J'ai un ami qui a cette théorie : c'est le troisième album d'un groupe qui est réellement révélateur de ce que vaut le groupe. Est-il mauvais ? Le groupe ne vaudra pas le détour historique. Est-il bon ? Il faudra se repencher sur les deux précédents, surveiller attentivement les suivants. De Godspeed You Black Emperor à PJ Harvey, il ne manque pas d'exemples pour accréditer sa thèse.
D'ordinaire, j'ai tendance à considérer pour ma part qu'il n'y a rien de tel qu'un premier album et, de PJ Harvey à Godspeed You Black Emperor, les exemples ne me manquent pas non plus. Ainsi allons-nous, depuis des années, devisant sur la primauté du premier ou du troisième. Il faut cependant reconnaître que Hum, le troisième des Cornflakes Heroes, est une sacrée pierre dans le jardin de ma thèse.
Il y a dans les pas tout à fait quarante minutes de ces onze titres assez d'énergie et de folie pour faire un grand album rock à l'anglo-saxonne, ce qui n'est pas si fréquent chez nous autres frenchies. A commencer par le magnifiquement tubesque "In my rags", qui pourrait bien échouer prochainement sur toutes vos ondes, si elles avaient du goût, au milieu d'une playlist composée des Arctic Monkeys, Nationals et autres Franz Ferdinand – une playlist où les Cornflakes Heroes seraient très loin d'avoir à rougir, d'ailleurs.
Il y a du Kinks chez ces garçons-là (c'est palpable sur "Lucy was a bitch"), mais aussi des relents très dirty-rock 90's (Sonic Youth, Nirvana... "Road Sign" ne laisse aucun doute sur cette filiation). La voix fera songer à celle du Matthias Malzieu anglophone de Happening Songs (1996). On se souviendra certainement aussi de Pavement ou Sebbadoh. Les égarements d'une lead guitare parfois privée de direction claire évoqueront peut-être même le premier album des Cure (ou tout au moins sa version américaine ornée de ses pyramides : Boys Don't Cry, 1980)... On voit à côté de quels grands noms les Cornflakes Heroes traînent les guêtres de leur indie-rock.
Addictif troisième album, qui exigera que l'on se penche sur le reste de la discographie du groupe (Off with your heads en 2005 et Dear Mr Painkillers en 2008, tous deux parus chez les excellents Greed Recordings), ne serait-ce que pour déterminer quel album doit nous indiquer que l'on a affaire à un groupe remarquable. |