins. Quand tu es dans la galère,
tu as les boules mais après tu en rigoles. Des galères
comme se rendre compte que l'on va jouer dans les Pyrénées
à 23 heures et que le lendemain tu joues à 18 heures
à Amsterdam. C'est déjà pas mal. Surtout quand
tu tombes en panne. Le nombre de camions qu'on a passé et
tué sur la route on ne les compte plus. De plus comme on
est nombreux on est toujours à 2 camions. Mais il n'en reste
pas de mauvais souvenirs.
Et un très bon souvenir
Dans les concerts, Solidays sera un très
bon souvenir parce qu'on vient ici sans être vraiment connus,
un peu comme dans le sport nous sommes des outsiders, celui qui
a tout à prouver et qui vient la fleur au fusil. Ici le chapiteau
était plein donc c'est un merveilleux souvenir. Il y a quelques
concerts phares comme ça. Notre concert parisien à
la Flèche d'or aussi c'était super. A Lyon aussi quand
tu y reviens au bout d'un an-un an et demie, nous sommes originaires
de Lyon et de Saint Etienne, qu'au bout de 2 accords alors que le
chanteur n'a pas démarré parce qu'il n'était
pas prêt le public est parti et chante la chanson en entier.
Tu as vachement de plaisir. Mais on a du plaisir aussi en dehors
des concerts avec les rencontres. Nous avons fait une tournée
de 20 dates avec un groupe qui s'appelle les Attaqués. Il
y avait dans ce groupe un accordéoniste manouche d'origine
roumaine qui jouait dans le métro il y a encore un an. On
tape le bœuf ensemble et ça dure longtemps. C'est du
plaisir.
Quelle est l'actualité de l'été
2004 pour les N&SK ?
L'été 2004 c'est d'abord beaucoup
de dates parce que les festivals d'été sont un moment
privilégié avec une ambiance festive dès le
départ et on rencontre les grandes scènes ce qui fait
le pendant avec l'hiver où on fait des lieux plus intimistes.
Nous allons au festival de Lyon en juillet et nous enregistrerons
un live sur 4 dates. Nous ne savons pas quand il sortira mais nous
voulons profiter de l'occasion de ces concerts pour mettre quelque
chose en boite. Avoir une photographie à un moment donné
de ce que l'on fait sur scène.
Vous êtes de bons musiciens et comme vous
le dîtes vous-même un groupe de live. Quel est l'intérêt
pour vous de faire un live ? Et que veut dire live ? Un enregistrement
en analogique, d'une seule prise ?
Nous allons enregistrer en numérique pour
une question financière. Mais l’enregistrement interviendra
en vrai live avec des prises sur scène. Pourquoi un live
tout simplement parce que c'est une gageure pour un groupe énergique
sur scène. Nous espérons y arriver peut être
même au détriment du son. Le plaisir du live c'est
aussi de permettre d'écouter un album d'une traite. Il y
aura bien sûr des titres de l'album "Le cirque du millenium"
que nous défendons actuellement mais il y aura aussi des
titres plus anciens que nous avons gardé et que le public
aime. On se demande même si nous n'allons pas mettre sur le
live des morceaux de notre première maquette qui ne figurent
sur aucun album.
Cette volonté là c'est de proposer
autre chose et c'est un cadeau au public. Pour ma part, même
en tant que spectateur j'ai toujours préféré
les albums live qui sont plus porteurs de l'émotion de la
tournée. On ne peut pas retrouver cela sur un enregistrement
studio. Je suis fan de M, les albums c'est bien mais le double live
est une tuerie car on retrouve sa tournée en fermant les
yeux.
Pourquoi
êtes-vous venu à Solidays ? Cela représente
quoi pour vous ? N'est-ce pas l'occasion de s'inscrire dans une
grande famille d'artistes ?
Il y a 2 choses dans le festival. Il y a la cause.
C'est le premier truc. Je vais peut être enfoncer des portes
ouvertes mais comment ne pas être solidaire ? Cela nous paraît
être une évidence et c’est une cause pour laquelle
nous avons déjà joué il y a quelques années
notamment pour AIDES. Nous essayons de suivre cet engagement. La
deuxième chose et il n'y a pas de honte à le dire
c'est une scène formidable sur Paris avec le plaisir de jouer
pour un public venu pour écouter de la musique. C'est un
peu l'opposé de la Fête de la musique car il y a vraiment
un déplacement volontaire du public ce qui rend les lives
plus forts. Et puis pour moi qui suis fan de Bashung ce sera un
grand plaisir de le voir sur scène et derrière la
scène.
Vous avez une chanson qui s’appelle "Black
blanc beur". Que pouvez-vous dire sur la façon dont
les médias présentent certains événements
?
C'est toute la thématique de nos deux derniers
albums. On nous a d'ailleurs souvent reproché d'enfoncer
des portes ouvertes, d’être des soixante-huitards attardés,
plein de choses mais nous pensons que les portes ne sont pas toutes
ouvertes. Il y 20 % des gens qui ont bel et bien fermé la
porte. On s'attaque aussi pas mal aux médias qui sont tenus
par le fric. Quand il faut faire du fric il faut faire de l'audience
et quand il faut faire de l’audience il faut trouver des sujets
très racoleurs. L'homme est pervers
et il a toujours un fond de perversité pour regarder ces
sujets. La télé stigmatise les différences
et le pire est que l'on ne peut pas dire que c'est faux. A un moment
donné c'est vrai que c'est monsieur untel qui a bien fait
telle connerie. Seulement on ne montre que cela et à longueur
de journée. On veut réagir à cela, qui tend
vers une société à l’américaine
avec le règne de la peur.
Un peu comme le film Bowling for Columbine de Michael
Moore. La peur au quotidien, la peur de son voisin rend les gens
dingues mais aussi dociles. Cela étant nous ne sommes pas
là pour donner des leçons. Nous ne sommes pas des
maîtres à penser nous sommes des musiciens qui essaient
de lever des lièvres, essayer d'ouvrir à la discussion
ou à la réflexion. Pas forcément pour apporter
de solutions parce que nous ne nous sentons pas spécialement
compétent pour cela. Ouverture d'esprit oui et nous avions
une chanson sur l'album précédent qui disait "Le
plus de chacun c'est sa différence".
C'est ce que nous essayons de défendre.
Au lieu d'avoir une société nivelée où
tous les gens s'entendent bien parce qu'ils sont tous identiques
nous essayons de prôner l'inverse. C'est parce que nous sommes
différents que c'est intéressant.
C'est
le message que vous voudriez transmettre dans ce festival ?
Notre engagement a toujours été plus
général que l’engagement pour la recherche contre
le sida. Mais cela s'inscrit dans le même registre : le sida
des pédés, des drogués que l'on stigmatisait.
On arrive à en sortir un peu maintenant que les hétéros
sont également touchés.
Le côté très métissé
de votre musique vous permet-elle de toucher plus facilement les
minorités et notamment dans le cadre de cet engament de lutte
contre le sida ?
Ce n'est pas notre but. Ce n'est pas réfléchi
dans ce sens. Mais notre chanteur est berbère kabyle et il
a cette langue là. La violoniste vient du conservatoire.
Le guitariste est plutôt funk, moi je suis fan de chanson
française. Donc quand on mélange tout cela soit il
y en a qui décide pour les autres et tu fais quelque chose
de précis soit on apprend à vivre et à jouer
ensemble et il en sort quelque chose de métissé comme
la société. Ce que nous représentons sur scène
c’est ce que nous essayons de défendre dans nos textes.
C'est s’enrichir des différences. Nous n’avons
pas pour finalité de nous adresser à une minorité.
Ce serait même l'inverse. Nous nous adressons à tous.
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